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Faire des Jeux méditerranéens une opportunité pour renforcer l'attractivité de «Wahrân el Bahia»

par Abdelkader Khelil*

Au titre de la requalification urbaine de «Wahrân el Bahia» à partir de grands projets structurants dont certains ont été réalisés ou en voie de l'être, d'autres opérations d'envergure sont à envisager à une plus grande échelle de temps et de moyens tels: l'extension des capacités portuaires, le lancement d'une première ligne de métro, de pôles d'excellence du savoir, de la technologie et du tourisme d'affaires... Cela s'avère d'autant plus indispensable qu'il s'agit de renforcer l'attractivité de cette capitale régionale pour en assurer le marketing, en donnant une valeur ajoutée aux sites à promouvoir.

À travers les «actifs dormants» de ses friches industrielles déclassées, l'étendue des terres non agricoles de son arrière-pays et les possibilités offertes par sa partie Est dans la direction de Mostaganem et au contraire d'Alger, d'Annaba et Constantine considérées déjà comme sites bloqués, Oran a préservé toute ses chances pour une mise en mouvement qui puisse lui permettre d'assurer dans les années à venir, une émergence réussie à hauteur des défis et enjeux.

Bien heureux que cela soit ainsi, si toutefois, l'urbanisation spontanée sans âme ni référents architecturaux est mieux contrôlée, voire proscrite à jamais en tournant le dos à la démarche populiste fortement consommatrice de foncier agricole et révélatrice d'une destruction de sites et paysages. Cet objectif majeur autour duquel les collectivités locales, l'ensemble des partenaires et acteurs essentiels (architectes, urbanistes, aménagistes, paysagistes, écologistes, sociologues, économistes, artistes, spécialistes du patrimoine et autres) doivent être nécessairement impliqués disqualifie de fait, l'utilisation inappropriée du foncier intra-muros et suggère tout au contraire, sa réservation aux seuls équipements structurants de haut niveau qui le valoriseront au mieux.

C'est dire que de toute évidence, le tout social reste une option antinomique de celle recherchée, c'est-à-dire, d'une authentique qualité urbaine génératrice de pluriactivité propice au développement d'une économie urbaine créatrice de richesses et d'emplois durables directs et indirects au profit de la population résidente.

C'est pourquoi, le projet de modernisation d'Oran se doit donc d'être celui de tout un gouvernement qui doit exprimer fortement sa solidarité autour de sa réalisation, et non, un projet à responsabilité limitée relevant des seules initiatives des collectivités locales qui ne s'exprimeront qu'en fonction de leurs propres choix et sensibilités au sein d'une vision réductrice et par conséquent, peu conforme au statut d'une métropole engagée dans une concurrence à l'échelle du réseau de villes maghrébines et méditerranéennes.

Il va donc falloir se surpasser pour jouer la « symphonie territoriale » qui lui sied le mieux en termes de conception et d'ingénierie, d'où cette nécessité dans la conduite d'une politique hardie d'aménagement opérationnel du territoire, totalement inscrite dans une volonté politique clairement définie et dans un dispositif rigoureux de suivi. Si cela demeure un impératif, c'est que le pilotage à vue a fait que jusque-là, chaque responsable croyait apporter sa pierre à l'édifice alors que pour la plupart du temps, il ne faisait qu'effacer les traces et bloquer les initiatives prises par son prédécesseur.

Si cette façon de faire est malheureusement toujours en vigueur, c'est parce que les walis ne sont pas tenus d'agir selon un plan directeur d'aménagement, décliné en plusieurs plans pluriannuels approuvés par le gouvernement avec des actions et projets correctement identifiés, maturés et répartis dans l'espace et dans le temps. Et puis ! De quoi peuvent-ils être comptables, ces walis, lorsque nous savons que le développement n'est pas planifié ? Cette règle «d'un pas en avant et deux en arrière», hélas, bien ancrée dans les mentalités de nos gouvernants, est à proscrire au plus vite car elle n'est de surcroît que source de désinvestissement préjudiciable au Trésor public.

Elle trouve aussi son explication dans le fait que les projets élaborés par les services techniques sans implication de l'élite locale pourtant largement disponible pour veiller au respect des règles établies pour leur bonne exécution. Tout cela a été dit, redit et re-re-dit sans que les centres de décisions ne l'aient pris en considération, faisant comme d'habitude, la sourde oreille et pratiquant la politique de l'autruche! Mais jusqu'à quand doivent-ils continuer d'agir ainsi, dans une sorte de fuite en avant ?

Pour revenir à la préoccupation de l'heure, à savoir l'organisation des Jeux méditerranéens, je dirais que cet article est probablement le dernier que j'ai à écrire sur Oran, alors qu'il s'inscrit dans la continuité de celui paru dans «Le Quotidien d'Oran» du 10 février 2022, qui, lui-même, rappelle bien d'autres depuis 2013. Non pas que je veuille absolument jouer à la «mouche du coche», mais plutôt à m'exprimer par devoir citoyen et sans obligation de réserve, en alertant les pouvoirs publics sur certains aspects non correctement pris en charge qui risquent de nuire à l'image de notre pays qui ne saurait être davantage ternie.

L'organisation des Jeux méditerranéens autour de 3.000 athlètes auxquels s'ajoutent d'autres invités devrait amener les pouvoirs publics à être plus attentifs à tout ce qui touche à la gestion urbaine, car il n'est pas toujours évident d'éviter les faux pas lorsqu'on est confronté à des cultures parfois bien différentes de la nôtre. Pour y parvenir, deux ingrédients sont indispensables: une bonne préparation et le souci permanent d'éviter les écueils de la chose négligée...

C'est dire que la préparation de ce genre de rencontres est très importante pour l'image de notre pays qui sera mis, durant tout un mois, sous le feu de la rampe par les médias internationaux qui seront là, non seulement pour la couverture des jeux, mais aussi pour tâter le pouls d'une société qui n'a pas encore totalement pansé toutes ses plaies et blessures, du moins doivent-ils penser. Si l'on part du postulat que l'Algérie n'a pas que des amis, il faut s'attendre à ce que tous nos travers seront scannés et passés au peigne fin, le moment venu...

C'est pourquoi, la meilleure manière de parer à toute hostilité manifestée à l'égard de notre société bien souvent stéréotypée est d'offrir l'image colorée d'une Algérie unie et solidaire dans la diversité des cultures de ses nombreux terroirs riches et variés. Et rien de mieux qu'un festival national de troupes folkloriques et de fantasia pour ajouter de la joie et de l'allégresse, tout en mettant en valeur cette manifestation sportive méditerranéenne ! C'est là, chose que nous savions faire avec en souvenir, le premier Festival panafricain d'Alger avec ses concerts, ses spectacles de rues, ses expositions, ses projections, ses concours et ses conférences. Cette grande manifestation avait regroupé en 1969 déjà, des artistes et intellectuels africains, ou issus de la diaspora africaine lorsque l'Algérie était constamment courtisée. «Yahasrah ya Z'man» !

Alors, oui ! En choisissant de monter un festival, la ville d'Oran soulignera de la sorte son souhait de donner aussi à l'événement sportif qu'elle abrite, une dimension culturelle. Il y a là un souci d'image, à bien y penser ! Cet évènement majeur, qui sera largement couvert au plan médiatique, est une opportunité à saisir pour la mise en scène de la diversité culturelle pour transmettre un message fort. Celui de cette Algérie déterminée à inscrire sa marche dans le vivre-ensemble par sa volonté d'ouverture aux autres cultures et dans l'unité et la solidarité entre ses diverses régions, comme chaque fois souligné. C'est là, une manière de changer profondément, le regard dégradant que portent certains médias sur notre grandiose pays.

Mais rien ne saurait convaincre l'œil attentif et expert malgré tous les efforts fournis, si la question de la propreté de la ville n'est pas traitée comme il se doit et avec le plus grand soin. De toute évidence, la municipalité d'Oran ne semble pas être en mesure de prendre en charge cette question par ses propres moyens. Aussi, l'organisation d'une «méga touisa» totalement inscrite dans une solidarité mettant à contribution les moyens des wilayas tout au moins limitrophes et l'implication de bénévoles des associations de quartiers et autres s'avère nécessaire.

C'est là certainement, une exigence de l'heure, à considérer que rien n'est de trop, lorsqu'il s'agit de montrer la meilleure image possible d'un pays déterminé à accueillir comme il se doit ses honorables invités, particulièrement à l'occasion de manifestations internationales... Cela pourrait être aussi, un indicateur quant à notre capacité d'accueil du Championnat d'Afrique des nations, le CHAN 2023, réservé aux joueurs locaux et qui se jouera selon la FAF dans quatre stades: le 5-Juillet 1962 d'Alger, le stade olympique d'Oran, le 19-Mai 1956 d'Annaba et Hamlaoui de Constantine...

*Professeur