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Quel monde en 2018 ?

par Pierre Morville

« Quel monde en 2018 ? » : la revue française Alternatives économiques a consacré sur cette interrogation un numéro hors-série. Quelques-uns des sujets traités.

L'année 2017 est tout d'abord rapidement traitée par une sélection de douze évènements, un par mois. Parmi ces rappels : le 29 mars, Theresa May, le Premier ministre britannique lance la procédure de retrait de son pays de l'union européenne. Elle perd par ailleurs la majorité absolue aux élections du 8 juin et doit former un gouvernement de coalition.    

Avril : le 16 avril, Recep Erdogan organise un référendum destiné à lui donner les pleins pouvoirs dans un régime qui devient présidentiel autoritaire. Une courte majorité d'électeurs turcs (51,14%) lui donnent raison.

Juin : la barre de deux milliards d'utilisateurs de Facebook a été franchie le 27 juin.           

Chacun de ses utilisateurs rapportent 28 dollars à Mark Zuckerberg, son créateur.

En juin, après Mao et Deng Xioping, le nouveau leader, XI Jinping, voit sa pensée inscrite dans la charte du Parti communiste chinois. Son objectif ?      Hisser la Chine au 1er rang du monde d'ici à 2049.

Décembre : en violation des résolutions de l'Onu et « au risque de mettre le feu au Moyen-Orient », note la revue Alternatives économiques, Donald Trump décide de reconnaître Jérusalem comme capitale d'Israël et y transfert l'ambassade américaine.

Dans l'éditorial du hors-série, le journaliste Yann Mens rappelle que la scène internationale est animé par « deux dangereux parieurs » : Donald Trump et Mohammed Ben Salman. Le Président américain menace régulièrement la Corée du Nord de l'usage de la force militaire américaine « il fait voler des bombardiers tout près des côtes coréennes pour envoyer un message clair à ce pays. Il prend le risque qu'un incident, une simple erreur de pilotage, provoque une réaction disproportionnée » de l'adversaire coréen qui dispose dorénavant de missiles qui frapperaient tout d'abord la Corée du Sud. Comme Donald Trump, le nouveau dirigeant de l'Arabie Saoudite Mohamed ben Salman « est inquiet, mais ce sont les ambitions régionales de l'Iran qu'il craint. Et cette peur le pousse à passer à l'attaque de façon systématique, désordonnée ». Mais « il n'envoie pas de troupes au sol au Yémen par exemple, il se contente de frapper du ciel des objectifs militaires et souvent aussi civils » note l'éditorialiste qui craint une escalade incontrôlée en cas de riposte de l'Iran.

En une cinquantaine d'articles, la revue dresse une synthèse souvent inquiétante de la situation mondiale en 2018. Sur le plan économique, le risque le plus grand serait une réplique, dix ans plus tard, de la crise de 2007/2008. « La scène financière globale n'est pas foncièrement différente de ce qu'elle était avant la crise. Et surtout, aucune réforme d'envergure n'a été engagée sur le plan économique et social, alors même que la fracture sociale ne cesse de s'aggraver et que le pouvoir monopoliste des géants du Net devient étouffant » note Jacques Adda.      

L'économiste pointe notamment parmi les signes les plus inquiétants : l'augmentation de la dette mondiale « au lieu de se résorber, elle a continué à s'accroître passant de 269% du produit intérieur brut (PIB) mondial fin 2007 à 327% au 1er trimestre 2017 », une progression presque deux fois plus rapide qu'entre 2000 et 2007. Nouveau champion mondial de l'endettement, la Chine.         

Autre signe dangereux souligné par Jacques Adda, les progrès insuffisants de la régulation financière : ce sont « les lendemains qui déchantent » sur le plan de la coopération internationale qui s'était décidée au lendemain de la crise de 2007/2008, c'est le retour « au chacun pour soi et une montée des tensions économiques internationales sous l'effet de l'exacerbation de la rivalité sino-américaine ».

Le Brexit, la sortie de la Grande-Bretagne de l'UE ou le retrait des Etats-Unis de l'accord de partenariat transpacifique (TPP) en sont d'autres indices. Dernière tendance problématique, « le fondamentalisme libéral n'a pas tardé à relever la tête » limitant voire interdisant l'intervention des états sur la situation économique et sociale.

Au résultat, « des société coupées en deux (sur le plan social) et une passivité inquiétante par rapport aux grands défis contemporains dans les domaines de la mutation du travail, des droits sociaux, de la concurrence et de la fiscalité, pour ne citer que ceux-là » conclut Jacques Adda.

Un Maghreb en difficulté

La situation de toutes les grandes régions mondiale est analysée par le hors-série. Concernant le Maghreb, avant même les manifestations qui viennent de se dérouler en Tunisie, la revue d'Alternatives économiques » avait détecté des « inégalités régionales explosives » : « le sentiment d'être abandonné par le pouvoir central soude les populations de l'intérieur.

Et les élites locales sont souvent, elles aussi, discréditées car accusées de corruption et de faire profiter leur clientèle de fonds publics théoriquement destinés au développement régional ». D'où le risque d'une montée du terrorisme islamique, selon la revue.

Six ans après la chute de Kadhafi, « la Libye est divisée en deux et en proie à l'anarchie. Pour assumer la stabilité du pays, l'Onu voudrait un compromis entre belligérants. Mais chaque camp est lui-même traversé de clivages » rapporte Luiz Martinez qui souligne que deux gouvernements existent l'un siégeant à Tripoli et l'autre à Tobrouk, « chacun disposant de forces militaires plus ou moins éparses ».       

L'implantation de l'Etat islamique en juin 2015 a fortement inquiété les pays européens déjà très soucieux de l'arrivée massive de migrants subsahariens passant par la Libye : « l'anarchie a également favorisé l'implantation de milices mafieuses qui, du littoral aux confins du Sahara, font du trafic d'êtres humains, notamment des migrants mais aussi d'armes, de drogues et d'essence ». Sur la situation au Maroc, la revue pointe également des inégalités de développement entre les régions et « une inertie » des pouvoirs publics face à la montée des inégalités sociales, compliquée par une dualité des pouvoirs entre le roi et le Premier ministre. Seul regret sur ce hors-série, l'Algérie n'a fait l'objet d'aucun article.