
«Venez profiter
de réductions jusqu'à 70% !», «Chez nous, c'est les bonnes affaires à saisir!»,
«Soldes de fin d'année, profitez des prix cassés!», etc.
Les affiches des
boutiques branchées du centre-ville écrites en caractères gras ne sont en
réalité qu'un hameçon pour attirer les accros du shopping. Rares sont les
boutiques qui baissent réellement les prix de leurs marchandises, la
quasi-totalité des commerces recourent à ces publicités mensongères pour
tromper la vigilance des acheteurs. Le terme de publicité mensongère apparaît
comme un euphémisme. Il s'agit ni plus ni moins d'une pure arnaque des acheteurs
crédules et en particulier la gent féminine. Certaines y croient vraiment et se
précipitent les yeux fermés sur la marchandise exposée, mais les consommateurs
avertis préfèrent y aller doucement, rien ne presse, les bonnes affaires se
font ailleurs. Dans le marché populaire de M'dina J'dida, les soldes sont à
longueur d'année et les commerçants font vraiment de vrais rabais. Une femme
avertie aura le même produit pour moitié prix à M'dina J'dida et pas besoin
d'attendre la fin de l'année pour faire ses courses. «Ici, les soldes, c'est à
longueur d'année», crient les commerçants de M'dina J'dida où convergent des
centaines de milliers de personnes de toute la ville et souvent des autres
wilayas de l'Oranie. Des centaines de véhicules stationnés dans les grandes
artères jouxtant M'dina J'dida sont immatriculés dans toutes les wilayas de la
région Ouest (Mostaganem, Aïn Témouchent, Mascara, Tlemcen, Sidi Bel Abbès?). A
M'dina J'dida, les belles affaires ne manquent pas, contrairement au
centre-ville où la quasi-totalité des boutiques proposent des prix qui
dépassent l'entendement, malgré leurs soi-disant «soldes». Une chaussure femme
à 4.500 dinars proposée avec une réduction de 20% pour le prix de 3.600 dinars
! La même paire de chaussures est vendue, sans rabais, à M'dina J'dida à
seulement 2.600 dinars. Une femme, bonne négociatrice, peut, sans forcer,
convaincre le vendeur de faire des rabais de centaines de dinars. Un pantalon
jeans 501 pour 3.500 dinars, rabais de 30% inclus, exposé dans les échoppes du
centre-ville, est proposé à 2.500, voire 2.000 dinars sur les étals du marché
populaire. «J'ai trouvé une veste cuir soldée à 9.200 dinars dans une boutique
au centre-ville. Le vendeur m'a juré qu'il avait vendu plusieurs pièces pour
14.000 dinars. J'ai décidé finalement de patienter avant d'acheter. Et
figurez-vous, j'ai trouvé la même veste à 6.200 dinars et ce, sans aucun rabais
dans une autre boutique d'une autre ville spécialisée dans la vente des
articles en cuir», témoigne ce quadragénaire qui a juré devant nous de ne plus
acheter ses vêtements dans les commerces du centre-ville. Pour être honnête, ce
ne sont pas les prix qui attirent la clientèle féminine vers les échoppes du
centre-ville, mais c'est les belles vitrines bien décorées, embellies par les
jeux de lumière, des guirlandes et autres qui séduisent surtout les jeunes
personnes. Certains commerçants de la rue Larbi Ben M'hidi excellent dans l'art
de la décoration pour attirer les clientes. Dans ces boutiques branchées, rien
n'est laissé au hasard : des tendances déco high tech avec un nouveau design
primant la fantaisie, la surprise, voire l'éblouissement des senteurs
d'intérieur avec des fragrances sensuelles ou relax et surtout les
indispensables écrans plasma réglés sur des chaînes de musique branchée souvent
charki, projetant en boucle des clips de stars dénudées, aux silhouettes
accortes et aux formes gracieuses, déhanchant souplement sur un rythme
oriental. L'ambiance exaltante de ces boutiques fait oublier au client tout le
sens de la réalité. Elle prépare en quelque sorte la clientèle au prix choc, au
sens propre du terme. Outre cette ambiance éblouissante, les vendeurs, et
parfois de jeunes vendeuses, mis sur leur trente et un, ont le verbe facile et
ne manquent jamais d'arguments pour convaincre la clientèle. «Vous savez, cette
chaussure est de fabrication française. Je la vends à un prix sacrifié», assure
ce vendeur. La cliente avertie contemple attentivement cette paire de
chaussure. Elle lit sur le bas de la semelle : «Made in China». Devant le
regard suspicieux de la jeune femme, le vendeur, apparemment embarrassé,
affirme : «Oui c'est des chaussures fabriquées en Chine, mais pour le marché
français. C'est des chaussures conçues selon les normes européennes?!».
Certains commerçants sont prêts à dire n'importe quoi et user de tous les
subterfuges pour vendre au prix fort leurs marchandises.