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Les réserves d'Amnesty International

par M. Aziza

Bien que l'Algérie ait pris des mesures positives, cette année, en faveur de victimes des violences sexuelles et des violences liées au genre, des lacunes dans le code pénal ne permettent pas des avancées pour contrecarrer ces violations des droits des femmes. C'est ce qu'ont estimé des membres d'Amnesty International et des membres du Réseau Wassila étant intervenus hier lors d'une conférence de presse, organisée par Amnesty à l'hôtel Sofitel. Mettant le doigt sur le vrai problème, la directrice d'Amnesty International Algérie, Hassina Oussedik, a exigé l'abrogation de l'article 326 du code pénal qui permet à l'auteur de viol d'échapper aux poursuites s'il épouse sa victime. Une double torture pour la victime, a précisé la conférencière, puisque cette dernière sera obligée de prendre soin de son époux, plutôt de son violeur.

Les membres d'Amnesty International demandent aux autorités algériennes d'autoriser les avortements pour les femmes et les jeunes filles enceintes des suites de viol ou d'inceste. La conférencière justifie cette demande par le fait qu'une femme ayant subi des viols vit avec des séquelles à la fois morales et physiques, chose qui ne permet pas d'enfanter dans les meilleures conditions ou de pouvoir prendre en charge son enfant. La conférencière a affirmé que le comble est de savoir que les femmes aisées ou issues de familles aisées se dirigent vers l'étranger pour pratiquer une interruption volontaire de grossesse dans des conditions sécurisées. Mais ce n'est pas le cas pour les femmes démunies qui en absence de règlementation claire dans le système de santé publique pratiquent des avortements clandestinement avec tous les risques qui en découlent.

Amnesty International va donc remettre une pétition contre les violences sexuelles à l'égard des femmes au Premier ministre Abdelmalek Sellal. Une pétition signée par 198.128 membres et sympathisants d'Amnesty. Les membres d'Amnesty International réclament en fait une audience auprès du 1er ministre pour asseoir un cadre juridique et règlementaire global garantissant une protection des femmes, jeunes filles et enfants des violences sexuelles.

Et pour inciter les femmes à dénoncer les violences sexuelles ou autres formes de violence, la présidente du Réseau Wassila, Fadéla Chitour, recommande un signalement de la part des professionnels de la santé. Elle explique qu'une femme violentée n'a pas la force d'aller dénoncer et chercher des preuves pour convaincre la justice. Elle plaide pour une implication des professionnels de la santé, «il faut leur imposer le devoir pénal de signaler quand ils reçoivent une femme ou une jeune fille agressée».

Elle a ouvert une parenthèse pour évoquer le projet de loi pour renforcer la protection des femmes face aux violences qui, pour elle, témoigne d'une «avancée trompeuse». Elle explique qu'il n'y a même pas eu de «définition du viol». Elle précise encore que la définition qui existe est «restrictive et erronée». L'intervenante regrette le fait que le projet de loi déjà élaboré et clôturé en 2013, ayant défini tous les actes de violences et infligeant le devoir de signalement aux professionnels de la santé, a été enterré dans les tiroirs et un autre projet de loi fut élaboré, mais qui tourne le dos aux avancées déjà acquises.