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«Dans l'enfer de la décennie rouge». Témoignage de Achoui Abdelouahab (Commissaire principal de police à la retraite). El Amir Edition, Marseille 2025, 256 pages, 1500 dinars. «Dieu sait que je ne dis pas tout ça par rancune, même s'il y a de quoi être rancunier. Non, c'est uniquement parce que, en vertu de mon métier, et du lieu où je l'exerçais, j'avais vu ce que vous n'aviez pas vu et entendu ce que vous n'aviez pas entendu et vécu ce que vous n'aviez pas vécu». C'est tout dit ! Pour la première fois, me semble-t-il, on a un praticien de la Sécurité publique, membre actif de la Sûreté nationale, qui nous raconte, du dedans, ce qu'il a vu, ce qu'il entendu, ce qu'il a vécu, ce qu'il a subi durant toute une décennie, temps tragique du pays durant lequel il a donné la coloration exacte... puisqu'elle a entraîné des dizaines et des dizaines de milliers de morts... ceci dit sans parler des innombrables atteintes psychologiques générées sur les rescapés, tout particulièrement les femmes et les enfants. Un enfer ! Il nous dit, aussi, avec assurément une passion compréhensible, parfois maladroite, ce qu'il a pensé et ce qu'il pense encore des acteurs de la tragédie. Tout y passe. On a donc des faits et aussi des personnes, toutes identifiables par le lecteur âgé bien que les noms exacts des «meneurs» n'aient pas été évoqués. L'Auteur : Né le 18 mai 1959 à Alger. Sous-officier contractuel au sein de l'ANP (Transmissions).Court passage aux Douanes algériennes. Carrière dans la Sûreté nationale durant plus de trente ans. Retraite en 2026 avec le grade de commissaire principal de police. Table des matières : Dédicaces/ 1.Mémoire de la Patrie/... et 21 chapitres/Références bibliographiques Extraits : «Je suis un policier et tout au long de ma vie, je continuerai à penser avec la mentalité du policier» (pp 45-46), «Cette marche (note : 10 octobre 1988) était le premier pas des autres mille et un pas que cette personne -que je me suis interdit d'en prononcer à jamais le nom- va entreprendre pour l'effusion de sang, le sang des Algériens...» (p 46), «Quand je dis la prière du vendredi, cela n'avait rien à voir avec la prière, car elle n'en portait que le nom et le lieu. Ce qui était censé être un prêche était de la propagande, rien que de la propagande pour le parti...» (p57), «La machine de propagande pour l'extrémisme religieux en Algérie a bénéficié du soutien de la propagande occidentale , et aussi, en particulier, de l'incitation et de l'obscurantisme arabes basés sur l'argent étranger, dont la force réside dans les prédicateurs (oulémas) qui parlaient au nom de partis bien connus» (p198), «Pour nous, ces élections (note : Elections présidentielles ayant vu la victoire de L. Zeroual) furent la vraie victoire sur les terroristes, la participation du peuple avec une telle intensité fut pour nous le début de la fin pour les criminels» (p235), «Lorsque le président Bouteflika est arrivé au pouvoir, le terrain était déjà prêt» (p236). Avis - Un essai ? Un témoignage ? Un pamphlet ? Un mélange un peu confus de genres tout de même assez instructif sur une période délicate. Des détails du plus folklorique au plus tragique de l'histoire de la «décennie noire» (rouge !) du pays. Une histoire décrite de l'intérieur par un homme qui a vécu directement et du dedans les événements. A lire, évidemment ! Citations : «Avec le temps, on avait le sentiment qu'on devait choisir entre la mort, la mort professionnelle et celle spirituelle. Nous avions choisi la vie, même si le prix était la mort, que nous mourrons, mais que vive la patrie» (p 50), «Pendant plus d'une décennie, l'Algérie avait été isolée et soumise à un siège terrible. Elle avait affronté, toute seule, le terrorisme et en avait payé le prix fort pour elle-même et pour les autres» (p 67), «Le brave meurt une fois et le lâche meurt cent fois» (dicton d'une Ecole de formation de l'ANP, p 233). De nos sœurs égorgées Roman de Rachid Ezziane. Editions Les presses du Chélif, Chlef 2022.153 pages, 800 dinars Ils étaient 12. Tous enseignants. Tous issus de familles modestes et/ou pauvres. Tous habitaient à Sfisef, un «village néant», un «sosie à l'insignifiance». Tous devaient se rendre chaque jour de l'année scolaire 1997, en minibus (un vieux fourgon) ou en taxi «clandestin», en aller-retour à des heures fixes, à quinze kilomètres de leur établissement scolaire situé à Aïn Adden. Parmi les douze, il y avait onze femmes : Zahia (mère de deux enfants), Hassina (affectation nouvelle avec le rêve d'aller à Alger pour devenir journaliste), Faïza (fille unique projetant d'aller en Belgique rejoindre son oncle ), Alia (fan de poésie), Nacera (qui travaille pour toute la famille, le père ayant été assassiné par les terroristes), Karima (la toute belle, habitant un appartement «plus vétuste que des habits en haillons», voulant être historienne), Assia (d'une famille aisée), Fadhila (unique fille), Rabha (au corps chétif, grande fan des équipes nationales de foot et de hand... surveillée constamment par un frère qui faisait de tout une affaire d'honneur), Samia (orpheline de père, institutrice stagiaire), Aïcha (qui venait de se marier et attendait un enfant). Toutes heureuses de se retrouver et de retrouver leurs classes et leurs élèves. Mais, le visage crispé et la peur au ventre. Car... Au maquis terroriste, il y avait une «fatwa» interdisant aux femmes d'enseigner ou d'aller à l'école. Émise par un «fou de Dieu» au surnom sanguinaire : «Dhib El-Djiâane», le loup affamé, déjà coupable, par égorgement, de mille et un meurtres, toujours d'innocents (femmes, vieillards, bergers, automobilistes, enfants...). Après une journée d'enseignement bien remplie, c'est le retour au domicile, toujours dans le même fourgon, suivi par un taxi avec quatre passagères. Sur le chemin de retour, elles seront toutes (ainsi qu'un instituteur) égorgées par la horde sauvage. Plusieurs années après, Sfisef a quelque peu pansé ses blessures... à un prix très, très fort. Puis vint Bouteflika qui, sous l'effet de discours «magiques», a imposé la «Concorde» et la «Réconciliation», comme si la «Rahma» ne suffisait pas...», avec un peuple devenu masse qui suivit les «enjeux» sans rien comprendre». On en a oublié les victimes...» L'Auteur : Né en 1955 à Zeddine (Aïn Defla). Ancien professeur de philosophie, journaliste chroniqueur. Plusieurs ouvrages à son actif (romans, essais, nouvelles). Extraits : «Cette réconciliation avait surtout profité plus aux assaillants qu'à leurs victimes. «Cette paix à sens unique» avait fait naître chez tous ceux qui ont été écorchés dans leur chair comme une deuxième mort des leurs» (p115). Avis - Emouvant. Se lit d'un trait... Citations : «Seule l'instruction libère l'esprit. Donne des ailes aux racines. Ouvre les chemins de l'avenir» (p57), «Il n'y a pas de lucidité sans liberté, et de liberté sans courage « (pp 115-116). Extraits de fiche de lecture. Pour rappel. Fiche complète déjà publiée le 14 février 2022. Voir in www.almanach-dz.com/défense: bibliotheque dalmanach-dz.com) |
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