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Blanchiment d'argent : Les professions non financières appelées à s'impliquer

par M. Aziza

Trois affaires relatives au blanchiment d'argent ont été transmises, durant l'année 2012, par la cellule de traitement du renseignement financier (CTRF) dépendant du ministère des Finances, à la justice.

La cellule a également procédé au blocage de l'exécution de trois opérations bancaires, pour une durée de 72 heures, au cours de la même année.

Le président de la CTRF, Hibouche Abdenour a précisé, jeudi dernier, lors d'une conférence de presse, tenue au siège du département de Karim Djoudi, que 3.188 déclarations de soupçon de blanchiment d'argent ont été adressées à la cellule, entre 2007 et fin 2011. Et d'ajouter que 7 dossiers, supposés être des affaires de blanchiment d'argent, ont été transmis à la justice.

Au-delà de ces chiffres, le conférencier a fait remarquer que la quasi-totalité des déclarations de soupçon de blanchiment d'argent proviennent des institutions financières, notamment des banques. Il regrette le fait que les entreprises et les professions non financières ne s'impliquent pas dans la lutte contre le blanchiment d'argent. «Aucune déclaration n'est arrivée de la part de personnes physiques ou morales non financières», dira-t-il. Et de poursuivre «pourtant les notaires, les avocats , les commissaires aux comptes, les huissiers de justice, les commissionnaires en douane, les concessionnaires automobiles et les agents immobiliers sont obligés de le faire», a-t-il insisté. Il explique que : «l'ordonnance n° 12-02, du 13 février 2012, oblige les banques et les institutions financières ainsi que toutes les personnes physiques et morales, réalisant des transactions financières, au profit de clients, à une vigilance accrue, à un rôle de veille agissant, faute de quoi elles se rendent complices, voire aussi responsables d'actes relevant de blanchiment d'argent ou de financement du terrorisme qui seraient alors commis et auxquels elles ne se seraient pas éveillées ou omis de signaler». Autrement dit, les institutions financières, les entreprises et les professions non financières, ont l'obligation de faire la déclaration de soupçon, ou leur responsabilité est pleinement engagée, en matière de blanchiment d'argent.

Pour remettre les pendules à l'heure, le président de la CTRF a annoncé la programmation de rencontres entre les services de sa cellule et les représentants des institutions, entreprises, et professions non financières, au cours de cette année (2013), pour les sensibiliser sur la lutte contre le blanchiment d'argent et leur rappeler les dispositions de l'ordonnancé du 13 février 2012. Interrogé sur le grand décalage qui existe entre le nombre des affaires transmises à la justice et celui des déclarations de soupçons (7 affaires transmises à la justice contre 3.188 déclarations de soupçon de blanchiment d'argent de 2007 à 2011), Hibouche Abdenour a expliqué cet écart par certaines carences dans les banques. Selon lui «ces institutions financières font des déclarations systématiques, dès qu'elles jugent que les dépôts ou les transactions sont douteuses».

Et d'ajouter «la CTRF se prononce uniquement sur les affaires de blanchiment, ce qui nous intéresse, ce sont les déclarations de qualité et non la quantité» a-t-il souligné, en évoquant la programmation de formation ciblée au profit du personnel des banques, pour ceux qui gèrent ces dossiers.

Sollicité par la presse pour donner quelques pistes sur les secteurs les plus touchés par le blanchiment d'argent, le président de la cellule de renseignement s'est montré réservé, quant à la divulgation de la nature des affaires, des personnes physiques et morales concernées. «On ne peut pas dévoiler les dossiers qu'on traite», a-t-il précisé. Il dira encore «ce ne sont pas les secteurs qui sont incriminés ou le montant de l'argent blanchi qui nous intéresse, c'est bien l'infraction elle-même qui est la plus importante pour nous, autrement dit comment arriver à cerner une affaire de blanchiment d'argent».

Interrogé sur le scandale du groupe pétrolier Sonatrach et si la cellule a été sollicitée pour fournir des renseignements sur des transactions et des données douteuses, le 1er responsable de la cellule s'est montré catégorique. «La cellule n'a aucune relation avec ces dossiers ou ces affaires de corruption, citées dans la presse». Et d'ajouter «qu'il existe des organes spécialisés dans la lutte contre la corruption». Le conférencier a cité «l'Office de répression de la corruption, les services de Sécurité et la Justice s'occupent de ces dossiers». Il poursuit: «d'ailleurs, même ces organes ne peuvent, en aucun cas, fournir des informations sur ce dossier puisqu'il s'agit d'une affaire qui est déjà portée devant la justice, il y a le secret de l'instruction et personne n'a le droit de violer ce secret».