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Le crédit, tâche sombre de banques moins liquides en 2009

par Samy Injar

Les surliquidités des banques demeurent un problème pour la Banque d'Algérie. Que seul l'essor du financement de l'économie peut résoudre. La progression du crédit aux PME «reste en deçà des attentes».

La crise financière internationale, en réduisant les dépôts de Sonatrach auprès du secteur bancaire a provoqué, pour la première fois de la décennie, une contraction de la liquidité bancaire en Algérie en 2009. Celle-ci a baissé de 10% passant de 2845 milliards de dinars en 2008 à 2549 milliards de dinars en 2009. La hausse des épargnes financières du Trésor public auprès de la Banque d'Algérie est l'autre moteur de cette contraction de la liquidité bancaire.

 Toutefois, les banques algériennes sont toujours liquides. C'est le gouverneur de la Banque d'Algérie qui en renouvelait le constat lors de la présentation de la note de conjoncture du second semestre 2009 devant les professionnels de la place. Pourtant, les crédits à l'économie ont progressé de 18,5% en 2009 à contre-courant de la tendance dans les pays de l'OCDE où le crédit s'est contracté en 2009.

 «L'excès de l'offre de fonds prêtables sur le marché monétaire interbancaire reste encore important et la Banque d'Algérie a continué à absorber l'excès de liquidité par le biais de reprises de liquidités» explique le bulletin de conjoncture de la Banque d'Algérie. M Mohamed Laksaci a noté la poursuite de la progression des crédits à long terme dans le total des engagements des banques : ils représentaient 56,5% en 2009 contre 52,6% en 2008. C'est le résultat de la part grandissante du financement des grands projets publics à maturité longue. «Le développement des crédits aux PME, lui, reste en deçà des attentes» déplore le gouverneur de la Banque d'Algérie.

La banque d'Algérie en aspirateur des surliquidités

 Les pratiques des dernières années se sont donc poursuivies en 2009. La Banque d'Algérie (B.A) résorbe l'excès de liquidité des banques : 1100 milliards de dinars tout au long de l'année 2009. Cependant, la rémunération des reprises de liquidités des banques commerciales a baissé au cours de l'année. Elle est passée de 2% à 1,25% pour une reprise à 3 mois, de 1,25% à 0,75% pour les reprises à 7 jours et de 0,75% à 0,30% pour la facilité de dépôt rémunéré. Les banques commerciales ont pour autant continué à déposer des montants conséquents au titre du complément de liquidité (facilité marginale de dépôts) accompagnant les réserves obligatoires réglementaires (8% des dépôts) maintenues auprès de l'institut d'émission monétaire (B.A). En gros, en 2009 les flux d'argent revenaient toujours en masse vers la Banque d'Algérie au lieu de circuler dans l'économie pour soutenir l'investissement, l'emploi et la consommation.

 Le rapport du gouverneur de la Banque d'Algérie fait ressortir un autre archaïsme du système bancaire : la part toujours forte de la monnaie fiduciaire (billets et monnaie) dans la masse monétaire, près de 20% encore dans M2 (masse monétaire intermédiaire). En 2009, la monnaie scripturale s'est même réduite de 2,59% en conséquence de la baisse des dépôts à vue et la quasi monnaie, dans les banques.

L'intermédiation bancaire au ban des accusés

 Le gouverneur de la Banque d'Algérie ne s'est pas privé d'un commentaire quasi réprobateur à l'adresse des PDG des banques publiques et privées présent le 25 mars dernier à son siège de la Villa Jolie à la fin de ce constat peu brillant sur la faible rencontre de l'offre financière disponible et de la demande de financement des entreprises : «L'excès de liquidité persiste? C'est là qu'il est attendu des banques qu'elles jouent pleinement leur rôle d'intermédiation, notamment dans les politiques de crédit aux PME et de crédit hypothécaire». Un des dirigeants des banques privées a expliqué, plus tard, qu'il était difficile d'attendre de nouvelles banques en cours de déploiement de réseau de faire mieux dans un cadre réglementaire si changeant : «nous avons eu droit en une année à une obligation de multiplier notre capital social par trois, à un changement radical des modalités de paiement du commerce extérieur et à la disparition d'un métier entier, le crédit à la consommation, de nos guichets. Les banques privées vont devenir de grands partenaires du développement des PME. C'est dans leur vocation. Il faut juste leur en laisser le temps et les moyens». Et les banques publiques, coupables d'abriter le gros des surliquidités ? Une étude récente, rapportait que les managers des banques publiques considèrent la majorité des PME, ou des porteurs de projets «non bancables». La rencontre de l'offre et de la demande de crédit attendra encore.