Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

Une nuit au Musée Picasso à Paris: Kamel Daoud... face-à-face avec l'artiste peintre

par Mokhtaria Bensaâd

  Invité à passer une nuit au Musée ?Picasso' à Paris, l'écrivain et chroniqueur Kamel Daoud s'est livré à un face à face, avec le peintre à travers ses toiles tout en se mettant dans la peau d'un enfant qui découvre pour la première fois l'image. Ce rapport avec l'image, qui jusque-là a été flou et parfois conflictuel pour l'écrivain et qui a essayé, lors de sa confrontation avec Picasso, au musée, de se réconcilier avec cette image. Présent à l'Institut français, mercredi dernier, pour parler de son nouvel ouvrage ?Picasso, le peintre dévorant la femme', Kamel Daoud a expliqué que l'idée de base de cette expérience au musée pour les écrivains qui ont été appelé à la tenter est de sortir des textes de spécialistes et de produire des textes qui soient lus par tout le monde. « J'avais envie », dira-t-il, « de faire un texte de ce genre, sortir du roman, du récit et de la chronique et faire quelque chose qui participe à la construction de ce que je veux transmettre, à l'imaginaire et ma façon de voir aussi. J'étais aussi obsédé par notre rapport à l'image. Pourquoi nous n'aimons pas l'image? Pourquoi nous nous sentons blessé par la caricature, par l'image? ».

Pour le journaliste et écrivain, « le musée est visité par tout le monde et donc l'idée est d'avoir un regard rafraîchi sur le tableau. Des regards qui drainent à la fois la subjectivité, une non spécialisation et une sorte de regard de profane sur la chose artistique ». Kamel Daoud reste convaincu, cependant, que les artistes ne meurent pas. Ils restent vivants à travers leurs chefs-d'œuvre. Tel qu'il le raconte dans son livre, dans le chapitre « la pause pierre », l'invité du Musée de Picasso, souligne que « chaque fois, on dit : Picasso était... Je n'arrive plus à croire à la mort des gens. Picasso EST, je pouvais le voir en scrutant ses toiles, mais aussi l'empreinte de leur matière, ce rugueux coup de pinceau qui procède du muscle et de l'humeur, cet éparpillement de son corps dans des toiles et des sculptures. Pourquoi dit-on que cet homme est mort alors qu'il a justement réussi à s ?en préserver? ». A sa sortie du musée, Kamel Daoud a tiré des leçons de cette visite qui a coïncidé avec l'exposition ?l'année érotique de Picasso' en 1932. Il a expliqué que « J'étais face à Picasso. J'ai refusé d'y aller avec de la lecture. Je voulais y aller avec cette sorte d'anticipation angoissée que j'ai, quand j'écris des chroniques ou des romans. Je ne sais pas exactement ce que je vais écrire. Le poids du lieu, le palais est assez imposant, les toiles sont là, Elles vous interpellent, elles vous imposent une fabrication du sens ». Il a ajouté, « J'ai compris une première leçon. Lorsqu'on est face à Picasso ou un autre peintre, c'est d'abord une subjectivité qui se développe. On crée toujours du sens. Et finalement, le talent devient le miroir de l'intime. Donc, c'est une occasion d'exposer et d'explorer sa propre subjectivité. Donc, je voulais écrire un essai d'opinion, une sorte de subjectivité. Je ne voulais pas un livre de conclusion mais un livre de promenade.»