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Sommet européen - Après le Brexit : que faire ?

par Bruxelles : M'hammedi Bouzina Med

Les 27 chefs d'Etat et de gouvernement se retrouvent aujourd'hui, à Bruxelles, pour mettre au pied du mur le Royaume-Uni, dans sa demande de divorce. Sauf que le péril n'est pas que dans la demeure anglaise.

Cinq jours après le référendum sur le «Brexit», les chefs d'Etat et de gouvernements de l'UE se retrouvent, ce mercredi, à Bruxelles, sans le Premier ministre britannique invité, on ne sait pourquoi, au dîner, mardi soir, pour s'entendre sur le mode opératoire de sortie du Royaume-Uni de l'Union. Et ce ne sera pas une formalité, loin s'en faut, tant les dirigeants européens sont, encore, sous le choc du vote britannique, de jeudi dernier, désemparés malgré les déclarations, en apparence sereines et surtout terriblement divisées, sur la méthode et le calendrier de consommation définitive du divorce avec les Britanniques. Ce ne serait pas la première fois que les Européens soient divisés sur une stratégie qui engage l'ensemble des pays de l'Union, sauf qu'il s'agit, cette fois-ci, de sa survie, en tant que première puissance économique mondiale et projet politique exemplaire, pour le reste du monde. Jusqu'à hier, rien n'indiquait une «riposte» commune au défit britannique de jeudi. L'Allemagne et la France qui se sont réunies en Sommet (chefs d'Etat), le lendemain même du référendum, rejoints deux jours plus tard par l'Italie ont montré, déjà, une autre ligne de fracture politique au sein de l'Union comme si l'avis des autres pays membres de la famille européenne est subsidiaire ou non directement concernés par cette crise.

Autrement dit, la négociation des conditions et d'un calendrier de sortie du Royaume-Uni de l'UE relèvent-ils de la seule volonté de l'axe Paris-Berlin ou des six pays fondateurs de l'UE ? Un argument de plus pour les «frondeurs» de l'UE comme la Pologne, le Danemark, la Tchéquie chez qui domine un euroscepticisme dû à un sentiment de marginalisation politique, sur les grandes questions, engageant l'avenir de l'Europe unie. Cette conception d'une Europe à plusieurs «centres concentriques» de décision, selon le poids économique des uns et des autres ou de la «légitimité historique» des six pays fondateurs a, souvent, provoqué des ressentis discriminatoires chez les autres, en particulier, dans les pays de l'Est européen qui ont changé d'orbite passant de pays satellites de l'ex URSS à celui du noyau historique de l'UE. Du coup, le «Brexit» ne menace pas d'implosion politique (voire géographique) sur le moyen, terme le seul Royaume-Uni. Le spectre d'une désintégration politique de l'UE menace, également, le reste de l'UE. Ce qui explique l'acharnement des dirigeants européens et britanniques à rappeler que la procédure de sortie de l'UE dépend du jour où la Grande-Bretagne actionnera le fameux article 50 du traité européen et prendra du temps, 2 ans au moins, avant d'être effective. Et après, quel sera le type de relations UE-Royaume-Uni? Un Etat tiers comme le reste des pays non-membre de l'UE, comme le déclare le président de la Commission européenne ? Un Etat privilégié avec un accord douanier comme avec la Turquie? Un Etat associé comme la Suisse? Le type de partenariat UE-Royaume-Uni dépendra d'abord, du coût du divorce pour les deux parties. Vite dit alors que l'évolution de la situation au Royaume-Uni où le désir et volonté d'indépendance de l'Ecosse reviennent au grand jour et celui de l'union des deux Irlande et leur sortie de la bannière anglaise, plus que jamais d'actualité.

C'est dire que le Royaume-Uni n'a pas prévu de plan de sortie de l'UE et surtout les conséquences, sur sa propre unité ou Union. Et c'est pareil pour le reste des pays européen: ils n'ont, jamais, prévu la sortie d'un des leurs et les mécanismes qui accompagnent la rupture. Plongée dans cette crise politique, d'une extrême gravité, l'UE devra anticiper une autre menace supplémentaire: une UE à la carte. Le «Brexit» servira bien des pays qui n'hésiteront pas à revendiquer des «spécificités», des dérogations sur tel ou tel aspect communautaire ou encore des avantages financiers ou fiscaux.

Les regards se tournent déjà vers les pays sous pression financière et dont les déficits sont largement, au-delà des 3% ou sont hors zone euro. Dans ce sens la révision substantielle du traité européen ne peut être évitée. Le Sommet européen inaugure, donc, un long marathon politique de l'UE dont personne ne connaît la distance et le temps nécessaire pour le couvrir et encore moins qui sera à l'arrivée dans la maison Europe, parmi les 27 pays engagés dans cette course.