Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

Une solution de paiement mobile SMS pour rattraper le gap du paiement électronique en Algérie

par Yazid Ferhat

Le monde universitaire tranche avec la sphère de décision. Si du côté des décideurs, on se mure derrière des prétextes douteux pour expliquer le retard pris dans le domaine des TIC, de belles avancées s'opèrent à l'université. A l'USTHB de Bab Ezzouar un projet de fin d'études propose une solution de paiement mobile. Un projet "pratique" qui devrait intéresser le ministère de la Poste et des TIC qui a mis le paiement électronique en veilleuse.

Yacine Amirat et Abdelghafour Djeradi, deux étudiants en Master à la faculté d'électronique et d'informatique de l'Université des sciences et de la technologie Houari Boumediene (USTHB), ont soutenu leur projet de fin d'études (PEF) sur le "Paiement mobile" avec SMS sécurisé. La solution présentée dimanche dernier repose sur la popularité de la téléphonie mobile et de son système de messagerie (SMS), pas du tout exigeante au niveau technologique et largement accessible à tous les utilisateurs. «Le SMS est la technologie la plus indiquée pour le paiement mobile en Algérie», affirment les deux étudiants pour défendre leur choix.

L'utilisation du mobile comme terminal de paiement, selon cette solution, qui s'appuie sur les structures de deux réseaux (fixe et sans fil) pour un niveau optimal de sécurité, repose sur l'interaction de cinq entités (acteurs essentiels), selon les concepteurs du projet. Il s'agit : du client mobile (le payeur), le serveur fournissant le service de l'application paiement mobile (fournisseur de service de paiement mobile ou FSMP), le commerçant (qui reçoit le paiement), la banque du client mobile, la banque du commerçant, et l'autorité de certification.

Un projet "tout à fait réalisable"

Pour pouvoir payer via son téléphone mobile, selon le schéma présenté, il faut bien évidement avoir un téléphone portable, même un Nokia 3310 datant du début des années 2000, fonctionnel sur l'un des trois réseaux de la téléphonie mobile (Djezzy, Mobilis ou Nedjma) et un compte bancaire.

Prosaïquement, le client initie une requête de paiement via SMS qui va être reçue par le FSPM qui la soumet à son tour au commerçant pour autorisation. Le client reçoit un SMS et confirme sa volonté de payer par ce mode de paiement. S'ensuit alors un échange entre le FSMP et les deux banques pour effectuer le transfert d'argent pour que le client comme le commerçant reçoivent chacun un message de confirmation de la transaction. Cet échange d'informations est sécurisé par le cryptage qu'offre le GSM, en plus de la certification électronique. "Le succès de ce mode de paiement exige un haut degré de coopération entre les cinq acteurs, notamment les opérateurs de téléphonie mobile et les banques. Le projet est tout à fait réalisable. Pour l'autorité de certification, on peut en créer une en interne entre les opérateurs, et les banques de l'émetteur et du receveur des fonds», explique Abdelkader Belkhir, encadreur du projet. Pour lui, l'Algérie gagnerait beaucoup en mettant en place cette solution de paiement qui «soulagerait d'une manière sensible la pression sur les bureaux de poste».

Le m-paiement pour réduire le recours au cash

La forte pénétration du mobile en Algérie qui avoisine les 100%, ajoutée à l'absence de la 3ème génération de la téléphonie mobile, fait paraître, selon M. Belkhir, le paiement mobile par SMS comme la solution idéale. "Dans son côté pratique, cette solution est à envisager dans un premier temps pour le règlement des factures courantes d'électricité, d'eau, de téléphone avant de l'élargir à d'autres transactions", explique encore le promoteur du projet qui dirige également une équipe de recherche au sein de la faculté. En optant pour des solutions de paiement mobile, selon notre interlocuteur, le pays va amorcer un important pas en avant dans le monde des paiements alternatifs au cash et jeter le premier jalon d'une culture de transactions numériques. En Algérie, où plus de 95% de la population recourt au cash pour le règlement des factures, les espèces sont souvent retirées d'un guichet avant d'être dépensées dans un autre. Le paiement mobile par SMS est parti pour être le candidat favori pour supplanter la pratique du cash. Ce projet de fin d'études n'a pas juste le mérite de traiter d'un sujet d'actualité économique d'une manière académique. Son côté utile et fonctionnel est évocateur d'une réelle prise de conscience de l'élite nationale de l'impératif de changer de vieilles pratiques commerciales qui persistent à l'ère du tout numérique. Ce travail d'universitaires, qui montre aussi un besoin, devrait interpeller les décideurs du secteur des TIC, tout aussi bien que ceux du secteur bancaire et financier, à penser sérieusement à construire des passerelles pour la réalisation de projets similaires pour placer l'Algérie dans le monde de l'innovation.