
Et si le plus grand ennemi de Bouteflika était Bouteflika.
Pas lui, ni son reflet dans un miroir du Val-de-Grâce, ni son frère à qui on
concède une autorité à la «Père Joseph», le fameux conseiller occulte de
Richelieu, alors Premier ministre de Louis XIII. Mais c'est son entourage qui
le plombe. Ceux censés le représenter et le faire élire. A écouter et lire
toutes les inepties débitées à longueur de temps et d'ondes par ces
pseudo-partisans d'un quatrième mandat présidentiel, on a vite l'impression
d'étouffer sous un torrent de mensonges les uns plus grands que les autres. Et
la première victime reste l'image d'un homme candidat largement écornée par
deux mandats de trop. Il ne se passe pas un jour sans que les Algériens ne
soient carrément agressés par des sorties impromptues et à l'emporte-pièce
d'illustres inconnus sur la scène politique nationale qui envoient tantôt
Bouteflika sur la lune pour marcher sur les pas d'Armstrong, l'astronaute pas
le junkie jaune, ou qui disent qu'ils l'ont vu voler à côté de Superman
au-dessus de Ghardaïa. Il y a même ceux qui affirment que c'est lui, au sortir
de son lit d'hôpital, qui a confectionné la nouvelle constitution tunisienne.
Véridique. Cela s'est passé lors d'un meeting à Hammam-Bouhadjar, dans la
wilaya de Aïn-Témouchent, l'œil de la louve pour les berbérophones, et c'est un
membre du conseil de la nation, issu du RND, qui l'a déclaré. Et l'autre qui
parle d'un choix divin loin de nos prétentions terrestres à nous pauvres
mortels. Et des perles, il y en a eu à enfiler le long des discours officiels entendus
lors de cette première semaine d'une campagne indolente ou encore d'autres
quidams sortis de l'anonymat algérien le temps de dire et de s'effacer. Côté
déclarations, il n'y a pas que dans le camp de Bouteflika que l'on va à la
pêche, mais également du côté des autres candidats à El-Mouradia où les
promesses d'une Algérie meilleure et plus prospère avec des yeux bleus et des
cheveux blonds platine foisonnant. Benflis qui dit qu'il a la solution miracle
à la crise de Ghardaïa dans la poche, mais ne la livrera que s'il est élu
président, sinon elle peut se noyer dans le sang de ses fils. Abdelaziz Belaïd
qui veut faire de l'Algérie le Japon de l'Afrique et qui se revendique
filialement de Boumediene. Louisa Hanoune qui dénonce et la visite de John
Kerry et celle de l'Emir du Qatar en Algérie, comme si elle ne savait pas que
la politique intérieure du pays était dictée de l'extérieur. Elle qui s'attaque
à Benflis et aux islamistes absents, à la guerre des étoiles et à Choubaka, à
Washington et à Chakib Khelil.
Elle promet comme tous les autres une justice sociale, un
partage plus équitable des richesses du ventre de l'Algérie, du boulot pour
tous et une fiancée pour les célibataires d'en bas. En deux mots, comme en
quinze chroniques ou mille discours électoraux, les candidats peuvent promettre
ce qu'ils veulent, tant que c'est gratuit et qu'ils ne payent rien même pas
l'électricité de la salle allouée. Mais même s'ils nous envoient au paradis à
dos de phrases et de mots volés à la bouche des Algériens, même s'ils nous
vendent du rêve à l'œil et du vent à emporter, le peuple leur a déjà tourné le
dos.