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Parce qu'il faut bien remplir le vide !

par El-Houari Dilmi

Qu'il s'agisse de va-cance, de vacuité ou de vacances, faut-il toujours se méfier de laisser du vide, parce que les gens le remplissent, peu importe avec qui et quoi ! Hier encore, après un congé «longue durée», nos édiles nationaux ont regagné le Palais Zighout Youcef, en l'absence de Ould Khelifa, «officieusement» pour raison de santé. Dans les travées «feutrées» de la chambre basse du Parlement, d'aucuns ont encore un incroyable toupet de déclamer, à la cantonade, qu' «une démocratie digne de ce nom passe par un Parlement où les députés jouissent, pleinement, de leurs prérogatives». Mais pourquoi un réveil aussi brusque à la réalité algérienne, au moment où le landerneau politique, presque au grand complet, est comme aphasique, face à l'importance cruciale des enjeux en cours ? Clé de voûte dans l'armature de toute organisation politique d'essence républicaine, les pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire, si aucun de ces trois organes «peu souverains» n'est pleinement investi de ses prérogatives à cause de la «nature» même du «modèle» politique algérien, où le respect de la loi reste à consacrer, force est de constater que durant toutes les mandatures passées, le Parlement n'a jamais réussi à se départir de ce rôle de «croupion», propre aux systèmes rétifs à «l'autre» et au débat d'idées contradictoires. Contrôler le travail de l'exécutif, interpeller des ministres sur des questions engageant l'avenir de la nation, voter une motion de défiance, ou jouir de la «capacité» à sanctionner le gouvernement en cas de dérive, ne font pas encore partie des «très spéciales» us et coutumes politiques algériennes.

A aucun moment dans les annales politiques algériennes, l'on ne se souvient d'un débat général, franc et ouvert au Parlement : la preuve en est que les lois votées ont toujours été «d'inspiration présidentielle», ou de son prolongement qu'est l'appareil exécutif, c'est-à-dire la chefferie du gouvernement.

Elue au suffrage universel direct, l'APN n'a les mains libres ni vis-à-vis du pouvoir exécutif en place, ni encore moins face à sa raison d'être, c'est-à-dire l'électorat, autrement dit le contribuable. Que dire encore de cette autre institution parlementaire, élue, elle, au suffrage universel indirect, se limitant dans un rôle de «faire-valoir» de ce qui est pensé et décidé ailleurs... Le cas «d'école» algérien est d'ailleurs si «atypique» que la primature au gouvernement est confiée «sans coup férir» à un homme politique, loin des chapelles politiques traditionnelles, ni encore moins issu des rangs de la majorité parlementaire, comme cela se fait sous d'autres cieux plus «éclairés». Mais le triplement de la solde de nos édiles nationaux (un pied de nez au peule des fauchés !) n'est-il pas fait justement pour «camisoler» le député dans le strapontin de simple «employé col blanc», et le (s) pouvoir (s) en place dans le rôle d'«employeur», disposé(s), à chaque fois que l'exigent les péripéties politiques, à lâcher du lest pour mieux se prémunir contre les retours de manivelle, fussent-ils «à blanc». Le recours, (au-delà de son bien-fondé ou non), à légiférer par ordonnance (au demeurant une prérogative constitutionnelle du chef de l'Etat), ne justifie-t-il pas ce sentiment tenace que le Parlement est toujours une sorte de «machin» pour passer à côté de son destin, celui de servir de véritable poumon à la démocratie, et du coup, consacrer la fonction, ô combien vitale, de contrôle, au sens plein du mot, et de contre-pouvoir à toute forme de dérive autocratique ?!