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Risibles élites !

par Gamal Fahmi

Brûler l'emblème national égyptien est criminel. C'est, dans le meilleur des cas, le fait de voyous, dont la place naturelle est en prison ou dans quelque centre de redressement pour jeunes délinquants. Mais riposter en brûlant l'emblème algérien n'est pas moins criminel, ni moins voyou, ni moins décadent.

 Chacun de ces deux drapeaux est le symbole d'une patrie et d'un peuple fiers. Pour chacun d'eux sont tombés de longs cortèges de martyrs ; certains dans la bataille de l'honneur, au bord du Canal (le canal de Suez, bande d'ignares !), d'autres dans les montagnes d'Algérie. La honte démente que nous vivons ces jours-ci fait certainement se retourner dans leurs tombes tous ces martyrs.

 Et puisque nous en sommes à brûler nos drapeaux de nos mains, à l'instigation des chambres d'enregistrement des responsables de nos défaites, je tiens à préciser que j'écris ces lignes pendant que le criminel Shimon Peres, le président de l'entité sioniste, pollue l'air du Caire (qui ne manque point de pollution) de son haleine raciste. Nos frères voyous, qui se sont sentis soudainement une âme de héros et ont brûlé le drapeau algérien sous bonne garde policière, se souviennent-ils que Jérusalem est en voie d'être perdue et qu'Al Aqsa est menacé à tout moment de destruction ? Se souviennent-ils qu'Israël demeure notre véritable ennemi, qui a tué (et continue de tuer sur nos frontières) des milliers d'Egyptiens, dont certains ont été ensevelis vifs sous les sables du Sinaï ? Un de ces voyous osera-t-il brûler le drapeau israélien ? Ou bien craindra-t-il de recevoir de retentissantes gifles sur la nuque, de la main du plus bas gradé CRS ?

 Nous avons aussi découvert ces derniers jours que les coeurs de certains débordaient d'amour pour Alaa Moubarak, l'aîné des fils du président (et, malheureusement, ils ne sont pas tous indignes de notre respect). J'ai été stupéfait de les entendre affirmer, sans peur ni détours, qu'ils le préféraient à son cadet, Gamal. Et pourquoi donc ? Parce que «Son excellence ne s'occupe que de business», ont-ils répondu, et que lorsqu'il a pris la parole à la télévision, il l'a fait à la manière des simples citoyens écrasés, les locataires des gradins de troisième catégorie. Mais lui a-t-il un jour traversé l'esprit de vivre l'écrasement de ces écrasés, ne serait-ce qu'une petite minute ?

 Et puisqu'il en est ainsi et que d'amour il s'agit, nos «amoureux» ne tarderont peut-être pas à exiger qu'au cadet on substitue l'aîné, et que ce dernier hérite de nous pour nous gouverner à la place de son frère: ces légendaire émeutes footballistiques n'ont-elles pas prouvé qu'il était le prince adulé des stades ? Et s'il s'avère difficile que cette transaction s'accomplisse sur le mode du simple troc, les amoureux d'Alaa, j'en suis certain, se montreront disposés à payer la différence de prix.

Risibles élites qui ont fait rire aux éclats le monde entier !!!



«Al Dostour », Le Caire, 23 novembre 2009 (Traduit de l'arabe par Yassine Temlali)