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Le changement dans la continuité, l'utopie du pouvoir

par Kharroubi Habib

Le 8 Mars, Journée internationale de la femme, Bouteflika a fait savoir que des changements politiques vont intervenir dans le pays. Depuis, c'est le silence qui règne du côté officiel sur la question. C'est par contre l'emballement dans celui du microcosme politique, où se sont échafaudés des projets qui se veulent alternatifs à la démarche de changements politiques concoctés par le seul pouvoir.

 L'opposition, dans son ensemble, cultive l'a priori que ce pouvoir est incapable de procéder à des changements dont l'exigence est requise par la nature de la crise politique dans laquelle le pays se débat. Elle n'a pas tort et ce ne sont pas les «réflexions» formulées sur le sujet par des personnalités appartenant à l'Alliance présidentielle qui entameront sa certitude. «Ces «réflexions» ne reflètent nullement des opinions personnelles. Elles expriment sans aucun doute la philosophie dans laquelle baigne l'intention du changement à laquelle le Président et sa majorité politique se sont convertis.

 Belkhadem a été récemment le plus clairement explicite sur le sujet en estimant que «le changement doit se faire dans la continuité». Plus qu'un voeu qu'il aurait exprimé en tant que responsable du FLN, Belkhadem a, nous semble-t-il, émis avec son propos un message de fin de non-recevoir aux initiatives lancées par des personnalités et des partis de l'opposition proposant les changements à opérer et les processus à déclencher pour y parvenir.

 Le pouvoir n'a aucunement l'intention d'associer d'autres parties à la définition des changements que Bouteflika a promis de réaliser. Il est d'autant résolu à en être le seul promoteur qu'il ne voit pas dans l'opposition politique, telle qu'elle se décline sur le terrain, comme une force susceptible de lui poser problème. Le « changement dans la continuité » n'est pas une option que Belkhadem a sortie de son propre chef. Rappelons qu'elle a constitué le fondement du discours électoral de Bouteflika en 2009.

 Du changement donc, Bouteflika va en toute certitude en annoncer. Mais certainement pas comme l'opposition politique voudrait que cela soit. Et surtout pas celui qui consisterait à faire rupture avec le système en place depuis 1962. Mais si l'opposition n'est pas effectivement en mesure de lui imposer une démarche plus radicale, cela ne veut pas dire que Bouteflika va réussir à faire passer les changements dont on le crédite pour la solution à la crise politique que connaît le pays.

 Comme dans le reste du monde arabe, le peuple algérien est en demande d'un changement politique qui ne soit pas simple fardage du système qui l'a conduit à la désespérance. Tout comme ailleurs dans ce monde arabe où la rue est en révolte, en Algérie, ce que son Président va enfin octroyer en guise de concession aux revendications populaires risque de s'avérer dépassé et totalement à côté de la plaque eu égard à celles-ci.

 En apparence pour l'heure, la contestation populaire est surtout d'ordre social en Algérie. La multitude de grèves, sit-in et autres manifestations sont pour la plupart dans ce registre. Il suffirait pourtant que la nature des changements promis déçoive pour qu'à son tour le pays connaisse l'embrasement qui est l'œuvre dans d'autres Etats du monde arabe.

 Et c'est alors que le pouvoir vérifiera la faute commise de ne pas avoir pris en compte les propositions de cette opposition d'aller vers un changement pacifique mais radical du système.