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![]() ![]() ![]() Les enjeux de l'accord négocié entre Ursula von der Leyen et D. Trump. : Cynisme ou pusillanimité ?
par Abdelhak Benelhadj ![]() La plupart des politiques
dans le monde, et cela depuis très longtemps, savait que l'Union Européenne est
une forme sans contenu, une baudruche sans autorité ni volonté et que tout a
été fait par les autorités de cette fiction géopolitique pour convaincre leurs
citoyens qu'il s'agit d'un pôle majeur dans l'échiquier géostratégique mondial
à soutenir.
Toutes les décisions prises à Bruxelles dérivent d'un rapport de forces occultes entre des intérêts nationaux et des intérêts transnationaux qui n'ont qu'un lointain rapport avec la démocratie et les délibérations des assemblées représentatives formellement élues par les peuples souverains. Ce mot peut paraître excessivement rigoureux, mais au fond il correspond à l'état réel d'une Union qui n'a que peu à voir avec ses textes et ses mythes fondateurs. A l'évidence, les Européens n'ont pas cessé d'être payés de mots et bercés d'illusions. La Commission, impliquée consentante dans des projets qui dépassent les questions commerciales bilatérales, vient d'en faire une magistrale démonstration. Qu'on en juge. Début avril, une tempête souffle sur le monde. D. Trump rend publique la liste de tous les pays qui commercent avec le sien, indexés sur un tarif douanier personnalisé délirant. Le procédé est éprouvé : annoncer le pire pour négocier et obtenir le meilleur. Avant les Européens, au 23 juillet, Washington a conclu cinq accords : Japon : 15% Philippines : 19% Indonésie : 19% Vietnam : 20% Royaume-Uni : 10% D. Trump a soumis les importations venues d'Europe au maelström en partant du taux initial pratiqué : - Avant D. Trump : 4.8% - 02 avril 2025 : 20% - 12 juillet 2025 : 30% - 24 juillet 2025 : 15% (taux final imposé à l'UE le 27 juillet) Dimanche 27 juillet 2025 Le président américain Donald Trump et la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen sont convenus à Turnberry en Ecosse d'un accord douanier prévoyant que les produits européens exportés aux Etats-Unis seront taxés à 15%. Une victoire incontestable des Etats-Unis et de son président. Détails de l'accord qui ne sont pas encore tous dévoilés. Il faudra sans doute attendre avant de se faire une idée définitive du contenu précis de l'accord. - Le taux effectif appliqué par les Etats-Unis aux marchandises européennes se montait déjà à près de 15%, si l'on additionne la surtaxe de 10% d'ores et déjà décidée par le gouvernement américain auquel s'ajoute le taux antérieur de 4,8% appliquée avant la hausse. - L'automobile taxée à 27.5% jusque-là ne le serait plus qu'à 15%. - L'Union Européenne s'engage à acheter pour 750 Md$ d'énergie (sur 3 ans) et à investir 600 Md$ supplémentaires aux Etats-Unis. L'énergie, c'est du gaz et du pétrole de schiste que l'Europe n'achètera pas à la Russie, ce qui continue la politique entamée et accélérée depuis 2022. Une énergie carbonée contraire aux pétitions environnementales de l'Europe. - A cela, s'ajoute un autre engagement européen, l'accroissement d'achat d'armes américaines. - Les négociations commerciales sont du ressort de la Commission, mais pour être définitivement validé, l'accord devra l'être par chaque pays de l'Union. On peut d'ores et déjà observer : 1.- Une des faiblesses majeures de l'Europe et de tous les autres secteurs de son économie se situe dans le domaine des services numériques. En contrepartie de cette hausse de taux, l'Europe a-t-elle négocié et imposé quelques compensations ? Pour autant qu'on le sache, aucune concession n'a été ni demandée par Bruxelles, ni consentie par Washington. 2.- Ceux qui appellent à une confrontation avec les Etats-Unis (à supposer qu'ils y soient sérieusement disposés) sont minoritaires et auront peu de chances d'obtenir la moindre concession. L'Allemagne, le premier pays excédentaire dans son commerce avec les Etats-Unis, semble satisfaite. L'automobile allemande, le poids lourd de son industrie, y trouve son compte : car taxée à 27.5%, son taux est réduit à 15. 3.- Comme on le voit, au moment même où l'Europe appelle à plus d'union, son principal handicap est sa désunion : les Européens n'ont ni tous les mêmes intérêts, ni les mêmes objectifs, ni les mêmes moyens, ni la même stratégie. Ce dont D. Trump, comme tous les Américains, avait parfaitement connaissance. En outre, il peut compter sur tous les pions dont l'Amérique a favorisé l'ascension depuis 1945 (et même bien avant) aux plus hautes fonctions décisionnaires dans toutes les capitales et à Bruxelles. Les réactions en témoignent. - « Nous avons trouvé un accord », clame D. Trump, le qualifiant de « plus grand » jamais conclu en matière de commerce, et en y voyant une promesse « d'unité et d'amitié ». U. v. der Leyen salue un « bon accord », qui apportera de la « stabilité. » - Friedrich Merz, le chancelier allemand : cela permet d'« éviter une escalade inutile dans les relations commerciales transatlantiques ». Giorgia Meloni, la Première ministre italienne « Je considère positif qu'il y ait un accord », elle attend cependant de voir les détails pour se prononcer vraiment. 750 Md$ pour l'énergie (sur 3 ans), 600 Md$ pour des investissements aux Etats-Unis et des centaines de milliards d'achats d'armes américaines (le programme de réarmement européen dépasse les 1 000 Md, avec près des deux-tiers seront des commandes adressées aux industriels américains), tout cela représente un handicap sérieux dans la confrontation de l'Europe face à la Russie. Il tombe sous le sens que ces chiffres relèvent de la communication destinée aux opinions publiques et qu'il est très difficile d'en mesurer l'impact réel. Par ailleurs, les industriels se méfient à raison de ces effets d'annonce et veulent des engagements formels leur permettant de se projeter sur plusieurs années afin de lancer leurs chaînes de production complexes et leurs chaînes logistiques coûteuses en technologies, en compétences et en finances. Pour bien comprendre la portée de ces décisions, il faut savoir que ce ne sont pas les Etats qui achètent ou qui vendent, mais des intérêts très majoritairement privés qui commercent selon les opportunités offertes par les marchés (plus ou moins concurrentiels et transparents). Les autorités publiques (aujourd'hui, majoritairement d'obédience libérale) négocient pour eux, sous la pression de lobbys plus ou moins occultes. Les gouvernements sont, comme le Rassemblement national en France, soutenus par des milliardaires, très populaires dans le discours, d'un côté, mais très dévoués aux intérêts du capital dans l'action et la décision, de l'autre. Ce grand écart est quelques fois difficile à gérer. C'est pourquoi la maîtrise des réseaux d'information est absolument nécessaire pour éviter que les contradictions inévitables, constitutives de l'attelage ne soient mises au grand jour et portées à la connaissance du « public » et des électeurs, surtout de condition modeste.1 Le poids de la France Le Premier ministre français, plus commentateur qu'acteur, c'est l'usage à la tête de l'exécutif français depuis longtemps, se lamente « C'est un jour sombre que celui où une alliance de peuples libres, rassemblés pour affirmer leurs valeurs et défendre leurs intérêts, se résout à la soumission. » F. Bayrou, sur X, lundi, 28 juillet 2025. Ses ministres ne semblent pas aussi pessimistes. Sans doute après une coordination en urgence de la communication orchestrée à partir de l'Elysée, Laurent Saint-Martin, ministre délégué au Commerce extérieur, : « Grâce à cet accord, on apporte de la stabilité pour nos entreprises » (sur France Inter, mardi 29 juillet 2025) Même son de cloche acrobatique chez Benjamin Haddad, le ministre délégué aux Affaires européennes, un spécialiste : « L'accord commercial négocié par la Commission européenne avec les États-Unis apportera une stabilité temporaire aux acteurs économiques », écrit-il sur le réseau social X. Comme s'il n'avait pas lu l'accord en détail, il s'est félicité que l'accord exempte « des secteurs-clés pour l'économie française (aéronautique, spiritueux, médicaments) », exclut « toute concession pour (les) filières agricoles sensibles » et « préserve (la) réglementation européenne sur des sujets comme le numérique ou le sanitaire ». (Le Figaro, mardi 29 juillet). Le président se tait mais son ministre de l'Economie capitule pour lui. « C'est un mauvais accord mais la moins mauvaise des solutions » déclare Eric Lombard dans Libération, mardi 29 juillet 2025. Il y a à peine un mois, le J. 26 juin 2025, Emmanuel Macron, Président de la République française, lançait à partir de Bruxelles : « Si à la fin le choix des Américains était de garder 10% de tarif sur notre économie, il y aura immanquablement une compensation sur les biens et produits qui sont vendus par les Américains sur le marché européen de ce tarif. Et donc le prélèvement qui est fait sur nos industriels donnera lieu sur un même prélèvement sur leurs industriels, parce que sinon nous serions naïfs ou fables ou les deux à la fois. » 1.- Les Américains ont gardé leur taxe à 10% 2.- Il n'y a pas eu compensation de la part des Européens 3.- La seule question qui reste est alors de savoir si E. Macron est « naïf, faible ou les deux à la fois » Les Français découvrent sidérés que « l'Europe » s'est engagée en leur nom dans le silence assourdissant de leurs dirigeants. Ce n'est pas nouveau. Il en fut ainsi du Traité de Lisbonne (2009) qui enjamba le référendum rejetant le projet de Constitution pour l'Europe le 29 mai 2005 par la France (à 54,68%) et par les Pays-Bas (à 61.54%). La négociation du traité avec le Mercosur s'est faite sans la France et contre la France.2 Il en est de même de l'accord qui vient d'être signé entre la Présidente de la Commission et le Président des Etats-Unis. Sans rappeler les multiples occasions où le président américain a humilié son homologue français, voilà un exemple récent de ce que pense D. Trump de l'annonce par E. Macron d'un Etat palestinien le jeudi 24 juillet : « Ce qu'il dit importe peu. C'est quelqu'un de très bien, je l'apprécie, mais cette déclaration n'a pas beaucoup de poids ». « Cela ne changera rien », a affirmé D. Trump à la presse à la Maison-Blanche peu avant son départ pour l'Écosse. (AFP, V. 25 juillet 2025). Les enjeux La subordination européenne continue et s'approfondit Il y a une raison pour laquelle le président français se tait et pour laquelle la « classe politique française et européenne fait mine de s'offusquer sans qu'aucun de ces politiques ne lève le petit doigt pour changer quoi que ce soit aux décisions validées par la Présidente de la Commission que tous ces indignés professionnels connaissaient à l'avance. Tout ce beau monde savait depuis le début ce qu'il en serait des rapports commerciaux atlantiques avant même que ne débutent des tractations réglées d'avance par des équipes américano-bruxelloises en contact depuis des mois. Nous assistons à la réalisation, à bas bruit, d'un projet fédéraliste caché qui compenserait par un abandon de souveraineté « local » par un supplément de puissance « globale », face aux grandes nations en expansion mondiale. Jacques Delors et Giscard d'Estaing3 en ont été les promoteurs en France, dont les premiers jalons remontent à la fin de la guerre et aux idées d'un Jean Monnet, le projet Verhofstadt : une Union inventée pour dessaisir les nations de leurs prérogatives et de leur autonomie de décision à l'insu des citoyens ainsi privés de toute liberté d'information et d'appréciation.4 V. Zelensky a compris depuis longtemps que ce sont les Américains qui ordonnent et fixent les prix et les Européens qui règlent la facture. En bon comédien, il tient le langage qui convient à chacun d'eux, évitant de se fâcher avec les maîtres, avec leurs vassaux et avec sa propre opinion publique qui menace sa place à la tête de l'Ukraine. Mais quand il le faut, il sait appeler un chat un chat : « Des voix s'élèvent pour dire que l'Europe pourrait offrir des garanties de sécurité sans les Américains et je dis toujours non ». « Les garanties de sécurité sans l'Amérique ne sont pas de vraies garanties de sécurité. » (AFP, mardi 11 février 2025) L'Amérique recycle l'épargne mondiale à son profit : Al Capone est battu à plate couture Un vrai parasite qui vit aux dépens de leurs « alliés » et de leurs partenaires : déficit de la balance commerciale (-1 202.7 Md$), déficit de la balance des paiements, endettement astronomique dans sa propre monnaie dont elle détermine unilatéralement (comme le reste) la production et la valeur. (Voir version PDF) Déficitaires avec l'Europe (-235 Md$), les Etats-Unis sont aussi déficitaires avec leurs voisins canadiens (-63 Md$), avec le Mexique (-172 Md$), avec le Japon (-68.5 Md$) et avec la Chine (-295 Md$). La dette américaine s'élève en juillet 2025 à plus de 36 210 milliards de dollars, selon le Trésor américain, soit +120% du produit intérieur brut du pays. Un tiers de la dette publique est entre les mains de pays étrangers, en majorité le Japon, le Royaume-Uni et la Chine. Le remboursement des intérêts devrait atteindre 952 Md$ de dollars, soit plus que le budget militaire (850Md$) de la plus puissante armée au monde. Ce constat d'apparence préoccupant n'a pourtant pas empêché le pays de fonctionner jusqu'ici avec une certaine nonchalance budgétaire (Voir version PDF) Le 22 juillet, Américains et Japonais ont conclu un accord. Les taxes supplémentaires infligées aux produits japonais aux Etats-Unis seront de 15%, en nette diminution par rapport aux 25% que l'administration Trump menaçait de leur imposer.6 En contrepartie, le Japon devra investir 550 Md$ (471 Md) aux Etats-Unis, selon des modalités à préciser. Ajoutés aux achats d'énergie et aux investissements européens, sous réserve qu'il en soit ainsi, D. Trump aura fait de l'Amérique la plus grande pompe virtuelle à épargne de l'histoire récente du pays. Ses marchés financiers battent record sur record. Le complexe militaro-industriel aux manettes La crise ukrainienne a servi de catalyseur et de prétexte pour faire avancer ce projet dissimulé derrière un nécessaire approfondissement européen et urgemment bousculé par des impératifs de sécurité d'une Europe menacée par l'insatiable voracité russe. Le 11 juillet l'ancien chef d'état-major français, lors d'une conférence de presse, rompt une vieille tradition de silence des armées et prend une parole qui relaie presque mot pour mot les prescriptions atlantistes. Il a insisté sur deux points majeurs : 1.- Le général Burkhard est direct : « La Russie a désigné la France comme son premier adversaire en Europe ». La Russie aurait donc déclaré la guerre à la France. Ce qui l'autorise à considérer son pays en état de légitime défense. Des faits ? De vagues déclarations et attaques cyber attribuées à Moscou. 2.- En foi de quoi, il réclame à l'Etat un investissement dans la défense à la hauteur des menaces. Le 13 juillet, à la veille de la célébration du 14, le Président E. Macron, confondant le continent européen, l'OTAN et l'Union Européenne, déclare l'Europe « mise en danger au moment où la guerre a été portée sur notre sol avec l'invasion de l'Ukraine ». Il confirme l'analyse de son chef d'état-major et rend publique une liste de décisions qui devront être discutées à l'Assemblée. Alors que son pays est hors d'état d'équilibrer son budget, que son endettement est largement hors normes, il décrète une dépense supplémentaire (sans recours aux créanciers) aux 40 Md qui ne sont pas encore financés en ajoutant des dépenses de 3,5 Md en 2026 puis à nouveau 3 Md de plus en 2027, de sorte que le budget de la défense aura quasiment doublé en dix ans sous ses deux mandats. Des décisions surréalistes, à moins que le Premier ministre n'ait par avance réussi à priver son opposition d'une majorité à même de voter une censure imposée par l'usage de l'article 49.3 que lui permet la Constitution. Fiction d'agresseur, dépenses plus que déraisonnables. Le propos lucide et distancié de Peer de Jong rapporté ci-dessous en mesure La plupart des observateurs qui suivent attentivement la crise ukrainienne s'en sont très vite rendus compte. Mais il est toujours divertissant d'entendre un « expert » militaire le reconnaître volontiers sur un plateau de télévision et contredire ce qu'ordinairement les généraux et les « Grands reporters » qui défilent affirment avec conviction et unanimité. Peer de Jong (ex-colonel des troupes de marines, spécialiste en géopolitique), vend la mèche - Question d'un journaliste de LCI, lundi 28 juillet 2025 : « Donald Tusk, le Premier ministre polonais, disait hier qu'il pouvait y avoir une attaque russe en 2027 » - Peer de Jong : « Il y a un discours récurrent au sein des pays de l'OTAN et au sein de l'Europe [soutenant cette idée]. Pourquoi ? Parce qu'à partir du moment où D. Trump vous a obligé à monter vos budgets de la défense de 5%, il faut justifier par rapport aux opinions publiques à quoi ça sert. Pour que ça fonctionne, il faut créer un ennemi de taille suffisante et suffisamment menaçant pour qu'on y croit. L'ennemi russe est l'ennemi idéal : il est violent, il est agressif, il a démontré qu'il était capable de faire la guerre, de perdre un million de morts et de blessés C'est un peu le Grand Satan, le Grand méchant loup. Il est crédible dans sa vocation agressive. » Cet ancien militaire reconnaît là de manière claire que les opinions publiques occidentales sont victimes d'une désinformation intense destinée à les faire consentir à des dépenses militaires importantes pour le profit des transnationales de l'armement. Un vieux procédé usé jusqu'à la corde qui consiste à terroriser sa victime pour lui imposer la protection d'une mafia. Tout cela n'a rien à voir avec la défense de leur liberté, et encore moins de leur liberté d'expression. C'est d'autant plus cynique que : 1.- Ces hausses de dépenses se produisent dans un contexte budgétaire très contraint, notamment pour certains pays européens, la France par exemple, 2.- Qu'il va accroître leur endettement et soumettre leur souveraineté aux marchés financiers menacés par des agences de notation dont les évaluations déterminent le niveau des taux d'intérêts et donc leur équilibre financier, 3.- Que si le financement se fait sans endettement (comme l'a déclaré le président français le 13 juillet), ce sera au prix d'une grave dégradation des conditions sociales déjà précaires dans la plupart d'entre eux, réduisant les dépenses pour l'éducation, le logement, la santé, les retraites , 4.- Ces dépenses supplémentaires s'ajoutent à une politique fiscale très inégalitaire à l'avantage de minorités fortunées qui échappent à la répartition équitable des contributions, 5.- L'accord qui vient d'être signé entre Européens et Américains en Ecosse hier dimanche 27 juillet stipule explicitement une hausse des commandes d'armement adressées au complexe militaro-industriel américain. Nuances et contradictions Il n'y a aucune contradiction entre les objectifs de l'administration Trump et les objectifs de celle qui l'a précédée. Au mieux, une différence de style exagérée par les médias pour égarer et brouiller la lecture des événements. La défaite de la Russie demeure un objectif prioritaire aussi bien pour l'un que pour l'autre. Ainsi en est-il de la chute du dollar et du prix du pétrole qui se cumulent l'une l'autre visant (entre autres) la chute des revenus extérieurs de la Russie pour la saigner à blanc, « jusqu'au dernier Européen » s'il le fallait. Les stratèges en chambre rappellent le même traitement que R. Reagan infligé à l'Union soviétique, avec en lieu et place de la « guerre des étoiles » un conflit ruineux et mortifère en Ukraine. Comme si le Kremlin, filant tête baissée vers le piège, n'en gardait aucun souvenir Mais s'il n'y a pas de contradiction entre J. Biden et D. Trump, il y en a une entre les objectifs et leurs conséquences Livraisons américaines de GNL 1/3) et de Pétrole (2/3) représentent 20% des achats européens. Actuellement, les achats des Européens se montent à environ 65 Md$. S'ils devaient les accroître à la hauteur de 250 Md$ par an, cela signifie qu'il faudrait les multiplier par 4. Cela signifie aussi une rupture de leurs engagements envers d'autres fournisseurs. Ce n'est possible ni pour les Américains qui ne seraient pas capables de les produire et de les livrer, ni pour les Européens de les absorber. On oublie trop souvent que ce ne sont pas les Etats mais les opérateurs privés qui importent et qui arbitrent selon leurs intérêts. Or le prix du pétrole est trop bas et le slogan « drill, baby drill » se révèle un attrape-nigaud pour les producteurs américains incapables de couvrir leurs coûts de production nettement plus élevés qu'ailleurs. La catastrophe écologique en pertes et profits. La COP21 dont Fabius et Hollande avaient glorifié les résolutions est oubliée depuis longtemps. La France est devenue la première porte d'entrée européenne des gaz et pétrole de schiste américains. Non seulement cela va se continuer, mais cela va s'accroître. Ne restent alors que les 15%. Et là n'est pas l'essentiel. Kant vs Hobbes Une guerre globale est déclarée avec pour enjeux la répartition des richesses produites et la préservation des supports essentiels à la vie du Terre. Les pays occidentaux ne veulent à aucun prix consentir à un plus équitable partage des contraintes et des bienfaits. Le conflit actuel se déroule sur plusieurs théâtres d'opération. La crise ukrainienne et les négociations commerciales que les Etats-Unis ont décidé d'imposer à l'échelle planétaire n'en sont que des facettes. Sur ce point deux observations provisoires 1.- L'Europe confirme son effacement historique et sa « soumission » à la « nation indispensable » (Madeleine Albright, 19987) où se définissent les fins et les moyens. Ce n'est pas par faiblesse, mais par choix délibéré, révélé à demi-mots aux citoyens européens. Pourquoi alors s'étonner que la langue de l'Europe soit devenue l'anglais ou sa variante américaine alors qu'elle n'est la langue nationale d'aucun pays de l'Union, après le Brexit ? 2.- Il n'y a plus d'arbitrage ni d'institutions internationales capables de qualifier les faits, de formaliser les différends et de rendre justice. Entre l'Europe d'Emmanuel Kant et celle de Thomas Hobbes, ce n'est pas celle de Kant qui semble l'avoir emporté. «L'homme obtus manque d'esprit, le sot d'entendement.» E. Kant (1724-1804) Notes : 1- C'est la raison pour laquelle l'accord euro-américain disparaît peu à peu des « une » des médias, submergé par les nouvelles estivales : météo caniculaire au sud et goutte froide au nord de l'Europe, incendies, inondations, tremblements de terre, épidémies animales Ghaza les catastrophiques habituelles qui servent à divertir les citoyens, surtout ceux qui n'ont pas les moyens de prendre des vacances. 2- Le Traité a été le 6 décembre 2024 à Montevideo (Uruguay) par Mme Ursula von der Leyen au nom de la Commission européenne et les présidents des membres du Mercosur, sauf la Bolivie. Plusieurs pays, comme l'Allemagne, l'Espagne et le Portugal poussent la Commission européenne à finaliser l'accord, il en est de même pour plusieurs fédérations patronales dans différents pays de l'union européenne. 3- « Traité instituant une Constitution pour l'Europe », Thessalonique, 20 juin 2003, 165 p. Lire. Abdelhak Benelhadj : « Vers une Europe Fédérale, hamiltonienne ou une Europe Allemande ? ». (Le Quotidien d'Oran, 09 décembre 2021) 4- Rapport Guy Verhofstadt, adopté mercredi 22 novembre 2023 à Strasbourg par le Parlement européen, est un véritable coup d'Etat institutionnel. https://www.europarl.europa.eu/doceo/document/A-9-2023-0337_FR.html#_section1. 5- Les Etats-Unis représentent un tiers (32.7%) des exportations de l'Irlande. C'est dire les liens très forts (de dépendance) qui existent avec Dublin utilisé par les transnationales américaines comme porte d'entrée majeure dans l'Union. L'Irlande est aussi la capitale de la compétition sociale et fiscale qui détruit l'Union de l'intérieur. 6- Les surtaxes de 25% frappant les voitures, qui étaient déjà en vigueur, seront aussi abaissées à 15%. Le secteur de l'automobile représente 8% des emplois au Japon, et représentait l'an dernier près de 30% des exportations du Japon vers les États-Unis. (lapresse.ca, mercredi 23 juillet 2025) 7- « Si nous devons utiliser la force, c'est parce que nous sommes l'Amérique ; nous sommes la nation indispensable. Nous sommes debout et nous voyons plus loin dans l'avenir que les autres pays, et nous voyons le danger pour nous tous » Expression dans laquelle se sont reconnus de nombreux américains après, B. Obama et J. Biden entre autres. |
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