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Comment éviter le chaos ?

par Abdelkrim Zerzouri

Le Premier ministre libyen, Abdelhamid Dbeibah, est-il un homme seul, isolé, face à ses adversaires politiques ? Élu en février 2021 par les participants au dialogue interlibyen, réunis sous les auspices de l'ONU en Suisse, au poste de Premier ministre intérimaire, avec pour objectif de « réunifier les institutions de l'État et assurer la sécurité » jusqu'aux élections présidentielles et législatives, qui devaient se tenir le 24 décembre dernier, et qui ont été reportées sine die, M. Dbeibah a été écarté suite à l'élection par le Parlement, jeudi dernier, d'un nouveau Premier ministre, Fathi Bachagha. Ce dernier, ancien ministre de l'Intérieur du gouvernement d'Union nationale (d'octobre 2018 à mars 2021), revient en force, avec le soutien notamment de Khalifa Haftar qui a salué son élection à ce poste, mais pas celui de l'ONU et des pays occidentaux, qui ont fait savoir, de leur côté, qu'ils considéraient que le mandat du gouvernement d'intérim restait valide, et ils ont invité le Parlement à se concentrer sur la recherche d'un accord politique pour permettre la tenue des élections. Après avoir perdu le vote en février 2021 face au Premier ministre évincé par le vote du Parlement, M. Bachagha avait, ce jour-là, salué la victoire de M. Dbeibah, estimant que « la démocratie s'était clairement concrétisée ». Une année plus tard, il revient aux premiers plans, sans changer de principe dans le discours, soulignant à son arrivée à Tripoli, hier vendredi, qu'il tient à «remercier le gouvernement d'Union dirigé par Abdelhamid Dbeibah, qui a assumé les responsabilités dans une phase difficile. C'est la démocratie qui assure une transition pacifique du pouvoir ». Mais la position de M. Dbeibah ne verse pas dans le même sens, car il refuse de quitter son poste, assurant qu'il ne céderait le pouvoir qu'à un gouvernement sorti des urnes. Cela présage-t-il d'un retour au langage des armes ? La situation en Libye est jugée « très préoccupante », il s'agit de tenter de désamorcer pacifiquement la crise politique. Dans ce sens, les pays voisins, l'ONU et la communauté internationale doivent joindre leurs efforts pour faire qu'une nouvelle transition, qui semble imparable, soit acceptée par tous.

Car, au fond, toutes ces parties endossent une part de responsabilité concernant les élections qui étaient prévues le 24 décembre dernier. Aucune d'entre elles n'a pu l'imposer ou la concrétiser sur le terrain. C'était la feuille de route tracée par les membres du dialogue interlibyen quand ils ont élu M. Dbeibah au poste de Premier ministre intérimaire, en février 2021, avec un appui clair à cette option de la part de l'ONU, des pays occidentaux et de la communauté internationale en général. A quoi fallait-il s'attendre, après l'échec de l'organisation des élections le 24 décembre, dans un contexte libyen qui se caractérise, depuis la signature d'un accord de cessez-le-feu le 23 octobre 2020, par une stabilité très fragile ?