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Ksentini: L'Algérie doit éviter l'image d'Etat policier

par Yazid Allilat

Le président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'homme (CNCPPDH), Farouk Ksentini, a salué, hier, l'annonce de la prochaine levée de l'état d'urgence par les autorités.

Invité de la radio nationale, Farouk Ksentini a indiqué que (sa) commission «a accueilli avec beaucoup de satisfaction cette mesure». Pour lui, l'état d'urgence décrété par les autorités

était nécessaire «pour lutter contre le terrorisme, pas contre la démocratie», et, ajoute-t-il, «pour rendre cette lutte efficace». «Maintenant, c'est autre chose, le terrorisme est marginalisé, on peut songer à lever cette mesure. C'est une demande des partis et un reproche de l'étranger», a encore précisé M.Ksentini. «Cette mesure a été conditionnée par l'amélioration des conditions sécuritaires», a-t-il également relevé, tout en soulignant que l'état d'urgence

n'avait pas «eu d'impacts sur la vie des citoyens, car ils ne s'étaient aperçu de rien. Sur le plan politique, oui, cette mesure a un effet psychologique important sur les libertés individuelles, l'Algérie doit rétablir son image de marque, et éviter l'image de l'Algérie Etat policier».

Il a souligné que dans le sillage de l'annonce de la prochaine levée de l'état d'urgence, des personnalités politiques ont déposé la demande d'agrément de leurs partis politiques. «Nous allons dans la bonne direction. Il faut mettre en marche la démocratie et ouvrir les médias

lourds», a-t-il encore précisé.

Pour autant, M.Ksentini estime qu'il faut éviter les affrontements directs avec l'Etat, et privilégier le dialogue. «Il faut le dialogue, exprimer ses idées et établir un débat fructueux entre l'Etat et les citoyens, les partis. Ceci est préférable à un affrontement».

Farouk Ksentini estime d'autre part que «quand les marches sont interdites. L'Etat ne doit jamais reculer, et s'il recule, c'est l'effondrement de toutes les valeurs, et sa crédibilité», a-t-il dit. Il soulignera ainsi que «si j'étais un chef de parti, j'aurais demandé audience au président de la République pour lui exprimer mes griefs, mon inquiétude, mon angoisse. Je ne pense pas que le Président aurait refusé de recevoir un chef de parti».

Par ailleurs, sur la question des élections anticipées, il n'a pas hésité à relever que «si les conditions le nécessitent, et que l'on puisse songer à la dissolution d'une assemblée nationale, cela n'est pas dramatique, si les règles du jeu sont respectées». «Si des élections anticipées sont demandées par les partis», a-t-il précisé. Sur le front social, il est favorable à des solutions urgentes et durables pour la résolution des problèmes de la jeunesse, algérienne, dont l'emploi est l'un des plus grands casse-tête des autorités. «Le drame de cette jeunesse c'est l'emploi. C'est un drame fondamental, il faut que certaines choses soient revues, corrigées. L'Algérie a les moyens de prendre en charge ces problèmes de jeunesse», a-t-il relevé, faisant remarquer que «il y a sur la table 280 milliards de dollars pour prendre en charge les problèmes de la jeunesse», qui est selon lui «complètement désemparée, prête à toutes les éventualités».

En outre, sur l'annonce de la dépénalisation de l'acte de gestion, qui a fait tant de ravages dans l'économie nationale et beaucoup d'injustice contre des cadres emprisonnés sur de simples présomptions, M.Ksentini a été très clair: «des procès retentissants ont été fait injustement aux cadres. Demander à des juges qui n'ont aucune notion de la gestion de juger des gestionnaires est dramatique».

Il a, par ailleurs, salué les changements politiques intervenus en Egypte, après plus de deux semaines de protesta qui ont conduit au départ de Hosni Moubarak, comme le demandait le peuple égyptien. « C'est le peuple égyptien qui a imposé sa volonté, c'est positif. (Mais), les Occidentaux doivent comprendre que les Arabes sont capables de construire la démocratie, les événements de l'Egypte le prouvent».

Enfin, sur la question du Sahara Occidental il a estimé que «le fond des choses reste le même: ce territoire reste colonisé et il faut apporter une solution pour permettre aux Sahraouis de s'autodéterminer dans le sens qu'ils veulent.» «Les choses sont claires, malheureusement, ils (Sahraouis) ne sont pas à la veille d'une solution», a-t-il dit, avant de relever que «ce qui encourage le Maroc, ce sont les attitudes des pays occidentaux, dont les Etats-Unis, qui peuvent faire pencher la balance». «C'est dans cette direction là qu'il faut travailler», a encore précisé M.Kenstini.