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Blida: Ni transport, ni pain, ni lait?

par Tahar Mansour

Les Algériens, à l'instar de tous les musulmans du monde, ont fêté l'Aïd El-Kébir dans un climat de sérénité et de ferveur, encouragés par un soleil qui leur a fait oublier, pour une journée, le climat pluvieux de ces dernies jours.

Même les moutons ont vu leurs prix chuter la veille de l'Aïd et beaucoup ont pu quand même l'acheter après qu'ils eurent fait une croix dessus à cause justement des prix trop élevés pratiqués par des suceurs de sang qui ont fini par abdiquer quand ils ont vu que les bêtes allaient leur rester sur les bras. Bien sûr, le sachet de lait est demeuré introuvable, les fruits et légumes ont vu leurs prix décupler, il fallait se lever tôt pour acheter quelques baguettes de pain, mais la joie était partout surtout après que les enseignants et les retraités eurent touché leurs dus à partir de dimanche. Et là, il ne faut pas oublier les agents et responsables d'Algérie Poste qui sont restés à leur? poste jusqu'à 17 ou 18h de lundi dernier, veille de l'Aïd. Certains ont chargé des parents pour leur acheter le mouton ou ce dont avaient besoin leurs femmes mais ils sont restés pour permettre à des milliers de gens de retirer leur argent.

 Les bureaux de poste étaient envahis dès le matin par d'innombrables détenteurs de comptes CCP et, l'après-midi, au prix de mille et un efforts, il n'y avait presque personne, tous ayant pu retirer leur pécule viré tardivement. Beaucoup tiennent à les remercier pour ce geste qui leur a permis de passer un Aïd comme tout le monde. Mais comme toute médaille a son revers, nous avons vécu aussi le manque de transport, de pain, de lait, de denrées alimentaires, surtout pour la première journée de l'Aïd, alors que les cafés demeuraient fermés. Cette situation pénalise les citoyens qui sont obligés de constituer des stocks, ce qui crée une tension et permet à des parasites d'augmenter les prix. Pourtant des appels avaient été lancés par plusieurs institutions pour que les commerces restent ouverts, au moins pendant l'après-midi du premier jour, mais il paraît que les habitudes sont plus tenaces.

 Il y avait aussi, le jour de l'Aïd, les policiers, les gendarmes, les médecins, les paramédicaux, les pompiers, les militaires qui ont veillé à la santé et à la sécurité des personnes, loin des leurs, avec quand même une pensée émue quand ils voient leurs concitoyens accompagnés de leurs enfants, parader avec leurs moutons avant qu'ils les sacrifient dans la joie et la ferveur. Mais il y a aussi ces centaines de sans-abri, de sans famille, qui ont erré dans les rues, seuls visibles après la prière de l'Aïd car tous les autres étaient chez eux pour égorger le mouton ou pour se cacher, au moins. Puis, il y a aussi tous ces pauvres qui ne trouvent même pas le pain quotidien et qui attendent, dans le silence gêné de leurs maisons, un geste des voisins et des parents.