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Algérie-Maroc : la rupture

par R.N.

L'Algérie a rompu, hier, ses relations diplomatiques avec le Maroc en réaction notamment à la déclaration du représentant du royaume auprès des Nations-Unies en faveur de «l'autodétermination du peuple kabyle » et aussi parce que ce pays voisin abrite des bases arrières de groupes terroristes.

C'est le ministre des affaires étrangères et de la communauté nationale à l'étranger, Ramtane Lamamra qui l'a annoncé, hier, lors d'une longue conférence de presse qu'il a animée au Centre International des conférences, Abdelatif Rahal.

Le MAE l'a fait savoir en faisant lecture d'un communiqué, a-t-il dit, du président et du gouvernement. La décision des autorités algériennes de rompre les relations diplomatiques avec le Maroc est une suite logique à la récente annonce du Haut Conseil de sécurité de «réviser les relations diplomatiques » avec ce pays. « Il a été prouvé historiquement et en toute objectivité que le royaume du Maroc ne s'est pas arrêté de commettre des faits d'hostilité contre l'Algérie et ce depuis l'indépendance », dit le communiqué lu par Lamamra. Il rappellera dans ce sens « la guerre ouverte déclenchée en 1963 par le Maroc contre l'Algérie nouvellement indépendante ». Une guerre, qui, dit-il « a fait pas moins de 850 chahids algériens qui se sont sacrifiés pour la préservation de l'intégrité territoriale de notre pays ». Malgré cette guerre, continue-t-il, l'Algérie est restée fidèle à ses engagements en signant en 1972 et 1988 deux accords dont un sur le tracé des frontières « avec pour principe d'intangibilité de ce tracé(...) ». En 1976, le Maroc reprend son agressivité envers l'Algérie mais cette fois, Lamamra rappelle la décision prise en 1976 par le royaume après que l'Algérie ait reconnue la République arabe sahraouie (RASD). Le MAE continue d'évoquer des faits concrets et note qu'en 88, il y a eu normalisation des relations entre les deux pays après « les efforts déployés par le roi d'Arabie Saoudite, Fahd Ibn Abdelaziz, qui s'était investi personnellement pour faire évoluer positivement les relations entre les deux pays ».

Lamamra fait savoir que le communiqué rappelle que le 16 mai 88, l'Algérie avait décidé de normaliser ses relations avec la Maroc en se basant sur 4 points importants à savoir «la volonté de renforcer les relations de bon voisinage et ce en mettant en œuvre les conventions et accords bilatéraux conclus entre les deux pays, œuvrer pour la construction de l'Union du Maghreb Arabe (UMA), renforcer les rangs arabes en faveur de la cause palestinienne et la libération de toutes les terres arabes colonisées, et soutenir la solution finale du règlement du conflit sahraoui par la tenue du référendum d'autodétermination du peuple sahraoui, refus de l'Algérie de s'ingérer dans les affaires internes du Maroc et ce quelques soient les situations notamment s'il y a des problèmes politiques qui menacent le royaume ». Non seulement le Maroc n'a pas respecté ces engagements mais, souligne le MAE, il « mène une campagne médiatique féroce contre l'Algérie sans hésiter à faire état de scénarios déstabilisateurs et propager des rumeurs ». Lamamra affirme qu'il y a eu un fait « plus dangereux encore et irresponsable, la déclaration de son représentant à l'ONU sur son soutien à l'autodétermination du peuple kabyle, une provocation qui a atteint son paroxysme ». L'Algérie a, dit-il, demandé le 16 juillet dernier des clarifications à ce sujet mais en vain. Le Maroc a observé un silence qui prouve que le soutien de ses autorités à ce qui a été dit par son représentant à l'ONU ».

Aujourd'hui, affirme-t-il « il est clair que le royaume a enfreint ses engagements et ses principes en faveur de la normalisation de ses relations avec l'Algérie(...), le Maroc sert de base arrières à des groupes terroristes qui complotent contre l'Algérie, et son tout dernier acte criminel, les menaces proférées contre l'Algérie à partir de son sol par le ministre israélien des affaires étrangères qui était aux côtés du MAE marocain(...) ». Il rappelle que « depuis 1949, il a été décidé qu'aucun responsable ne peut proférer des menaces d'un pays arabe contre un autre(...), le Maroc a contredit tous les usages universels en vigueur en faisant preuve d'une forte hostilité envers l'Algérie(...) et en permettant à des forces étrangères de la menacer à partir de son sol(...) ». Le Maroc a ainsi prouvé, dit le MAE qu'il coopère avec le MAK et RACHAD qui sont derrière les crimes commis récemment en Algérie (feux de forêts et assassinat de Djamel Bensamaïl) ». En parallèle, ajoute-t-il, « les services marocains ont eu recours à Pegasus, une technologie israélienne pour espionner des responsables algériens ». D'autres rappels d'hostilité « l'institution en 94 du visa marocain aux Algériens après avoir accusé l'Algérie d'être derrière l'attentat terroriste perpétré à Marrakech qui s'est avéré avoir été commis par un réseau marocain et étranger(...) ».

Le 20 novembre 2013, continue de rappeler le MAE, l'enceinte du Consulat algérien à Rabat, a été violée par un marocain (...) qui a écopé de deux mois de prison avec sursis pour le motif d'inculpation violation d'une propriété privée ». Le Maroc, affirme-t-il, « a détruit toute possibilité de confiance (...), il est responsable des crises les unes après les autres(...) ». Face «à cette position d'adversité officielle, l'Algérie refuse de se plier à tous ces faits qu'elle condamne fermement ainsi qu'à ces politiques unilatérales et leurs conséquences désastreuses sur toute la région(...) ».

Pour toutes ces raisons, dit Lamamra et ce qui a été annoncé, « à partir d'aujourd'hui (hier ndlr), l'Algérie rompt ses relations diplomatiques avec le Maroc».

Le MAE a répondu, hier, à de nombreuses questions relatives ou conséquentes à cette décision ainsi qu'à toutes celles relatives aux conflits qui secouent la région et le monde arabe, la crise en Tunisie, la Libye, le Mali, le conflit entre l'Egypte, l'Ethiopie et le Soudan, la RASD, la Palestine occupée, et plus l'Afghanistan, la réforme de la ligue des Etats arabes(...). Nous reviendrons dans nos prochaines éditions.