
L'absence de communication officielle érigée comme un
fondamental de gouvernance est en train de dépeindre sur tous les aspects de la
gestion de la vie à l'algérienne. Si le mutisme est de rigueur, s'agissant des
affaires dites de politique extérieure ou frappée du sceau d'atteinte à la
sûreté de l'Etat, selon la version officielle de la chose, il n'en demeure pas
moins qu'un dossier comme la pénurie d'essence qui sévit maintenant depuis plus
d'une semaine à l'ouest du pays et dont les questions restent sans réponse puisse
choquer les Algériens. On est loin des dossiers de corruption touchant la
Sonatrach et à des années lumières des enquêtes sur Khalifa et le meurtre de
Tounsi et un peu plus loin sur les commanditaires de l'assassinat de Boudiaf
pour que Naftal se cache derrière le secret de l'instruction et refuse de
communiquer sur un simple problème de carburant pollué. Cette façon de
procéder, que d'aucuns associent à un pur mépris envers les légitimes inquiétudes
des automobilistes, est en total décalage des formes les plus basiques de
l'information. Naftal, en décidant de ne pas répondre au téléphone, se
contentant de communiqués laconiques pour rassurer les victimes de son
carburant « hors la loi » qu'ils allaient être indemnisés, ne fait que
perpétuer cette philosophie du silence qui veut qu'on solutionne un problème en
niant son existence. Le silence de Naftal comme celui de toutes les
institutions officielles, à commencer par les services de la présidence, ouvrent
grandes les portes aux spéculations les plus excentriques. La non communication
sur des événements cruciaux qui touchent le citoyen dans son quotidien a de
quoi exacerber les plus folles rumeurs et réduire au silence les scénarios les
plus logiques. Ainsi, et pour rester dans l'exemple de Naftal, alors qu'un
communiqué explicatif de l'entreprise aurait suffi mettre fin aux explications
les plus farfelues, son silence pesant a laissé libre cours à toutes les
rumeurs. Du carburant pollué au large de la mer dans des citernes pas très
étanches, à un mélange avec du mazout ou encore pire, à une mauvaise
manipulation à la raffinerie d'Arzew ou à un sabotage, le bruissement des
raisons officieuses a fait son chemin dans l'esprit des gens. Chacun, au volant
de sa voiture à faire le pied de grue devant une station-service, a eu le temps
de se faire son idée sur les raisons de cette pénurie que Naftal dément
toujours, à croire que ses responsables s'alimentent à des pompes espagnoles.
Cette tendance au secret, longtemps cultivée comme un appendice du pouvoir,
finit toujours par montrer ses limites et, gageons cette fois-ci, qu'au bout
d'une pompe à essence, il serait temps que les « petits » responsables, eux au
moins, rendent compte de la situation en attendant qu'en haut lieu ceux qui ont
conduit le pays vers le précipice n'en fassent de même.