Ce n'est pas de la passion et ce n'est pas non plus de la haine. Entre l'Algérie et la France les rapports sont ceux d'un couple divorcé et la séparation ne s'est pas faite à l'amiable, laissant la proximité géographique des résidences du couple éclaté offrir une faculté aux persiennes de claquer quand survient une grosse bouderie.

L'insulte est rare, elle n'intervient que quand les politiques de passage dans cette vie se vêtissent d'habits d'enfants gâtés. Elle pèse alors le poids du blasphème avec une lourdeur telle qu'elle contrarie l'obligation faite à deux peuples d'aller vers le bonheur et le progrès.

La situation économique et sociale des deux pays n'est pas rose et les bravades verbales de part et d'autre sur leurs états des lieux respectifs s'affichent comme des allégories fantasques. Les uns et les autres ne se détachent pas des bombements des torses au nom d'un passé historique fait de gloires mais de sang aussi et qui cependant ne transporte plus dans la métamorphose mondiale gigantesque d'aujourd'hui. On croit que la fracture est au niveau des veines alors que sa racine est dans la profondeur des labours où on a semé de la vanité et des recoins des usines où on a blotti de mauvais esprits.

Au cœur de la France profonde, le vacher désapprend à traire ses vaches et dans les Aurès, le paysan désarmé, les yeux rivés sur le ciel, contemple le défilé des étoiles qui passent. Les deux ne se focalisent plus que sur la culture de la barricade des rues et se disent prêts, faute d'écoute et d'espoir, à céder leurs âmes au diable.

On a contraint le maçon de Poitiers à se fâcher avec sa massette et celui de Batna en est encore à se demander comment construire un muret. L'un allié à l'autre pourraient pourtant ensemble ériger la façade du bonheur pour leurs enfants.

Que de projets fabuleux seraient capables de formuler ces deux-là au bénéfice de leurs pays et de toute l'humanité pour peu que les politiques se débarrassent des courtes visions du bout du nez et se concilient avec l'ordre implacable des données d'aujourd'hui !

Les jeunes générations d'aujourd'hui n'ont plus d'attache avec les épithètes et le gargarisme des mots. Les enfants du monde, précoces et mieux avisés, ont l'âge adulte de leur côté. Ils savent mieux que leurs aînés ce qu'aujourd'hui et demain apporteront avec eux. De bien et de mauvais. Comme les ouvriers et les maçons des deux bords, ils savent que la réalité est sur les étalages des marchés.