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Littérature et cinémas arabes au centre des débats à Oran

par Mohamed Bensalah

A l'occasion du Festival d'Oran du film arabe (sur lequel nous reviendrons plus amplement), il nous faut tout d'abord vite signaler la présentation d'un ouvrage en avant-première dans le cadre de cette 9e édition. La conférence de présentation du livre qui aura lieu le lundi 25 juillet 2016 à 10h à l'Hôtel Royal en présence de quelques contributeurs comme Michel Serceau (France), Selma Moubarek (Egypte), Moulay-Driss Jaïdi (Maroc), Najeh Hassen (Jordanie) Mohamed Allal (Algérie) et Ahmed Bedjaoui (Algérie), sera suivi d'une séance de dédicace/vente.

Consacrer la présentation d'un ouvrage sur les rapports cinéma/littérature dans un cadre ou prédomine l'activité d'animation, le spectacle et le défilement d'auteurs et d'artistes constitue une première. C'est un bonus à accorder aux organisateurs du FOFA qui aspirent à consolider l'édifice d'une manifestation pérenne qui fait l'honneur du pays. Susciter le débat sur une telle problématique ne peut que contribuer à faire avancer la réflexion sur la pertinence de l'image et son rapport à l'écrit, dans un contexte de violence et de passivité où l'omniprésence des cultures étrangères est dévastatrice. A ce propos, un colloque « l'Autre dans le cinéma » qui vient en appoint est aussi d'une pertinence inouïe. Mobilisant les regards d'experts en la matière, il se propose, en abordant la réalité actuelle, d'interpeller les chercheurs-universitaires, les journalistes, les écrivains, les étudiants et les artistes du monde du cinéma.

Littérature et cinéma, deux modes d'expression qui développent des activités d'écriture et de lecture tout en figurant en bonne place dans la nomenklatura des arts. Les auteurs, à travers leur réflexion, ont tenté d'étudier ces deux domaines, à parler de leurs points convergents, puisque tous les deux offrent un espace d'écriture et de lecture, mais aussi de leurs spécificités, vu la nature de leurs moyens d'expression : le texte pour l'écrit, l'image pour l'autre. Nous avons posé une première question aux professeurs Ahmed Bedjaoui et Michel Serceau qui ont codirigé le livre. Nous reviendrons sur cet entretien au terme de la présentation collective de l'ouvrage en question.

Le Quotidien d'Oran : la littérature et le cinéma relèvent d'une écriture spécifique et produisent un langage, littéraire pour l'un, filmique pour l'autre. Quel objectif s'assigne cet ouvrage collectif sur un thème éminemment important et pourtant négligé par les artistes arabes entre autres. Quelle approche avez-vous privilégiée ?

Ahmed Bedjaoui et Michel Serceau : l'objectif de cet ouvrage est de contribuer à combler un manque en demandant à des critiques et spécialistes d'apporter les compléments d'information nécessaires à une meilleure connaissance des relations entre la littérature et les cinémas arabes. Nous aurions pu faire une série de monographies sur les grands cinéastes arabes (Chahine n'est pas le seul !), dont le propre est de transcender l'actualité. Mais à cette approche encore trop cinéphilique nous en avons préféré une autre qui témoigne autant, sinon plus, de la relation qu'entretiennent les cinémas arabes -comme d'autres- avec la culture. Il s'agit d'évaluer la place qu'occupe la littérature, la part des sources littéraires dans la production des films, qu'ils soient d'auteur ou pas.

Les relations difficiles qu'ont longtemps entretenues les deux formes d'expression ont engendré nombre de préjugés : l'adaptation ne peut être que trahison, le cinéma ne peut rivaliser avec la littérature que s'il se hausse au-dessus du récit?, on n'attend pas cette entrée. Elle est pourtant essentielle, pour ne pas dire cruciale : comment ont pu se concilier, voire se marier, l''écrit et l'image dans des sociétés où l'oralité l'a depuis longtemps emporté sur le récit littéraire ?

Q.O.: Comment avez-vous pu un tel panel d'auteurs et comment avez-vous travaillé ?

Codirigé par nous, ce livre (tout juste sorti des presses de Chihab) est préfacé par l'écrivain, scénariste et ministre de la Culture, monsieur Azzedine Mihoubi.

C'est le fruit d'un travail collectif auquel ont participé plusieurs chercheurs universitaires ou journalistes du monde arabe, dont Selma Moubarek de l'Université du Caire, Lama Tayara (Damas), Najeh hassan (Jordanie), Moulay-Driss Jaïdi de l'Université de Casablanca, Abdelkrim Gabous de l'Université de Jendouba (Tunisie), Mohamed Allel, journaliste (Algérie). En tant que codirecteurs de l'ouvrage nous avons rédigé pour notre part plusieurs chapitres. Citons le travail de Michel, relatif à l'adaptation des œuvres occidentales dans les cinémas arabes ou encore les films tirés des contes et légendes. J'ai pour ma part abordé le long historique de toutes les œuvres littéraires que l'Algérie a inspiré au cinéma. J'ai aussi consacré un chapitre à Assia Djebar cinéaste et un autre à Mouloud Mammeri et le cinéma amazigh, partie prenante de la culture arabo-berbère.