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Bayrou jette l'éponge: Jeux et enjeux d'une crise politique annoncée

par Abdelhak Benelhadj

La démocratie libérale représentative est handicapée par son incapacité à réguler ses « excès de liberté ». Par exemple, aux Etats-Unis il faut être milliardaire ou soutenu et financé par des milliardaires pour accéder aux réseaux d'information nationaux et espérer, non pas d'être élu mais seulement de participer à une compétition électorale locale ou nationale.

Par exemple dans de nombreux pays démocratiques libéraux, les fonctions politiques sont héréditaires ou, à défaut, le privilège de castes économiques fortunées.1

Par exemple, personne ne peut nier que la France est aujourd'hui gouvernée par une minorité sortie des urnes, ce qui fait injure à la démocratie et surtout une offense à la République. On peut comprendre que E. Macron n'ait pas pensé au RN à Matignon. Le Président a préféré faire alliance avec les Républicains alors que d'autres options s'offraient à lui, notamment avec des personnalités rose pâle qui n'auraient en rien remis en cause les axes principaux de sa politique ou celle des lobbys puissants qui gouvernent à l'ombre de l'Elysée.

Le Premier ministre est le chef d'un parti (le MODEM) qui a obtenu aux dernières élections législatives 4.59% des suffrages (6.2% des sièges, 36/577). De nombreux membres de son gouvernement sont issus d'un parti (LR) qui pèse 48 députés (8.3% des sièges).

Le bricolage institutionnel, orchestré par un président acrobate totalement impopulaire, aboutit à une majorité de circonstances très fragile, écartelée qui ne gouverne que par des alliances improvisées dans les « couloirs » au mépris de l'esprit d'une Constitution dévitalisée et instrumentalisée.

La décision surprise du Premier ministre de poser la question de confiance accélère un processus en œuvre depuis sa nomination dans la mesure où son maintien à son poste résulte d'un jeu politicien qui jure avec les institutions de la Vème République et ne découle pas (sans naïveté aucune) d'une adhésion majoritaire et transparente introuvable. Il ne s'agit pas ici seulement de majorité parlementaire. Non seulement huit français sur dix n'ont pas demandé sa nomination à Matignon, mais le nombre s'accroît de ceux qui ne cessent d'exiger son départ.

Pire, derrière le rejet de F. Bayrou, se cache (à peine) celui du Président de la République.

Jamais sa popularité n'a été aussi basse. Il bat record sur record, mais conforté par les prérogatives que lui confère la Constitution, il demeure inamovible, complétement indifférent aux sondages qui révèlent régulièrement le rejet dont il fait l'objet.

Bayrou suicidaire ?

Une fausse sortie ?

Si F. Bayrou avait décidé de se retirer pourquoi n'a-t-il pas choisi tout simplement de démissionner ?

Qu'avait-il donc en tête ?

Croire que le Premier ministre et son Président sont décidés à rendre les armes et à placer leurs têtes sur le billot serait mal les connaître et ignorer à quelle faune de carnassiers ils appartiennent. 2

Les hommes politiques, surtout quand il s'agit de personnalités carriéristes et rouées, comme l'inoxydable Bayrou, souffrent de nombreuses pathologies, (certains, rarement, mettent fin à leurs jours) mais pas du suicide politique.

Le Premier ministre n'ignorait rien de son impopularité.

F. Bayrou, comme avant lui Le Pen, Mitterrand, Chirac... a griffé, mordu, rampé, avalé des couleuvres... mais renoncer au pouvoir, jamais. On se souvient comment il avait forcé la porte de l'Elysée et s'était imposé à E. Macron le 13 décembre dernier.

Quel naïf imaginerait une seconde qu'il serait disposé à quitter Matignon la fleur au fusil et le baluchon sur l'épaule ? Ce vieux roublard, toujours en arrière-plan, jamais sur le devant de la scène, ce faux mou, ignoré, négligé par les médias est un vrai doberman de la politique, un drogué du pouvoir. Il y a planté ses crocs et ne lâchera rien.

Il dramatise et met en scène la fin du monde. De la naphtaline, il sort le vieux truc : « moi ou le chaos ».

« Je me battrai comme un chien »

« Nous avons quinze jours pour créer un débat national sur le sujet mettre chacun devant ses responsabilités. (...) Je n'ai pas ‘choisi' cette voie du vote de confiance. J'ai seulement conclu qu'il n'y avait pas d'autres. Car je ne voulais pas d'un projet dépecé centimètre carré par centimètre carré. (...)

F. Bayrou se reconnaît dans le destin de P. Mendes France, éphémère président du Conseil du 18 juin 1954 au 23 février 19553, et confirme ainsi à ceux qui doutent, que la Vème République est morte de sa belle mort.

Sa posture et ses propos renseignent sur les ambitions d'un homme impatient trop longtemps relégué au second plan, à l'ombre des appareils, au service de la promotion des « jeunes premiers ».

Plaçant sa cause à la hauteur d'un défi churchillien, conforme en cela à ses racines MRP, il ajoute : « Les Français se sont relevés de deux guerres mondiales, on sortira de cette situation-là » (F. Bayrou, LCI, mardi 25 août 2025)

F. Bayrou voudrait bien sortir de Matignon, mais à condition de rentrer dans l'histoire.

En attendant l'avènement de ce glorieux destin, il faudra bien expliquer sa décision de lundi. Elle s'explique par le passé. Elle s'explique aussi par l'avenir. Il n'y a pas qu'un budget, imposé par Bruxelles et les marchés, à sauver.

L'annonce d'un prochain blocage du pays qui rappelle le mouvement des « Gilets jaunes », imprévisible et incontrôlable, serait de nature à expliquer le choix de l'exécutif.4 Le vote prévu le 08 septembre (question de confiance) devait-il servir à désamorcer la grève générale du 10 ?

Quand on se laisse acheter, il ne faut pas s'étonner qu'un jour quelqu'un s'avise de vous vendre.

Sauve qui peut ! La nudité des passe-murailles.

Socialistes, Communistes, Ecologistes... et une pelletée d'opportunistes se retrouvent sans espace pour « négocier leur utilité » :

- Place Publique, dépité, se lamente : « Alors que nous avions, comme d'autres, annoncé que nous présenterions des propositions alternatives à la rentrée, le Premier ministre fait le choix du passage en force ». R. Glucksmann cafouille une explication incompréhensible : « avec gravité et lucidité sur les conséquences de cette nouvelle crise politique », il « ne peut que refuser sa confiance a priori à un gouvernement qui s'exonère du dialogue républicain et sincère qui seul permet de construire un chemin ». Ses deux députés ne faisaient pas le poids et ne seront peut-être plus en état de faire quoi que ce soit après la prochaine « dissolution ». Place Publique a été privé de partager « la responsabilité aurait été d'organiser un dialogue serein et transparent », et d'accepter « le compromis dans un contexte d'absence de majorité ». Le « compromis » et la « collaboration » ne sont plus d'actualité.

- Autres victimes, les Socialistes qui s'accrochent aux branches et tentent (en vain) de radicaliser leur discours pour se rapprocher des infréquentables et pourtant si les nécessaires LFI. Les socialistes ont été au seuil de la disparition, par le quinquennat ruineux de F. Hollande qui a dilapidé tout le capital politique accumulé par F. Mitterrand depuis le coup réussi du « Programme Commun de la Gauche » (1972) qui a fait la ruine du PC. Certes, la chute ne s'est pas faite en un jour. Personne n'oubliera les pages glorieuses écrites par un Lionel Jospin (1997-2002), une sorte de Hollande.0 prémonitoire. L'alliance avec LFI a permis de redorer leur blason et leur a donné l'illusion d'un retour aux manettes. Ce serait confondre ruse et intelligence. Ils ont sauvé F. Bayrou de la chute en sauvant son budget et son poste le 05 février. Ils croyaient depuis avoir une créance à faire valoir et une petite porte d'entrée dans le Saint des saints.

Au cours de l'été, pendant que les Français étaient à la plage, des missi dominici négociaient laborieusement les chutes de tables pour contourner les obstacles parlementaires érigés par les uns et les autres.

B. Vallaud (président du groupe socialiste à l'Assemblée) et O. Faure (secrétaire général du PS) nient aujourd'hui avoir eu le moindre contact avec les messagers du pouvoir pour rééditer leur abstention de février. Seul Hollande (né un 12 août) reconnaît avoir reçu un... « Joyeux anniversaire » de la part de Amélie Montchalin (ministre chargée des Comptes publics).

Hélas ! La trahison est le mode normal des mœurs en vigueur dans le dédale labyrinthique du pouvoir. Dans les relations verticales, c'est toujours celui qui est « en haut » qui décide du sort de celui qui est « en bas ». Il n'y a jamais de contrat d'honneur dans un monde qui en ignore le mot et le sens. Le 25 août, les socialistes (entre autres) ont été pris à contre-pied par une décision qui devait rester secrète. Même le Palais Brogniart et ses agioteurs ont été pris de court.

Les Communistes sont, comme d'habitude, les orphelins politiques et électoraux d'une classe ouvrière qui a disparu avec des ouvriers qui leur préfèrent désormais le Rassemblement National. Eux aussi sont sur le marché électoral en attente d'une alliance que leur Secrétaire Général a tout fait pour torpiller.

- Restent les électrons libres : les Ruffin et sa « Picardie debout », les Corbière, C. Autin... dans le coup d'« Après » (Alliance pour une République Ecologique et Sociale) ...

Une dissolution éventuelle de l'Assemblée s'ajoute à la proximité des élections municipales qui vont restreindre l'espace de manœuvres des identités politiques incertaines et interdire par ailleurs toute possibilité de combinazione entre partis pour en sauver certains.

Deux partis vont émerger dans des logiques diamétralement opposées

- LFI est le parti le plus clair et le plus constant politiquement dans l'analyse et la stratégie. Ses objectifs sont combattus pour deux raisons :

1.- Il parvient à se concilier deux électorats, en apparence éloignés l'un de l'autre : les cadres supérieurs, les intellectuels... ce qui explique ses succès électoraux dans les grandes villes et les centres urbains, et les banlieues pauvres que le PC a négligées. Son discours possède une cohérence causative et explicative difficile à réfuter, partagée du reste par des économistes, des sociologues et des politiques qui n'appartiennent pas à son mouvement. C'est le cas par exemple de Thomas Piketty, libre penseur irrécupérable5.

2.- LFI ajoute une stratégie compatible à la fois avec les idées communistes en faveur du travail, des travailleurs, en opposition radicale avec l'inique répartition de la valeur ajoutée, notamment celle accumulée par un capitalisme transnational numérisé spéculatif, mais aussi avec les valeurs et traditions républicaines françaises qui renvoient à la Révolution de 1789. Il n'est pas fortuit que J.-L. Mélenchon fasse souvent référence à Maximilien Robespierre. LFI a néanmoins de nombreux handicaps :

1.- Ses difficultés à unifier une galaxie dispersée à gauche. La contrainte est limpide : une stricte cohérence programmatique réduit la taille et la solidité du front. Un assouplissement politique réduit la visibilité politique et fragilise les perspectives.

2.- La capacités de mobilisation des banlieues est limitée dans des proportions difficiles à estimer. Il n'est pas aisé de transformer une colère sociale qui dégénère quelques fois en violences urbaines destructrices, en une lutte politique policée qui passe par une hausse des inscriptions sur les listes électorales et les taux de participation aux scrutins. Cela, sans compter une géographie électorale qui n'est pas à l'avantage de ce parti.

- La situation du Rassemblement National est plus complexe parce qu'il est constitutivement écartelé entre des électorats et des intérêts divergents et même strictement opposés :

- d'un côté le « peuple de France, menacé par des vagues migratoires parasites, qui s'en prennent à sa prospérité, à sa sécurité et à son identité » et,

- d'un autre côté, il défend le patronat petit et très grand ainsi qu'une politique guère différente que dénonce la majorité des Français : baisse de la fiscalité sur le capital et les grandes fortunes, déréglementation, désétatisation... le slogan poujadiste de papa Le Pen est dans toutes les mémoires, à propos de l'Etat : « descends mon épaule et enlève ta main de ma poche ». Sa nature profondément attrape-tout, conforme d'ailleurs à celle de ses homologues des années 1930, pas seulement en Italie et en Allemagne, constitue une limite qu'il lui est difficile de dissimuler à l'heure d'Internet et des réseaux sociaux. Une géométrie impossible : concilier deux objectifs politiques incompatibles.

Sorties de crise possibles :

1.- Bayrou inamovible.

Si ces tractations dans l'ombre réussissent, rien n'interdit que le Premier ministre puisse être à nouveau sauvé ou bien par les socialistes ou par le Rassemblement National. Il ne faut jamais sous-estimer les capacités de ces partis de trapézistes à improviser des retournements spectaculaires et à leur trouver une raison.

2.- La formation d'un nouveau gouvernement autour d'un nouveau Premier ministre du Bloc Central ou de la Droite est plus qu'improbable. Barnier et Bayrou l'ont démontré. Son sort serait identique au leur.

3.- Le pouvoir n'est jamais en manque d'hommes de paille.

Le PS s'est rangé très vite à côté de ceux qui retirent leur confiance à F. Bayrou. On a vu pourquoi. Mais rien n'interdit de penser à la nomination d'un nouveau Premier ministre venu des cercles socialistes compatibles, type Bernard Cazeneuve, Y. Le Drian ou Raphaël Glucksmann.

4.- Deuxième dissolution

En cas de dissolution de l'Assemblée, un accord programmatique entre le PS et LFI tel que celui négocié avec le NFP en 2024 « ne paraît pas concevable », estime B. Vallaud dans Libération (du 27 août), si les Insoumis y sont encore disposés, cela tombe sous le sens...

Il avoue benoîtement : « vu la situation du pays, nous n'espérons pas la dissolution » que souhaitent d'autres partis, entre autres LFI et le Rassemblement national.

Tout le monde a bien compris que ce n'est évidemment pas l'état du pays qui préoccupe le PS.

5.- Démission du Président

Mélenchon y tient et les Insoumis vont déposer une motion de destitution d'E. Macron en cas d'échec de Bayrou après une éventuelle dissolution de l'Assemblée.

Le RN qui a le vent en poupe y pense aussi. Déjà un duo Le Pen-Bardella est prêt depuis longtemps.

Le PS n'étant pas prêt pour des Législatives anticipées et n'ayant pas de candidat sortable, (même si F. Hollande ne désespère pas revenir à l'Elysée), il ne l'est pas davantage pour des Présidentielles. En fait, les socialistes auront bien du mal à éviter une Berezina que ce soit pour des législatives ou pour les prochaines municipales.

Dans ces circonstances, le paysage politique ne peut que s'éclaircir au détriment des nombreux pêcheurs en eaux troubles qui vont faire les frais du choix de l'exécutif. Bayrou qui a abondamment exploité leur « flexibilité » ne leur offre plus aucune marge de manœuvre. Il n'a plus rien à négocier. Ce qui explique leur précipitation à refuser un soutien que plus personne ne leur demande. Imaginer un instant E. Macron capable de se retirer ne relèverait plus de l'incompétence... Et il y a de bonnes raisons à cela.

1.- Contrainte budgétaires.

La France est sous une pression extrême de Bruxelles, Francfort, ses partenaires « frugaux », les marchés financiers, du patronat local... Il n'est plus question de gérer le budget français comme le fait l'Elysée depuis 2017. S'endetter pour combler le trou politique entre d'une part, le capital qui veut moins d'impôts, de cotisations et plus de déréglementations et, d'autre part, les Français qui tiennent à un Etat redistributeur des richesses produites. Aucune acrobatie n'a permis d'en sortir et le « trou » est devenu un gouffre : plus de 5% de déficit budgétaire et un endettement de plus de 115% du PIB.

Accroissement des recettes ou baisses des dépenses, il faut choisir.

Le problème n'est évidemment pas plus ou moins d'impôts. La question est quels impôts et sur quels revenus et quel patrimoine ?

Après le discours de F. Bayrou du 25 août, la bourse de Paris a très vite réagi.

Lundi : -1.59%

Mardi : -1.70%

2.- Contraintes géopolitiques

Bien qu'ayant des origines proprement françaises et européennes, la crise que connaît la France dérive, au moins dans sa forme et de quelques-unes de ses facettes, de la crise ukrainienne qui a imposé aux pays européens des contraintes économiques et budgétaires très lourdes. Elles se sont ajoutées aux contradictions venues d'une politique européenne qui a pris des voies franchement libérales après 1991, visant à démanteler tous les dispositifs de protections sociales issus de la fin du dernier conflit mondial.

Aujourd'hui, la France est une pièce essentielle dans le soutien à l'Ukraine. Ce soutien est organisé de manière cachée par Washington. D. Trump négocie avec Moscou d'un côté et fait tout pour couler son « ami » V. Poutine de l'autre. A observer l'évolution du dollar et du prix du pétrole, on se croirait revenu à la politique que R. Reagan avait mis en place pour « couler » l'URSS.

Dans ce jeu de dupes, E. Macron, et ses partenaires allemands et britanniques jouent un rôle essentiel.

Tous les trois sont ce mercredi 27 août à Chi'inãu (Moldavie) pour interférer publiquement dans des élections législatives prochaines tout en accusant Moscou de le faire. Il s'ensuit, en raison de toutes ces considérations, que ni les marchés, ni les agences de rating, ni Bruxelles ne feront obstacle à la gestion par Paris de la crise politique en cours.

Mieux, toute l'assistance sera apportée pour poursuivre la politique actuelle « quoi qu'il en coûte » socialement.

Un échec de l'exécutif serait une catastrophe incalculable pour un bloc occidental qui ne peut se résoudre à abandonner l'Ukraine, précisément parce qu'il s'agit d'un enjeu qui dépasse de très loin celui de ce pays.

Notes :

1- La grande majorité des parlementaires sont des cadres ou exerçaient une profession intellectuelle supérieure. Ils représentent 67% des députés, alors que seulement 11% de la population française appartient à cette catégorie. Il y a 1% d'ouvriers à l'Assemblée alors qu'ils représentent 11% de la population. (https://datan.fr/statistiques)

2- Lire, Georges Simenon, « Le Président », 1958, Livre de Poche, 188 p. adapté au cinéma par Henri Verneuil en 1961 avec les répliques savoureuses de Michel Audiard, qui n'ont pas perdu une ride.

3- C'est tout ce que la plaque commémorative, rue Turgot, lieu de sa naissance, a retenu.

4- Lire. Abdelhak Benelhadj : « Les couleurs du Printemps français. » Le Quotidien d'Oran, 13 décembre 2018.

Lire. Abdelhak Benelhadj : « La France macronienne dans l'impasse. » Le Quotidien d'Oran, 17 janvier 2019.

5- Il a refusé la Légion d'honneur en 2015 et refuserait sans doute le Nobel qui ne lui serait jamais proposé.