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Guelma: Du beau monde pour Kateb Yacine

par Moncef Wafi

«Les figures de Nedjma», ce pourrait être l'intitulé conducteur du deuxième colloque sur Kateb Yacine qui aura pour théâtre Guelma à partir d'aujourd'hui et jusqu'au au 29 octobre prochain, avec au programme une quinzaine de communications, dont 8 seront présentées par des chercheurs de France, d'Allemagne, du Maroc ou encore d'Autriche, auteurs de travaux sur «Nedjma» et Kateb Yacine.

 Parmi eux, Catherine Milkovitch-Roux, de l'université Blaise-Pascal de Clermont-Ferrand, avec «Nedjma, l'enfance, le héros de la guerre» ; Guy Dugas de l'université Paul-Valery de Montpellier et son «Le nouveau et l'inédit dans Nedjma» ; le chercheur Abdallah Alaoui, de l'université marocaine de Rabat, avec «La singularité de Nedjma et son influence sur la littérature maghrébine». Pour Benamer Mediène, écrivain, ami de Kateb Yacine et auteur de deux ouvrages sur lui, ce colloque sera également l'occasion de relancer une nouvelle réflexion sur l'œuvre de Kateb, «puisqu'ils le font en Allemagne, où il existe toute une école katébienne à Hambourg, aux Etats-Unis d'Amérique, en Italie ou en Russie, où c'est la propre petite-fille de Staline qui a traduit Nedjma dans la langue de Gogol».

 Revenant sur l'esprit du colloque, M. Mediène insiste sur le fait que, 21 ans après sa mort, Kateb réunit la tribu des Keblout, un immense ârch de notables et de guerriers, dissous dans la répression sanglante de l'armée coloniale avec la décapitation de six chefs de famille, à Guelma, après un simulacre de procès, accusés d'avoir assassiné un couple de Français. L'histoire de la tribu se perd avec le changement d'identité et l'occasion est toute trouvée pour les Abassi, Kadi, Kateb, Mechaï et tant d'autres familles de se retrouver pour faire revivre une mémoire séculaire. Ce colloque permettra aussi de «corriger» certaines interprétations de l'œuvre de Kateb qui ont vu dans Nedjma une personnification de l'Algérie. «C'est absolument faux de prétendre que la figure de Nedjma représente l'Algérie», assènera Benamer Mediène, qui estime que c'est plutôt une confrontation entre l'histoire et le mythe et met l'accent sur les différentes interprétations qui ont accompagné Nedjma et qui ne font surtout pas consensus. Selon lui, il faut rester dans le livre, puisque Kateb s'est inspiré de sa vie et que le personnage de Nedjma a réellement existé. Interrogeant un jour Kateb sur son roman, il lui répondra que Nedjma est la femme de sa vie, son premier amour et qu'elle l'obséderait jusqu'à la fin de sa vie. «Nedjma n'est pas un roman psychologique, c'est une légende, une espèce d'épopée dans laquelle l'héroïne le traverse sans quasiment parler». Il ajoutera, en insistant sur la double démarche du colloque, que la rencontre est intellectuelle mais possède également une dimension de retour sur le terroir. «On est dans l'espace katébien et les gens ne seront pas seulement dans l'écoute mais aussi dans la vision, dans la chair de l'Algérie».

 Parmi les participants algériens figurent Mostefa Seridi de l'université de Guelma (Pourquoi ?'Nedjma ?''), Khaled Boucif, professeur d'histoire à l'université d'Oran (?'Les évènements du 8-Mai 1945 dans Nedjma'') et Nadia Kada de l'université de Tizi-Ouzou (?'La révolution et l'esprit révolutionnaire dans Nedjma''). Plus de 300 invités sont attendus à cette manifestation, alors qu'une pièce de théâtre intitulée ?'Eclats de textes de Kateb Yacine'', mise en scène par son ami Hassane Assous, sera jouée par les comédiens du théâtre régional de Sidi-Bel-Abbès à l'occasion de ce colloque.