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Naissance de l'Office de répression de la corruption

par Yazid Alilat

La lutte contre la corruption en Algérie a franchi, jeudi dernier, un nouveau pas, avec la signature du décret présidentiel officialisant une campagne de longue haleine contre les crimes économiques. Dorénavant, ce sera à l'Office central de répression de la corruption (OCRC), dont le décret relatif à sa composition, son organisation et ses modalités de fonctionnement a été signé jeudi par le président Bouteflika, de mener la lutte contre toutes les formes de corruption en Algérie.

Dans les textes, l'OCRC a toutes les apparences d'une brigade économique chargée de mener une guerre «sans merci et à tout moment» contre les délits économiques qui gangrènent l'économie algérienne. Blanchiment d'argent, corruption, passations douteuses de marchés publics, détournements et financement du banditisme, avec son appendice, le terrorisme, figurent dans l'agenda de cet office. L'OCRC aura ainsi pour principales missions de mener, sous la direction du Parquet, des recherches et des enquêtes en matière d'infraction de corruption. Après la CTRF (Cellule de traitement du renseignement financier), l'Algérie s'est également dotée d'un second organisme public de lutte contre la corruption. L'OCRC, rattaché au ministère des Finances, disposera d'officiers de police judiciaire ayant compétence sur tout le territoire national en matière d'infractions qui leur sont connexes, et aura également pour tâche de renforcer la coordination entre les différents services de police judiciaire en matière de lutte contre la corruption. Selon le décret, l'Office est l'outil opérationnel de l'instance nationale de lutte contre la corruption, dont le chef de l'Etat avait annoncé la mise sur pied lors de son discours à l'ouverture de l'année judiciaire 2010-2011, en vue de doter la justice de toute l'efficacité lui permettant de lutter contre les fléaux sociaux, notamment la corruption.

Pour autant, l'OCRC vient s'ajouter, en tant que mécanisme officiel de lutte contre la corruption avec compétence judiciaire, aux autres mécanismes et institutions déjà mis en place pour lutter contre les délits économiques. En plus de la CTRF, il y a également l'Organe national de prévention et de lutte contre la corruption, dont les membres avaient prêté serment en janvier 2011. Composée de sept personnalités ayant occupé des postes importants au sein des institutions de l'Etat, cette instance, prévue par la loi relative à la prévention de la corruption de février 2006, est chargée de présenter un rapport annuel au président de la République sur l'état de la prévention de la corruption dans le pays et d'élaborer les politiques idoines pour endiguer le phénomène.

Mais en dépit de ces «garde-fous», la corruption en Algérie fait toujours «feu de tout bois», à en croire l'ONG Transparency International. Le dernier rapport de Transparency International place l'Algérie à la 112e position sur 183 pays, classés du moins au plus corrompu. «Si l'Algérie a été épinglée par Transparency International, ce n'est pas à cause du manque de performances de l'institution judiciaire ou des services en charge de la lutte contre la corruption. Il s'agit beaucoup plus d'une suspicion de corruption. Le phénomène n'est pas quantifié en Algérie», tempère Mokhtar Lakhdari, directeur des affaires pénales au ministère de la Justice, à la radio chaîne 3.

Selon lui, en 2010, les tribunaux algériens ont rendu près de 500 jugements sur des affaires de corruption liées à des détournements de fonds. Après la signature du décret donnant naissance à l'OCRC, le président Bouteflika à appelé le gouvernement «à faire aboutir» dans les plus brefs délais le programme de coopération entre l'organe de prévention de la corruption et les instances compétentes de l'Union européenne. Le principe de cette coopération étant déjà convenu avec le partenaire européen dans le but de bénéficier de l'expérience d'instances européennes dans les campagnes de lutte contre la corruption, le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme.