
Des manuels et fournitures scolaires proposés à la vente
dans...une quincaillerie à Tiaret, la scène psychédélique a fait jaser les
chaumières. De quoi quitter le bled en marchant sur son bouzelouf
! A l'ère de la doxa implacable des néo-opulents, il en va ainsi des peuples et
des sociétés qui se forgent les modèles qu'ils peuvent... Non mais
saperlipopette ! Le pays se met à ressembler à cet homme-chameau qui se
gausserait de la bosse des autres, tout en fixant d'un regard comme béatifié,
la bosse ramollie portée sur son propre dos ! Quoi faire pour espérer guérir le
pays de tous ses maux ? Se forcer à sourire jaune en attendant...? Se distraire
à amplifier cette histoire, racontée jusqu'au fou-rire, parlant de ce jeune
bachelier qui aurait répondu à une question de géographie en incrustant une
géniale trouvaille : « le Mexique était anciennement le pays des pastèques» !
Oui, mais où fixer ses yeux exorbités là où il n'y a plus rien à voir ? Zoomer
sur le pays, les idées croisées et le corps rabougri. Rêver d'une vie si
délavée, jusqu'à nourrir un cadavre refroidi avec un jus de banane-pamplemousse
ou condamner un pied-bot à une course olympique de demi-fond?
Oui mais le pays veut gagner le pari fou de vivre en position assise en
laissant simplement ses mains bien au chaud dans des poches pleines aux as !
Entre-temps, le peuple des petites gens passe le temps à vouloir bâtir sa
maison du bonheur, en somnolant dans la gigantesque salle d'attente... à
attendre que son pain change de goût et son eau bénite de couleur.
Arrivera-t-il le jour sans lumière de la Vérité où le
peuple se rendra compte que creuser un trou dans la terre pour y puiser un
grain miteux valait toujours mieux que risquer sa peau trouée à aller chercher
un trésor abandonné dans le ventre plat d'un squale affamé ? Mais comment un
peuple dont la terre est capable de nourrir la moitié de l'humanité peut-il
être malheureux, ya rabi
sidi ? La réponse, au-delà du poncif démoralisant du « à pays riche, peuple
pauvre», est peut-être dans le passé d'un pays privé du droit de vivre pendant
trop longtemps avec un passé qui hante les adultes et un présent qui refuse net
de prendre la peau d'une peine de bonheur à perpétuité pour les plus jeunes !
Parce qu'un peuple qui croque la vie d'une mâchoire brisée n'a pas d'autres
choix que de rêver à un monde dit «meilleur» mais ailleurs !