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Quand Bouteflika se veut au-dessus de la mêlée électorale

par Kharroubi Habib

Dans le message qu'il a adressé à la nation à la veille du début du scrutin pour l'élection de l'Assemblée populaire nationale (APN), le chef de l'Etat a appelé à une participation populaire massive lors de ce rendez-vous électoral. Contrairement au Premier ministre qui en pleine campagne électorale a multiplié les déclarations visant à influer sur le vote des électeurs en faveur bien entendu des partis et candidats qui soutiennent le programme présidentiel et l'action de son gouvernement, Bouteflika s'est limité dans son message à plaider pour qu'ils se rendent aux urnes afin d'y exprimer leurs choix en concordance avec leurs convictions.

Ce n'est pas que le président se désintéresse de ce que le choix comporte comme risque pour le camp partisan qui le soutient. Il a sciemment opté pour apparaître se situer au-dessus de la mêlée électorale et ses résultats parce que pour lui l'enjeu du scrutin n'est pas le score électoral que feront ses partisans, mais le taux de participation de l'électorat qui sera enregistré, pour la raison qu'il a conscience que c'est à l'aune de ce taux de participation que se jugera nationalement et internationalement l'accueil que les citoyens ont fait au grand chantier de réformes politiques entreprises sous sa conduite et dont la révision constitutionnelle qu'il a initiée en a été la clef de voûte. Pour lui, l'inquiétude pour ce premier scrutin électoral post-révision constitutionnelle n'est pas par conséquent les scores électoraux que réaliseront en l'occurrence les partis s'inscrivant dans le soutien à son programme et à ses réformes politiques, mais l'attitude majoritaire qui sera celle du corps électoral.

Une victoire électorale de ses partisans n'en serait pas en effet une pour lui s'ils l'obtiennent dans des urnes qui auront été massivement désertées par les électeurs. Pour inciter ces derniers à ne pas opter pour l'abstention, le président de la République a mis l'accent sur l'importance que revêt l'exercice par eux de leur devoir de citoyens qu'est le vote pour l'Algérie dont la stabilité et la « progression vers la démocratie » en sont dépendantes. Il a usé de l'argument que le scrutin auquel il les convie de prendre part massivement sera à l'abri de la tentation d'en fausser ou d'en pervertir les résultats du fait que les réformes politiques qu'il a initiées l'entourent de garanties qui vont concourir à sa transparence et à sa régularité. Auquel argument il a ajouté celui de l'attitude patriotique devant être celle des Algériens en ce rendez-vous électoral crucial pour le pays dans lequel ils doivent démontrer que pour eux la sécurité et l'unité de la nation sont des préoccupations se situant au-dessus de celles partisanes qui les animent.

Le message de Bouteflika a-t-il été reçu comme il l'espère ? Les partis qui pendant la campagne électorale ont plaidé dans le même sens que lui et avec les mêmes arguments n'ont guère provoqué l'engouement populaire pour le scrutin du 04 mai. Ce qui peut constituer la preuve que les réformes politiques dont Bouteflika et ces partis en font la panacée à la crise politique suscitée dans le pays par le système dont ils sont l'émanation n'ont guère dissipé chez les citoyens la conviction qu'elles ne sont pas celles dont il peut en résulter la fin du « statu quo » mortifère empêchant toute avancée démocratique réelle et vivifiante.