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Google vs Microsoft

par Akram Belkaïd, Paris

Le match, ou plutôt la bagarre était inévitable. En décidant de lancer un système d’exploitation gratuit baptisé « Chrome OS » (OS signifiant Operating System), Google vient d’adresser à Microsoft une véritable déclaration de guerre. Cela n’a guère étonné les experts qui savaient depuis longtemps que la rivalité entre le géant de l’internet (Google) et le roi des systèmes d’exploitation (Microsoft) finirait tôt ou tard par déboucher sur l’une des ces batailles dont le grand public est si friand (que l’on se souvienne des tonnes d’articles écrits sur l’affrontement entre IBM et Apple).

 

Des soucis pour Microsoft

 

Résumons l’enjeu du match. D’un côté, il y a Microsoft qui, grâce à Windows, est le maître incontesté des systèmes d’exploitation pour ordinateur dont il tire plus de 50% de ses bénéfices. A cela s’ajoute aussi un quasi-monopole de fait concernant la navigation sur internet grâce au logiciel Internet Explorer (65,5% des parts de marché). De l’autre, il y a Google, géant de la recherche, de la publicité et l’on pourrait même dire aussi de l’innovation sur internet. En lançant Chrome OS, la firme de Mountain View vise clairement le marché des mini-PC, ces fameux « netbooks » qui offrent la possibilité de surfer sur le web où que l’on soit. Ces netbooks sont à l’industrie informatique ce qu’était le PC au début des années 1980, c’est-à-dire une très grosse promesse de revenus. Selon les prévisions, il s’en vendra plus de 22 millions en 2009 et au moins 30 millions en 2010. En offrant un logiciel d’exploitation libre de tout brevet et dont le code sera accessible pour tout programmateur, Google entend avoir toute ses chances pour contrôler ce marché des mini-PC.

Et c’est tout le problème pour Microsoft, dont le modèle économique, basé sur ce que rapportent les systèmes d’exploitation et ses suites bureautiques, s’effrite année après année. Pour survivre à la nouvelle mutation du monde informatique, Microsoft a donc besoin de s’imposer sur internet. C’est ce qui explique pourquoi la firme de Redmond tente de s’allier à Yahoo! ou essaie d’imposer ses propres moteurs de recherche sur le web. Des tentatives laborieuses car, pour l’heure et après quinze années d’efforts et 8 milliards de dollars dépensés, Microsoft n’a pas réussi à s’implanter sérieusement sur le marché du web. Or, voilà que ce qui était considéré comme son bastion imprenable, les systèmes d’exploitation, est attaqué par Google qui clame à qui veut l’entendre que les systèmes existants - comprendre ceux de Microsoft - ont été conçus à une époque où internet - et ses exigences de sécurité et de convivialité - n’existait pas. Le message de Google aux consommateurs est clair : « Faites le pari de la modernité ».

Jusqu’à présent, Microsoft a toujours vaincu ceux qui s’étaient attaqués à son coeur de business. Mais, dans cette affaire, l’assaillant n’est pas n’importe qui. Il s’agit de la firme emblème de ce début de 21e siècle, laquelle dispose, et c’est loin d’être négligeable, d’un trésor de guerre de 20 milliards de dollars en cash, ce qui peut lui permettre d’acquérir toutes les compétences pour mener la bataille contre son rival.


 
Un atout de taille pour Google

 

Dans le même temps, Google va suivre avec intérêt l’évolution du dossier de Microsoft auprès d’une Commission européenne toujours critique vis-à-vis de son emprise sur le système d’exploitation et le navigateur internet. Le dossier est en cours et des rebondissements ne sont pas exclus d’ici la fin de l’année.

Mais les procédures tatillonnes de Bruxelles ne sont pas le seul atout pour Google. Nombre d’experts estiment que le géant de l’internet va réussir à imposer Chrome OS par le biais de sa philosophie de « l’amélioration permanente ». Une amélioration qui, comme tous les utilisateurs de PC le savent, fait parfois défaut à l’incontournable Windows.