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De plus en plus de vieillards retrouvés morts en état de décomposition avancé : Quelle prise en charge pour les personnes du 3ème âge ?

par J. Boukraâ



Avec l'urbanisation de plus en plus croissante et face à la montée des valeurs d'indépendance, le concept de famille élargie a de plus en plus de mal à se maintenir. Depuis quelques temps déjà, le phénomène de l'exclusion et l'isolement fait son chemin chez nous. Les personnes âgées sont les premières concernées. Plusieurs cadavres de personnes âgées ont été découverts, ces derniers jours, à Oran. Durant les deux derniers mois, une dizaine de personnes, âgées entre 60 et 75 ans, ont été découvert mortes et en état de décomposition très avancée. Ces personnes ont été retrouvées dans leurs maisons. Pas loin de jeudi dernier, un sexagénaire a été découvert mort dans sa maison à Benfréha. Comme lui, ils sont nombreux à vivre seuls et mourir seuls, sans que personne ne s'en rende compte. Ces personnes sont victimes de l'isolement. Délaissés par leurs enfants, abandonnés par leurs familles, les vieillards peuvent s'éteindre dans la solitude de leurs appartements, jusqu'à ce qu'un voisin donne l'alerte. La découverte fortuite de corps de personnes âgées en décomposition n'est pas rare. Ce genre de situation illustre le désengagement familial des enfants envers leurs ascendants dépendants et se multipliera dans les années à venir. Ainsi, hormis de rarissimes individualités en mesure de s'assumer tant bien que mal jusqu'à leurs derniers jours, la population vieillissante s'identifiant aux plus démunis de la société, des laissés pour compte, n'échappant guère aux maladies chroniques et la non voyance, de handicap et de poly-handicap, ne peuvent espérer mourir dignement. Le premier facteur qui justifie cela est la montée démographique du grand âge. Le vieillissement de la population est un phénomène qui n'épargne pas l'Algérie. Ce dernier connaît même une évolution notable dans le pays où le nombre des personnes âgées augmente d'année en année. Le 3e âge est considéré comme un fardeau pour la famille et toute la société, et la prise en charge d'une personne âgée dépendante est une tâche assez lourde. Les restrictions du temps libre sont difficiles à vivre par les «aidants» et peuvent affecter la vie conjugale, surtout lorsque les aidants sont les enfants des personnes prises en charge. La situation se complique encore plus lorsque les limites de la vieillesse sont atteintes: démence sénile et incontinence. La famille reste encore le moyen le plus efficace pour soutenir les personnes âgées. Cette vérité n'est plus l'apanage des pays en développement. Le fait d'envoyer ces personnes dans des établissements spécialisés était souvent perçu comme un échec.

LES AUXILIAIRES DE VIE A LA RESCOUSSE

Pour la wilaya d'Oran, on apprend que la première promotion de jeunes auxiliaires de vie fera son entrée en formation en octobre. Une vingtaine de stagiaires bénéficieront de la formation qui a pour objectif la prise en charge à domicile des personnes âgées ou en situation de handicap. Le cursus, qui s'étend sur une année, est initié avec le soutien du ministère de la Solidarité nationale, de la Famille et de la Condition de la femme, l'Agence nationale de Développement social (ADS) et des Directions de l'Action sociale (DSA), de la Santé et de la Population (DSP), et de la Culture. En attendant le lancement de la formation des auxiliaires de vie, l'association «Chougrani» a d'ores et déjà animé une première session de deux mois ayant permis la sortie d'une promotion de 15 aidants naturels, alors qu'un 2ème stage vient d'être lancé au profit de 18 autres apprenants. Les aidants naturels, ce sont des proches des personnes âgées, formés à raison de trois après-midi par semaine autour des premiers secours et des notions de base sur l'hygiène de vie». Ces formations permettront, à terme, la mise en réseau des auxiliaires de vie et des aidants naturels à l'effet d'améliorer le quotidien des personnes aux besoins spécifiques. En 2040, un Algérien sur cinq aura plus de 60 ans, soit la même proportion qu'en France aujourd'hui, selon les prévisions d'universitaires. Aujourd'hui, la tendance au vieillissement de la population incite à l'adoption de nouvelles mesures, voire une stratégie pour la prise en charge du 3e âge, désormais un fait, notamment sur le plan sanitaire et social, d'autant plus que la population âgée est sujette à plusieurs maladies de la vieillesse, à l'image du diabète, du rhumatisme, de l'hypertension et surtout de l'Alzheimer. La population vieillissante est des plus précarisée, contrainte de survivre et d'agoniser à huis clos. Certes une avancée considérable est à relever avec la promulgation de la loi relative à la protection des personnes âgées, adoptée en 2010, qui constitue une véritable révolution puisqu'elle introduit pour la première fois des sanctions à l'encontre des descendants qui maltraitent ou encore qui délaissent leurs parents, tout comme elle rend obligatoire la prise en charge des personnes âgées par les descendants notamment ceux en situation vulnérable, allant jusqu'à instaurer une aide de l'Etat pour les descendants qui ne disposent pas de moyens financiers pour la prise en charge de leurs parents.

Ainsi l'intérêt de créer des établissements de soins gériatriques et des structures de loisirs et de détente pour les vieux s'impose. La création de ces structures est à même de soulager cette catégorie très souvent malmenée dans les hôpitaux, les bureaux de postes et autres structures qui offrent des images vivantes de leur endurance, voire de l'inhumain.