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Vent de liberté

par Notre Bureau De Bruxelles : M'hammedi Bouzina Med

Quand les bruits de couloirs ne sont plus audibles, nous nous faisons un plaisir de vous les faire parvenir. Musique.

Mercredi dernier, le Premier ministre hongrois, Viktor Orbàn, dont le pays assure la présidence tournante de l'UE, pour ce 1er semestre de l'année, a subi son premier test politique face aux députés européens à Strasbourg. Il s'en est sorti sans trop de difficultés, voire même gagnant, tant les eurodéputés ont concentré leurs critiques sur la loi controversée sur les médias, adoptée en Hongrie et légué dans le chapitre des « divers », les questions clés inscrites à l'agenda européen, telles celles relative à l'énergie, le partenariat oriental ou encore la mise en place des mécanismes de stabilité financière et économique. Les eurodéputés ont pleinement raison de dénoncer les atteintes à la liberté de la presse. C'est une évidence chez tout démocrate qui se respecte. Seulement, les députés n'ont pas lu le texte de cette nouvelle loi hongroise sur les médias pour l'étudier et juger de son incompatibilité avec les lois européennes, en la matière. Pour l'heure, seule la Commission européenne dispose de ce fameux document que ses experts étudient. La Commission européenne donnera son verdict, dans les jours ou semaines à venir. Par ailleurs, le Premier ministre hongrois s'est engagé, publiquement devant la Conseil européen, la Commission et mercredi, devant le Parlement européen (PE), à modifier ou retirer cette loi sur les médias si la Commission européenne estimera qu'elle est incompatible avec celles en cours dans l'UE. Il a ajouté que les critiques qui ont mis en doute la capacité de son pays à conduire les affaires européennes ont été «ressenties comme une claque à la figure du peuple hongrois », avant d'ajouter que «si cela continue, je suis prêt à me battre ». Par ailleurs, il faut noter que le groupe des partis populaires (PPE), le plus important du PE, a apporté son soutien et sa confiance au chef de l'exécutif hongrois : « je refuse tout procès d'intention » a déclaré son président, Joseph Daul, tout en rappelant que « le Premier ministre hongrois s'est engagé à modifier la loi sur les médias, si la Commission l'estime contraire au droit communautaire. » L'atmosphère était tendue dans l'hémicycle de Strasbourg, tant les critiques ont été violentes dans le ton et le vocabulaire. L'eurodéputé et co-président des Verts européens Daniel Cohn-Bendit, n'a pas hésité à traiter Viktor Orbàn de populiste, le comparant au président du Venezuela, Hugo Chavez. Le chef du groupe socialiste et démocrate (S & D), Martin Schulz, a lancé à V. Orbàn : « ce que vous faites, c'est contrôler les médias et ce n'est pas bien?en démocratie ce sont les médias qui contrôlent le pouvoir ». A l'évidence, l'unanimité des élus européens sur la situation réelle des médias en Hongrie n'est pas acquise. Comment le pourrait-elle puisque le texte de loi en question est encore frappé de confidentialité et son décret d'application suspendu ?

LA LIBYE EN LIGNE DE MIRE

Jeudi, les élus de l'UE se sont prononcés sur les conditions générales du futur cadre de coopération avec la Libye. Engagées depuis 2008, les discussions sur un Accord entre les deux partenaires sont, à ce jour, limitées à deux grands chapitres : l'énergie et l'immigration. Et c'est sans surprise que le PE a adopté une résolution adressée au Conseil européen (chefs d'Etats et de gouvernements), conditionnant tout accord avec la Libye par la garantie de protéger les migrants ; de reconnaître le statut de réfugiés aux demandeurs et de suspendre? la peine de mort. Le projet de résolution fait référence, par ailleurs, aux libertés d'expression et d'opinion. Ce n'est donc, qu'après plus de 2 ans de négociations que les Européens somment clairement le régime politique de Kadhafi de respecter des droits humains fondamentaux. Certains voient dans cette intransigeance européenne, sur les droits de l'Homme en Libye, l'écho de la révolution de jasmin tunisienne. Il faut quand même, rappeler qu'en cette même année 2008, le colonel Kadhafi avait accepté l'assistance financière de l'UE pour la construction, dans son pays, d'un centre d'accueil (de rétention en fait) pour les migrants sub-sahariens. Kadhafi se cantonnant dans le rôle de « garde-frontières » de l'Europe à l'est du Maghreb, le Maroc faisant de même à l'ouest. La question est de savoir si l'initiative européenne de contraindre le régime libyen à la promotion des libertés a des chances d'aboutir. Pas si évident que cela, quand le « Colonel » est le seul responsable politique au monde à regretter le départ de son voisin, et non moins ami, le général Ben Ali, liberticide de conviction. L'Europe aussi est attendue sur cet engagement solennel qu'elle vient de prendre à Strasbourg. A moins qu'une fois encore, le temps fera passer au second plan les grands principes démocratiques, au nom du réalisme des affaires et des intérêts. Ou sous le prétexte de non ingérence dans les affaires internes d'un pays.