|
Saïd Sayoud aux nouveaux walis: La bureaucratie est notre ennemi commun!
par Cherif Ali* Plus personne ne
veut de cette administration fondée sur l'autoritarisme, sur le repli, le
clientélisme et où s'entremêlent des notions confuses d'intérêt général,
intérêt public, ordre public ou intérêt du service !
Tels sont les propos de Saïd Sayoud, le ministre de l'Intérieur, des Collectivités locales et des transports qui n'a pas manqué d'aborder la question de la bureaucratie, à l'occasion de sa tournée d'installation des nouveaux Walis. En la circonstance, il a rappelé sa vision de la gouvernance locale, celle qui place le citoyen au cœur de l'action publique. Dans son discours, il a, lourdement, insisté sur la nécessité de rendre l'administration plus humaine, plus efficace pour répondre aux besoins des citoyens et soutenir le développement local. Il a également évoqué la transparence pour lutter contre les lourdeurs bureaucratiques, en préconisant l'établissement de procédures claires et transparentes, avec une responsabilisation individuelle des agents et des fonctionnaires dans le traitement des dossiers. En résumé, les orientations de Saïd Sayoud sur la bureaucratie s'inscrivent dans une volonté politique de réforme visant à instaurer une administration modernisée, plus proche du citoyen, et débarrassée des lourdeurs et du manque de transparence. Mais, le fait est là, l'administration reste incontournable et les services publics qu'elle assure, s'ils ont une raison d'être, c'est bien sûr celle consistant, majoritairement, à fournir des prestations aux citoyens. Mais lorsque celles-ci présentent des défaillances, elles deviennent, fatalement, un ensemble de désagréments et surtout d'illusions pour eux. Conséquemment, un mur d'incompréhension s'installe entre l'administration et les administrés et le fossé se creuse davantage, il en est de même de la confiance qui s'effrite. La contestation s'installe forcément ! On demande le départ des élus, on conteste les walis ! Certes il est vrai que, partout dans le monde, les relations administration-citoyens se caractérisent par des hauts et des bas, mais le plus significatif, c'est la régularité de la courbe : elle ne doit pas traduire un état de mauvaises relations. En théorie, elle est supposée être au service de l'intérêt général, soucieuse du respect du droit, n'ayant pour buts que ceux consistant à remplir convenablement les missions qu'on lui assigne, notamment les missions de service public. Dans la réalité, l'administré qui se présente à elle a l'impression d'être livré à son propre sort ou, pis encore, d'être l'intrus qui dérange les responsables«qu'ils n'ont pas que ça à faire !», c'est-à-dire se préoccuper de lui et de son devenir. Et, quand quelqu'un daigne enfin l'écouter, il doit, au mieux, administré qu'il est, improviser un bref exposé afin de justifier sa présence dans les couloirs de l'administration. Dans ce cas précis, il n'est pas à l'abri d'entendre une réponse lui signifiant «de revenir plus tard», l'heure étant, par exemple, «aux préparatifs de la saison touristique voire de telle ou telle quelconque festivité» ! En réaction, il peste contre l'Etat et forcément, se trompe de cible : en réalité, c'est à l'administration qu'il a eu affaire et d'où il est reparti bredouille ! C'est peut-être aussi de sa faute, lui qui ignore tout des procédures administratives en usage, des jours de visite, et qui, peut-être, ignore même tout de la structuration de sa propre commune. On présente, toujours, l'administration comme le bras de l'Etat, mais on ne doit pas perdre de vue que c'est un bras qui dispose, en réalité, d'une autonomie voisine de l'indépendance. L'administration, depuis 1962, continue d'apparaître comme opaque, clientéliste et inhumaine pour les administrés. Elle leur est, de leur point de vue, injuste, contrairement à ceux, une minorité,«qui ont leurs entrées», et qui, par des pratiques condamnables, faut-il le rappeler, arrivent à tous les coups à se faire entendre et à concrétiser leurs demandes, dont certaines sont à la limite de la légalité. Là, il faut le dire et le dénoncer : qu'un responsable sait qu'il peut en toute impunité défier la règle de droit pour lui supplanter ses propos critères et apporter à ses connaissances «son petit coup de pouce» est tout simplement intolérable, mais malheureusement usité dans l'administration telle qu'elle est pratiquée dans nos contrées d'ici-bas ! Et n'importe quel citoyen peut citer une foultitude d'exemples du genre pour accréditer cette affirmation et justifier son désamour de l'administration. Il va sans dire que cette façon de faire est, heureusement, circonscrite à quelques cas et qu'elle ne concerne pas toute l'administration, encore moins l'ensemble des agents qui y officient. L'Etat peut décider des projets les plus ambitieux, donner les instructions les plus louables, signer les textes les plus audacieux (code de l'investissement et ses textes subséquents) et se rendre compte que son appareil d'exécution est atteint de paralysie, de bureaucratie et ne répond pas aux objectifs assignés. Le président Abdelmadjid Tebboune avait tenu à dénoncer personnellement des pratiques bureaucratiques«antinationales» qui étaient derrière le blocage de centaines et de centaines projets pouvant être à l'origine de la création de milliers de postes d'emploi. Un véritable «crime économique», avait-il estimé à l'ouverture de la conférence nationale sur la relance industrielle ! Intervenant à l'occasion de ses entrevues périodiques avec la presse, le président Tebboune a assuré que l'Etat punira tous ceux qui favorisent la prolifération de la bureaucratie au sein de l'administration. «La bureaucratie est un ensemble de pratiques autoritaires suspectes, accumulées depuis des décennies par des individus qui se prennent pour des représentants du pouvoir. Nous les avons à l'œil», a-t-il dit. Il est revenu à la charge lors d'un Conseil des ministres pour asséner d'autres remarques tenant «d'échéances très élastiques, des chiffres approximatifs, des décisions qui perturbent le quotidien des citoyens et celui des opérateurs économiques». Que faut-il faire en pareil cas ? 1. Décider de déplacer les responsables, en nommer d'autres plus compétents, oui, peut-être ; 2. Faire tourner les agents plus ou moins confrontés à ces risques, les permuter, peut constituer une solution ; 3. Se refuser à admettre de telles situations qui concernent peut-être des cas isolés et dire que tout va bien dans le meilleur des mondes, c'est quelque part vouer à l'échec toute volonté de progresser. Et quand bien même il n'existerait que quelques cas rares, il faut se garder de les qualifier d'insignifiants ! On doit, au contraire, les considérer comme une tumeur qui risque de gangrener, à terme, tout l'appareil administratif. Concernant la numérisation, Abdelmadjid Tebboune a considéré que son absence était « un acte délibéré »susceptible de conduire à la bureaucratie et à des pratiques de corruption ; il a tenu également à rappeler que « ce processus, qui cible la conversion en masse de données et de documents administratifs en fichiers digitalisés pour permettre de garantir une information et des statistiques fiables et facilement traçables, semble ainsi faire très peur à certains intervenants qui continuent à vouloir s'adonner à des pratiques de corruption et d'accès à d'indus avantages en favorisant l'opacité et la bureaucratie ». «Cela fait quatre années que je ne cesse d'appeler à accélérer le processus de la numérisation, celle-ci devant permettre d'effecteur des évaluations précises pour établir les bons diagnostics et apporter des solutions efficaces et rapides aux problèmes posés par les citoyens», a-t-il ainsi rappelé sur un ton sévère. Avec les supports et les données digitalisées, «il ne peut y avoir de falsification et on ne peut escamoter les réalités», a-t-il ajouté, tout en déplorant qu'«à ce jour, il n'y a pas encore de numérisation, et la bureaucratie est devenue une véritable finalité pour certains, qui se cachent ainsi derrière l'opacité pour continuer à agir comme par le passé». « Parce qu'elle ne ment pas, parce qu'elle est réelle et fiable, parce qu'elle ne falsifie pas les données et parce qu'elle fournit la rapidité nécessaire pour résoudre les problèmes, la numérisation reste le moyen le plus efficace de lutte contre la bureaucratie et la corruption. »a rappelé de nouveau le Président Tebboune aux parlementaires qu'il avait conviés à l'occasion de son discours à la Nation de ce lundi. Le président Tebboune excédé par l'inertie de certains responsables, n'a eu de cesse d'appeler à mettre un terme à la bureaucratie qui a brisé le rêve des jeunes et les a empêché de concrétiser leurs projets : 1. Ils ne seront plus soumis au parcours du combattant pour la création de leurs entreprises. 2. Le système déclaratif sera désormais adopté. 3. Un fonds sera dédié au financement des start-up. Dans la foulée des mesures prises, rappelons les blocages dont souffraient les entreprises algériennes : 1. Les obstacles entravant les projets d'investissement sont liés aux actes administratifs, les autorisations d'exploitation, les livrets fonciers et permis de construire, les certificats de conformité et les réserves techniques des ministères. Dans la zone industrielle de Blida, par exemple, 100 entreprises ont été bloquées depuis quinze ans, ne pouvant pas activer en raison d'un problème de passage d'une canalisation de gaz sous terre; ces entreprises ont commencé à activer, a tenu à rappeler le chef de l'Etat lors d'un de ses discours, grâce au travail effectué par le médiateur d'alors qui s'était investi personnellementdans «ce contentieux » ! 2. Il faut ajouter les problèmes liés à la viabilisation des zones d'activités, l'accès au foncier, les routes, l'électricité, le gaz et l'eau qui poussent une partie des entrepreneurs à abandonner leurs projets malgré les financements déjà consentis et les équipements acquis. Et les résultats ne se sont pas fait attendre : Plus de 915 projets d'investissement ont vu le jour ou ont redémarré ! Plus de 75 000 postes d'emploi ont été ouverts ! De ce qui précède, on peut dire que l'heure n'est plus aux diagnostics mais à l'action. Le citoyen n'attend plus des promesses, mais une administration réconciliée avec sa mission première : servir et non entraver. Les propos du ministre de l'Intérieur, des Collectivités Locales et des Transports, Saïd Sayoud et la fermeté du président Tebboune tracent les contours d'une nouvelle ère administrative:celle d'une Algérie résolument tournée vers la modernité, où la transparence et la performance remplacent la lenteur et l'opacité. *Ancien Cadre Supérieur de l'Etat | |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||