
La nation dort dans un sommeil comateux comme atteinte d'un
infarctus circulatoire. Et pourtant, commente H. Derradji,
le soutien indéfectible du général Tewfik, dans un
scoop médiatique repris par l'APS «l'Algérie a tout pour redémarrer mais...
dommage, la fratrie ne veut pas bouger la roue !» De quoi parle-t-il encore
celui-là mon Dieu ? A part Ouyahia, personne ne sait.
Mais, mystérieux, ce dernier s'est bien gardé d'en souffler mot. A Paradou, un
lieu tranquille à Hydra sur les hauteurs d'Alger, les discours suintent
d'hypocrisie pendant les réunions des pontes de la nomenclature. Au moment où
d'aucuns s'interrogent si la fin de cette chronique ignominieuse et
désenchantée est toute proche, les autres ouvrent grand les portes d'alcôve,
ajoutant de l'indécence à l'inconséquence. Le décor est on ne peut plus à la
limite du carnavalesque. Isolé dans un coin, Bouteflika est tombé fou amoureux du palais d'El-Mouradia
au point qu'il soit dans l'incapacité de s'en séparer. Quant à l'infatigable et
débonnaire Sellal, il sillonne le pays de long en
large, histoire de promouvoir son nouveau talent qui consiste à raconter des
blagues «tristes», politique d'austérité oblige. Saâdani,
lui, se balade aux Champs-Élysées et demande solennellement du haut de la tour
Eiffel, au nom du peuple algérien souverain et «décideur» «la reconnaissance
officielle et dans les plus brefs délais par la France de ses crimes coloniaux
en Algérie» (sa déclaration a été, rappelle-t-on fièrement à Alger, lue en
direct par les présentateurs de TF1). Et vu sa corpulence de lutteur de catch,
le mastodonte Tliba (il pèse environ 150 kg sans
chaussures et valise) s'offre gratis sur ordre du «petit Saïd» le luxe des
grosses cylindrées des consulats algériens en métropole. «Ça m'évite le vacarme
des métros parisiens, j'en étouffe», lâche-t-il, hautain, au micro de l'équipe
d'Al-Magharibia-TV, venue spécialement en région
parisienne enquêter sur les «délits» de corruption des cadres algériens en
Hexagone. Surprise de la semaine ! Chakib Khellil
aura fait son mea-culpa médiatique. Cheveux au vent, un peu amaigri mais
gardant l'allure d'un intello friqué, le filou-gentleman digresse, dès son
refuge américain, des crises, du pétrole et de la marmite. Quant au général Tewfik, le pauvre ! Il décide sur avis de son successeur Tartag et après s'être inspiré des écrits du leader Aït
Ahmed de rédiger ses Mémoires. Pas question de chercher un nègre, il les écrira
lui-même et les intitulera «Mémoires d'un combattant et l'esprit de dépendance»
(allusion faite à L'état-major). Par calcul stratégique, Saâdani,
Tliba (délégué du petit Saïd) et Khellil
se rencontrent dans un bar new-yorkais pour préparer l'après-Bouteflika. Autour
d'un pot, ils ont mesuré avec effroi l'ampleur de leur aliénation néocoloniale
mais se seraient vite soulagés quand ils s'étaient rappelés
que Boutef a pris sa décision de dissoudre la DRS
sous le portrait de F. Hollande ! Pourquoi s'en empêcher alors ? Après des
heures à crapahuter dans le maquis des intrigues, Tliba,
qui sue à grosses gouttes sous l'effet du whisky, a eu le réflexe de poser
cette question : «Mais que penses-tu Khellil si on te
place comme président ?». «Wache moi ? Tu sais bien
que j'ai peur de l'ex-DRS et du peuple». «T'inquiète, réplique Tliba, ça, je m'en chargerai, tu ne te souviens pas qu'un
de mes gars a giflé un wali dans son bureau à Annaba et personne n'a bougé le
petit doigt ?» «Oui, mais là, c'est tout un peuple». D'un éclat de rire, Saâdani interrompt la discussion : «Un peuple, tu parles !
Je suis le chef, n'ai-je pas mis Tewfik, le Dieu de
l'Algérie KO ?» Une fois la nuit tombée, le trio a fini par ficeler un plan.
«Bouteflika rédigera un testament en vertu duquel Khellil
serait président avec les deux Saïd, celui de la famille et l'autre des
travailleurs comme conseillers».