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L'insécurité routière en Algérie: Le tour de vis de Said Sayoud
par Cherif Ali* Près
de 800 bus ont été impliqués dans des accidents au cours d'une période de 10
mois : dans 58% des accidents, l'excès de vitesse est le facteur principal,
souvent en raison de pressions économiques exercées sur les conducteurs pour
maximiser le nombre de trajets.
La vétusté du parc de véhicules est une autre cause majeure, avec des rapports indiquant que jusqu'à 70% des engins en circulation sont anciens. Des facteurs humains, tels que l'inattention des conducteurs (utilisation de téléphones portables) et le non-respect du code de la route, sont également souvent cités. Les ralentisseurs posés sur les routes nationales et urbaines, sont également pointés du doigt : - Les installations ne respectent pas les dimensions et matériaux standards. - Les dispositifs sont construits, hors de toutes normes de manière aléatoire ou improvisée. Et le carnage continue dans une totale indifférence : un grave accident de la circulation, est survenu sur la route nationale reliant Béchar à Tindouf ; il a fait au moins 14 morts et 34 blessés. Le bus a dérapé avant de se renverser. Ce ne sont plus des accidents, mais un véritable terrorisme routier! A croire qu'on a plus de chance de mourir dans un accident de la route que du coronavirus ou tout autre virus. Des chiffres effarants qui témoignent de l'ampleur du drame répété et quotidien qui se déroule sur nos routes. Cet autre visage de l'incivisme a valu à l'Algérie d'être classée quatrième dans le classement établi par la Banque mondiale qui concerne le taux de mortalité pour 100.000 habitants à cause des accidents de la route. Ces statistiques concernent toutefois l'année 2019. Ce bilan macabre qui affiche des milliers de morts, sans compter le nombre effarant de blessés, ne semble pas atteindre la conscience des législateurs et autres responsables de la réglementation routière. Les accidents de la route demeurent l'une des principales causes de décès et de traumatismes à l'échelle mondiale. Chaque année, des millions de vies sont perdues et d'innombrables autres sont altérées de façon irréversible par ces événements tragiques. Malgré les efforts déployés pour améliorer la sécurité routière, les accidents persistent, soulignant ainsi la nécessité d'une action concertée et proactive pour inverser cette tendance. Divers facteurs, comme on l'a signalé supra, contribuent à la survenue des accidents de la route, parmi lesquels la vitesse excessive, la conduite sous l'influence de l'alcool ou de drogues, la distraction au volant et le non-respect des règles de circulation. De plus, les déficiences des infrastructures routières et les défaillances des véhicules jouent un rôle significatif dans la genèse de ces incidents. Les pouvoirs publics, au lieu de briser cette spirale infernale des accidents de la route, se perdent en conjectures et placent le débat sur l'opportunité du permis de conduire à points. Pire, note un éditorialiste, on réfléchit sur la nécessité d'augmenter les tarifs de contrôle technique et de certaines vignettes, plaçant ainsi l'esprit mercantile avant la sécurité des usagers de la route. Loin d'être, toutefois, un problème algérien, les accidents de la route sont un véritable fléau planétaire. D'après l'OMS, ce sont près de 1,4 million de personnes qui trouvent la mort tous les ans sur les routes. L'insécurité routière est même devenue la 8e cause de mortalité dans le monde. Elle est, surtout, la première cause de décès des jeunes de 15 à 21 ans et 1 enfant serait tué toutes les trois minutes. Les Nations unies ne sont pas restées sourdes face à ce macabre constat et ont lancé dès 2011 « une décennie d'actions pour la sécurité routière », avec l'objectif de préserver la vie de 5 millions de personnes sur les routes du monde entier. Le renforcement de la prévention routière s'avère être une mission compliquée, puisqu'une telle politique implique la participation de différentes institutions sans compter les forces de police et de gendarmerie nationales, et également la société civile. Chez nous, les spots publicitaires ont inondé l'antenne pour appeler à la prudence et au respect du code de la route; ce qui a conféré à l'opération, selon certains Algériens sceptiques, un sentiment de déjà-vu et de déjà entendu ! Une campagne chasse l'autre, dont il n'est resté que quelques messages qui auront tourné en boucle dans la routine de notre quotidien. Toutes ces campagnes ont démontré que dans l'esprit des personnes interrogées, ces campagnes successives renvoient plus à « l'inéluctable qu'à la prévention » et que le problème est chez les autres ! L'heure n'est plus au constat et certains doutent encore de l'efficacité des campagnes de sensibilisation qui se répètent sans infléchir pour autant la courbe des victimes. Certains experts estiment pourtant, que « le rôle des médias est nécessaire et la radio a tous les attributs de proximité et de rapidité pour être l'acteur de cette campagne qui aura l'avantage et le mérite d'accompagner les conducteurs algériens sur les routes et les autoroutes, en diffusant au quotidien des messages de sagesse, de retenue, de respect du code de la route et surtout de la vie humaine». Ils affirment toutefois que «si le rôle des médias est nécessaire, il y va s'en dire qu'à elle toute seule, la communication n'arrêtera pas, à coup de spots publicitaires, les accidents de la route». Il n'en reste pas moins que la mort est présente sur nos routes à chaque virage : On perd la vie par fatalité. Par imprudence surtout ! Donc, chaque année, des personnes meurent sur les routes et des milliers d'autres sont blessées à divers degrés. Et les conséquences sont profondément dévastatrices, affectant à la fois les individus et les communautés dans leur ensemble. Outre les pertes en vies humaines, ces accidents entraînent des blessures graves, des incapacités permanentes et des souffrances psychologiques considérables pour les survivants et leurs proches. Sur le plan économique, les coûts associés aux soins médicaux, à la réparation des véhicules et aux pertes de productivité sont astronomiques, pesant lourdement sur les systèmes de santé et les économies nationales. Les autorités donnent l'impression d'avoir intégré cette situation même si elles réaffirment, chaque année, leur volonté d'éradiquer le phénomène. La réalité des chiffres reste implacable. Les automobilistes sont livrés à eux-mêmes. La route, c'est une jungle goudronnée où certains chauffards se permettent des pointes de vitesse à plus de 200 km/heure ! S'agissant de la « Délégation nationale de prévention et de sécurité routière », il faut dire qu'il ne s'agit pas d'une trouvaille algérienne dès lors où la délégation proposée s'inspire de ce qui existe déjà par ailleurs, en France, et qui est dénommée : « Délégation à la prévention et la sécurité routières », à la différence que cette instance donne la priorité au volet répressif de la sécurité routière, car le ministère de l'Intérieur français est l'un des acteurs historiques majeurs de la sécurité routière et les récentes réformes administratives ont renforcé ses responsabilités en la matière : avec le rattachement de la Gendarmerie nationale au ministère de l'Intérieur, il a autorité directe sur les deux forces chargées de faire respecter les règles de la sécurité routière : police et gendarmerie. Ce rapprochement lui permet de renforcer la cohérence de la lutte contre l'insécurité routière qu'il mène sur le terrain. En comparaison, comme chacun le sait, si la police nationale relève de l'autorité du ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales, la gendarmerie ou « Darak El Watani » comme elle est appelée officiellement, relève de la tutelle du ministère de la Défense nationale. L'on retient tout de même la bonne volonté des autorités qui semblent, cette fois-ci, avoir intégré cette question de la violence routière, question cruciale au demeurant, qui a amené de par le monde, des hommes d'Etat à s'en saisir dès leur investiture. Jacques Chirac, par exemple, qui, peu après sa réélection en 2002, a inscrit dans son programme « la sécurité routière » comme l'un des trois chantiers prioritaires de son nouveau quinquennat avec deux autres thèmes plus consensuels : « la lutte contre le cancer » et « l'insertion des handicapés » ! Et son Premier ministre d'alors, Jean Pierre Raffarin, avait affirmé, pour sa part, « qu'on ne peut plus parler de l'insécurité routière avec des mots qui montent, mais avec les vrais mots, les mots de violence, de délinquance, les mots, quelquefois, d'assassinats » ! De ce qui précède, on ne doit plus, désormais, se contenter d'une campagne ponctuelle et se dire qu'on a fait le boulot ! L'action de sensibilisation aux dangers de la route doit se prolonger dans le temps : 1. Pour devenir, par exemple, un « thème d'action et de communication privilégié » pour les walis et les maires ! 2. Elle doit aussi donner naissance à un « continuum éducatif » qui doit être mis en place et enseigné à l'école primaire en passant par le collège et le lycée ! Pour mémoire, lors d'une réunion du Conseil des ministres en 2022, il avait souligné que les accidents de la route exigeaient «une solution coercitive» compte tenu des proportions qu'a prises ce phénomène «récemment», préconisant «l'application peines les plus lourdes pour les cas de non-respect avéré du code de la route, une infraction qualifiée de crime, ainsi que le contrôle technique des véhicules de transport chaque trois mois». Il avait, par la même occasion, mis l'accent sur «le renforcement du contrôle sur les sociétés de transport par bus, à travers l'impérative rotation des conducteurs pour les longs trajets et le retrait du registre du commerce aux sociétés contrevenantes, outre l'application des peines les plus lourdes à l'encontre des parties impliquées dans la délivrance de permis de conduire aux candidats non qualifiés». Des recommandations à même de nous faire quitter le podium, aussi infâme que dramatique, des «champions du monde des accidents de la route » ! Et le Ministre de l'Intérieur, des Collectivités locales et des Transports, Said Sayoud, conscient du danger, a pris à bras le corps le problème, en s'impliquant personnellement dans le nouveau projet de code de la route qui prévoit l'instauration possible d'un permis à points. Et pas que ! Ainsi,des sanctions amendes, peines sont durcies, en particulier pour les infractions graves : excès de vitesse, non respect des signalisations, usage du téléphone, non-port du casque / feux / distance de sécurité, transport d'enfants sans protection, etc. Le projet inclut aussi des peines plus sévères pour des accidents causés par négligence : pour homicide involontaire, blessures graves, ou fuite après accident. Le contrôle technique des véhicules sera renforcé, avec des agents assermentés et des vérifications plus strictes pour lutter contre les fraudes et falsifications. Rappelons que le projet de Code de la route s'inscrit dans la feuille de route fixée par le Abdelmadjid Tebboune, dans un contexte d'augmentation des accidents de la route. L'objectif déclaré est de « mettre fin à l'hécatombe routière », en renforçant l'arsenal législatif, les contrôles et la responsabilité des conducteurs. Le nouveau texte aborde tous les maillons de la chaîne : les conducteurs, les véhicules, les auto-écoles, les infrastructures, les mécanismes de contrôle pour une réforme globale Conclusion Face à cette hécatombe routière qui endeuille chaque jour des familles algériennes, le ministre de l'Intérieur, des Collectivités locales et des Transports, Said Sayoud, affirme une volonté politique ferme : mettre fin au fléau de l'insécurité routière. Son action s'inscrit dans une approche globale, fondée sur le renforcement de la répression des comportements dangereux, la modernisation du cadre législatif, le durcissement des sanctions, la rigueur du contrôle technique, ainsi que la responsabilisation des conducteurs et des opérateurs de transport. En donnant un véritable tour de vis au nouveau Code de la route, Said Sayoud affiche l'objectif clair de briser la spirale des accidents mortels, de restaurer l'autorité de l'État sur la route et de protéger, avant tout, la vie des citoyens. C'est un chantier immense, mais indispensable, pour sortir définitivement l'Algérie du triste classement des pays les plus touchés par la violence routière. *Ancien Cadre Supérieur de l'État | |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||