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EXPULSION DES ALGERIENS : BERLIN EN MODE RAPIDE

par Moncef Wafi

On savait qu'après les violentes agressions du Réveillon à Cologne, dont environ 40% ont un caractère sexuel, n'allaient pas rester sans suite. Des événements qui ont certainement précipité les décisions de la chancelière allemande de durcir le régime d'expulsion des demandeurs d'asile ou réfugiés condamnés en justice. Les premiers à en pâtir sont les Algériens et les Marocains puisque l'enquête policière a identifié des suspects, majoritairement des sans-papiers issus de ces deux pays. Et quelle meilleure occasion d'aborder ce dossier avec les Algériens que la visite, ce mardi, du Premier ministre Sellal à l'invitation de Merkel ?

Si officiellement ces 24 heures s'inscrivent «dans le cadre des consultations politiques» consacrant «une évaluation globale des relations bilatérales et de l'état de la coopération entre les deux pays», le sujet des demandeurs d'asile algériens a été sûrement abordé en dehors de toute communication officielle. La réflexion de Sellal sur la volonté de l'Algérie de combattre «l'insécurité» sous toutes ses formes, lors d'une conférence de presse conjointe avec la chancelière allemande, renseigne sur l'actualité du sujet. A ce propos, cette dernière plaidera l'accélération du renvoi vers leur pays des ressortissants algériens déboutés du droit d'asile en Allemagne. Angela Merkel sait plus que quiconque qu'elle joue gros sur ce dossier puisqu'elle se retrouve sous le feu nourri des critiques sur sa politique d'accueil des réfugiés et surtout face à l'instrumentalisation partisane des incidents de Cologne par les mouvements islamophobes et l'extrême droite à l'image de Pegida ou Pro-NRW. Si sa situation interne est fragilisée par cette question des réfugiés, elle doit également faire face au reste de l'Europe, notamment aux pays de l'Est qui refusent son idée de quotas de répartition des réfugiés au sein de l'UE. Des paramètres qui l'obligent à prendre des mesures radicales en n'offrant plus aux Algériens, au même titre que les Marocains, le droit d'asile en Allemagne, les deux pays étant considérés comme «sûrs» par Berlin.

L'invitation de Sellal, outre l'aspect économique de la visite, participe à accélérer le mécanisme d'exclusion puisque un accord entre les deux pays existe déjà en amont surtout que les ressortissants des deux pays, en point de mire des Allemands, ont profité de la vague sans précédent des demandeurs d'asile venus de Syrie, d'Irak ou d'Afghanistan. Sellal, tout en condamnant les violences de Cologne, est resté en mode prudence faisant valoir qu'avant tout renvoi en Algérie, «il faut naturellement s'assurer qu'il s'agit bien d'Algérien».

En contrepartie de son discours offensif, Merkel, tout en diplomatie, a exprimé son appui aux réformes politiques engagées par Bouteflika. Un emballage pour ne pas froisser un pays qui a encore de l'argent pour les entreprises allemandes.