Alors
que les ingrédients pour une intervention militaire en Libye se mettent en
place, Alger a de nouveau insisté sur les conséquences d'une telle action sur
la région. Le ministre d'Etat, ministre des Affaires étrangères et de la
Coopération internationale, Ramtane Lamamra, a réaffirmé, ce jeudi, La position de l'Algérie et
ses principes de non-ingérence. Privilégiant la voie du dialogue pour régler le
conflit libyen, il a rappelé que l'Algérie «ne sera pas entraînée dans une
aventure militaire en Libye ou ailleurs». La déclaration du chef de file de la
diplomatie algérienne intervient alors que le général Donald Bolduc, commandant
des forces spéciales américaines en Afrique, a assuré cette semaine, au Wall
Street Journal, qu'un «centre de coordination de la coalition» était en place à
Rome en vue de cette intervention. Alger, qui a toujours soutenu la nécessité
d'un règlement pacifique de cette crise à travers «le droit de la Libye
d'instaurer le régime qu'elle juge adéquat pour son peuple», a mis en garde
contre «les aventures militaires» qui «n'ont aucune chance d'aboutir au
règlement de ce problème ni dans l'immédiat ni à long terme». Suite à la
déclaration du général américain, les Italiens ont tenu à réagir en démentant
l'existence d'une quelconque «war room». Pourtant, il
ne fait plus de doute sur l'imminence d'une intervention militaire en force en
Libye. La ministre italienne de la Défense, Roberta Pinotti,
avait déclaré, la semaine dernière, coordonner «la formation de la force de
sécurité et de stabilisation libyenne, qui devra intervenir quand un gouvernement
aura été formé». Depuis une dizaine de jours, des informations circulent sur
une éventuelle présence des forces spéciales françaises, américaines ou
britanniques en Libye pour collecter des informations et établir des contacts
en vue de préparer l'offensive de la coalition anti-Daech
dans la région. On prêterait aussi à ces têtes de pont, la volonté d'armer les
milices loyales au gouvernement de Tobrouk. A Sabrata,
le commandant d'un groupe loyal à la coalition Fajr Libya, bras armé du gouvernement de Tripoli, a assuré que
des soldats britanniques étaient à Misrata pour
prendre contact avec les milices. Il évoquera l'imminence d'une campagne visant
à déloger l'EI de Syrte. D'autres indices suggèrent cette guerre malgré
l'opposition d'Alger, comme la multiplication des vols de reconnaissance de
l'aviation américaine qui a déjà mené, officiellement, deux raids aériens en
Libye. La présence du porte-avions français Charles de Gaulle dans la
Méditerranée peut également être interprétée comme un signal fort du prochain
engagement de ces pays en Libye. Officiellement, le Charles de Gaulle a quitté
le Golfe pour des exercices conjoints avec la marine égyptienne.
Par
ailleurs, et outre le dossier libyen, Ramtane Lamamra, et dans une déclaration à la presse à l'issue de
ses entretiens avec son homologue angolais, a également abordé l'épineux
problème des détenus algériens dans les prisons irakiennes. Il a appelé à
davantage de retenue «concernant les questions sensibles» soulignant que ce
dossier comporte plusieurs dimensions dont celle humanitaire. La diplomatie
algérienne faisant honneur à sa réputation d'essayer de régler les contentieux
en toute discrétion, rappelant que «des discussions et des actions
diplomatiques sont en cours entre les deux pays et devront permettre de
trancher ce dossier». Même s'il n'a pas été très disert sur ce sujet, il
précisera néanmoins que la solution résidera dans le parachèvement de la
procédure juridique de l'Irak. Rappelons que la Coordination des familles
d'Algériens détenus en Irak avait relancé l'affaire, en février dernier,
inquiète de leur sort, notamment depuis l'exécution d'un religieux chiite par
les autorités saoudiennes. Dans un communiqué rendu public, la Coordination
estime que le dossier des prisonniers algériens est «une affaire nationale et
humanitaire floue qui a fait l'objet d'interprétations diverses, mais seules
les autorités irakiennes détiennent la vérité au sujet des huit Algériens
incarcérés dans les prisons irakiennes réputées pour les atrocités qui y sont
commises». Les prisonniers arabes, dont ceux de nationalité algérienne,
subissent des traitements inhumains, dénonce la Coordination qui parle de
cellules d'isolement et de sévices corporels.