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SAHA AÏDNA ET AÏDHOUM

par  K. Selim

Les marchands de moutons - ou se-rait-ce les acheteurs ? - ont de l'hu-mour : les bêtes les plus chères sont gratifiées du label «Saâdane». Donc, les petites bourses doivent sagement s'en éloigner... Le «Antar-Yahia» est aussi horriblement coûteux dans cette mercuriale moutonnière où les noms de footballeurs fixent la cote du bélier.

 En réalité, pour rester dans la dérision ambiante, même les remplaçants sont hors de prix... Cela expliquerait peut-être la ténacité de certains syndicats autonomes qui restent en mouvement bien qu'on leur dise qu'ils ont gagné et enregistré une belle victoire. Dans une logique de retour à la base, les syndicats, qui ont signé un procès-verbal de réunion avec le ministère de l'Education, attendent d'organiser des assemblées générales de leurs adhérents. Les syndicats, qui semblent attendre des garanties sur les engagements officiels, se donnent ainsi un délai de réflexion.

 De toute façon, l'Aïd est là et la reprise du travail - ou de la grève - devra attendre que les moutons passent de vie à trépas. Dans les grandes villes, les départs festifs vers les bleds d'origine sont déjà perceptibles. L'explication viendra donc après.

 Il faut néanmoins souligner à quel point les enseignants du primaire et du secondaire ont été combatifs. Il sera difficile désormais de snober les syndicats autonomes ou d'accorder un droit de représentation unique à l'UGTA. Avec une grève fortement suivie pendant trois semaines, démonstration est faite que la démarche est contre-productive et qu'il faut accepter ces syndicats comme des partenaires sociaux dans tous les sens du terme.

 La question de la gestion des oeuvres sociales par la seule UGTA - très contestée par les syndicats autonomes et sur laquelle le gouvernement semble avoir un début d'écoute - n'est pas seulement symbolique. Ce monopole de gestion incarnait un peu trop cette «préférence politique » qui rendait purement théorique le pluralisme syndical reconnu par la loi fondamentale... L'Aïd portera conseil.

 Si les grévistes ont bénéficié, dans le contexte très particulier des ces dernières semaines, de la sympathie des Algériens, ils vont devoir tenir compte des appréhensions des parents d'élèves qui craignent que l'année scolaire ne soit définitivement perdue. Cette longue grève n'a pas été reléguée au second plan. Et pourtant, l'équipe nationale et l'engouement extraordinaire des Algériens, et notamment des jeunes, pouvaient faire concurrence. Il semble au contraire que cette situation de fébrilité générale n'ait pas desservi les grévistes et qu'elle ait incité le gouvernement à lâcher du lest.

 Pour eux, comme pour de nombreux Algériens, l'Aïd sera beau. Les joueurs de l'équipe nationale, en s'offrant une qualification dans un contexte passionnel, l'auront davantage embelli. L'étonnant comportement du système politico-médiatique égyptien, qui continue en cette veille d'Aïd à ressasser le thème, factice, de «l'indignation nationale», ne le gâchera sans doute pas au vu des commentaires pleins d'humour qu'il suscite chez les Algériens qui regardent les télévisions satellitaires.

 S'il ne faut en aucun cas accepter que l'on présente des «excuses» au régime égyptien - il ne manquerait plus que ça !, comme l'exigent les bonimenteurs de plateaux, ayons une pensée amicale et fraternelle à l'égard des citoyens égyptiens, premières victimes d'une entreprise de décérébration qui n'honore pas ses concepteurs. Saha Aïdkoum.