![]() ![]() ![]() ![]() Depuis l'indépendance de l'Algérie, les relations algéro-françaises ont toujours été complexes, marquées par
des épisodes de tension, des tentatives de rapprochement, et des fractures
symboliques nourries par une histoire coloniale douloureuse. Aujourd'hui
encore, plus de soixante ans après la fin de la colonisation, ces relations
restent fragiles, soumises à des vents contraires alimentés par les agendas
politiques, les questions migratoires, et les représentations croisées que les
deux peuples entretiennent l'un envers l'autre.
Ces derniers mois, une crispation nouvelle semble s'installer, révélant, non seulement, un durcissement de la position française, mais également une tentative de redéfinition des rapports de force, notamment sous l'influence de l'extrême droite. Cette dernière, désormais bien implantée dans le paysage politique hexagonal, instrumentalise les relations avec l'Algérie à des fins électoralistes, agitant le spectre de l'immigration comme un levier de mobilisation. L'approche n'est pas nouvelle, mais elle prend, aujourd'hui, une tournure inédite : celle d'une politique de rétorsion ciblant les personnes d'origine algérienne ou ayant des attaches avec l'Algérie. L'annonce, en France, du gel administratif et juridique de certains biens immobiliers appartenant à des ressortissants algériens, constitue une escalade sans précédent. Derrière cette mesure, se dessine une volonté de pression directe sur les cercles de pouvoir algériens, sous-entendant que les leviers décisionnels à Alger seraient influencés, voire dictés par la peur de perdre des privilèges matériels en territoire français. Ce geste politique, attribué à une droite conservatrice incarnée notamment par Bruno Retailleau, trahit une méconnaissance profonde des dynamiques actuelles de gouvernance en Algérie. Contrairement aux décennies précédentes où certaines élites, accusées de corruption ou de collusion avec les anciennes puissances coloniales, jouissaient de biens en France comme gage de leur intégration discrète dans le système mondialisé, l'Algérie post-2019, marquée par le Hirak et une profonde recomposition institutionnelle, tente de s'affranchir de cette dépendance symbolique. L'affaire Sansal ou Bouchouareb constitue, à cet égard, un précédent révélateur. Elle illustre comment l'État algérien a entrepris de délier les fils invisibles qui rattachaient certaines figures de l'ancien régime à l'étranger, notamment à travers la confiscation des biens acquis illégalement ou l'ouverture d'enquêtes sur les détournements de fonds. Ainsi, Retailleau et ses semblables semblent croire que l'Algérie de 2025 est encore gouvernée par une « issaba », un clan mafieux sensible aux menaces extérieures, alors que les signaux politiques montrent clairement une volonté de recentrage souverain et de rupture avec les compromissions du passé. Cette crise révèle en vérité une double impasse: d'un côté, une France tiraillée entre sa mémoire coloniale non assumée et ses peurs démographiques contemporaines ; de l'autre, une Algérie en quête de dignité, de souveraineté réelle et de respect sur la scène internationale. L'usage de la pression économique ou symbolique ne saurait réécrire les rapports diplomatiques sur des bases saines. Ce que réclame l'histoire, ce que réclame la mémoire des martyrs de la guerre d'indépendance, ce que réclame l'avenir des jeunes générations algériennes et françaises, c'est une relation fondée sur le respect mutuel, la reconnaissance des torts passés, et la construction d'un partenariat lucide, débarrassé des nostalgies impériales et des dépendances occultes. L'Algérie ne pliera pas. Ni sous le poids de ses souvenirs, ni sous la menace voilée de mesures administratives françaises. Car la souveraineté ne se négocie pas. Elle s'affirme, elle s'incarne, et elle se défend. Et ceux qui croient pouvoir dicter leur loi depuis Paris, sous prétexte que certains possèdent des appartements à Neuilly ou à Marseille, se trompent d'époque et de peuple. |
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