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France, dette et amnésie: De Versailles à Alger, le grand tour de passe-passe fiscal

par S. L

Depuis trois siècles, la France maîtrise l'art du trou financier comme on cultive un vignoble : avec passion, excès et surtout beaucoup de « ça passera bien ». De Louis XVI qui jouait au Monopoly avec le trésor royal, aux députés macronistes qui veulent rouvrir des comptes millénaires, Paris donne dans le grand spectacle du déficit, avec comme invités d'honneur : oubli sélectif et mauvaise foi historique. Remontez les manches, la partie d'échecs commence... et c'est vous qui allez payer. Avant 1830 : la France, reine du découvert et du gueuleton royal .Louis XIV, ce bon vivant, dépensait sans compter - et surtout sans rembourser. Les banquiers européens avaient les poches pleines grâce à ses festins, guerres et perruques empesées.

Louis XV, héritier des dettes et des folies, invente la carte de crédit royale... pour ses maîtresses et ses campagnes ratées. Louis XVI rejoint le club avec une dette qui dévore la moitié du budget, pendant que Necker sort sa calculette, désespéré. Les révolutionnaires arrivent, réclament la tête du roi mais oublient de réclamer celle de la dette. Et la dette, elle ? Elle prend la Bastille et reste... solidement accroché.

«Liberté, Égalité, Endetté.» Voilà la devise tricolore oubliée des manuels scolaires.

Napoléon et la Restauration : la guerre, ce business lucratif... pour les créanciers Napoléon, lui, tambourine l'Europe mais ruine la France. Chaque bataille, un chèque en blanc envoyé aux banquiers.

Waterloo, la note salée arrive : gare aux poches vides et aux indemnités douillettes à payer pour calmer les voisins européens. Sous la Restauration, le royaume rampe sous le poids des dettes et des comptes à sec.

En 1830, la situation est explosive - 700 millions de francs-or de dettes, un trou béant dans les caisses. Charles X recherche un plan de sauvetage... et trouve mieux : un coup de main extérieur, façon hold-up financier. 1830 : Alger, la colonisation à crédit - mais avec un bonus or massifPrétexte officiel : un coup d'éventail. La vraie raison : un coffre-fort plein à ras bord.

La France débarque à Alger et vide le trésor local - plus de 48 millions de francs-or, détournés proprement vers la Métropole.

Un coup triple : on calme les créanciers, on souffle sur les dettes, et on lance la colonisation. Tout ça payé en espèces sonnantes et trébuchantes, sans ticket de caisse.

L'histoire économique française ?

Un braquage transméditerranéen aux airs de génie comptable.

La dette réglée... avec l'argent volé aux autres .Le patriotisme financier à la française, c'est ça : régler ses dettes en prenant les sous ailleurs.

Le « redressement extérieur » est un art subtil : emprunter, piller, compenser, oublier.

Depuis, Paris fait tourner la planche à billets et jongle avec ses dettes comme un prestidigitateur en faillite. La dette est notre baguette, notre vin et notre camembert fondu : indissociable, à savourer avec modération... ou pas. 2025 : deux députés macronistes jouent aux grands nettoyeurs... des dettes ancestrales .Deux députés - Charles Rodwell et Mathieu Lefèvre - replongent dans les comptes d'antan, armés d'un rapport qui va faire mal.

Ils accusent les accords de 1968 d'être un gouffre financier à 2 milliards d'euros par an, fruit d'un «déséquilibre historique» à régler fissa.

L'un des deux a sauté dans le train gouvernemental, preuve que la «réédition des comptes» n'est plus une lubie de comptable fou, mais une priorité politique.

Ils veulent ouvrir la boîte de Pandore financière franco-algérienne. Préparez le popcorn :

ça sent la guerre fiscale historique. L'addition ultime : si on comptait vraiment depuis 1830Sans forcer le trait, avec un intérêt composé à 3%, le trésor d'Alger aurait généré... un pactole stratosphérique.

Aujourd'hui, la France devrait à l'Algérie plusieurs centaines de milliards d'euros.

Un sacré ticket d'entrée pour un club des créditeurs... et un siège d'honneur garanti au FMI.

Mais en attendant, Paris préfère parler « dette maîtrisée »... pendant que la dette enfle plus vite que les promesses électorales. La dette française, un patrimoine national à consommer sans modération .Ne vous méprenez pas : la dette, c'est la France.

Comme un bon vin ou un parfum, elle monte en puissance avec l'âge et les administrations s'y frottent les mains.

Chaque gouvernement promet de la réduire, mais se contente de doubler la mise, avant que les ministres des Finances ne nous chantent que « la dette, c'est la croissance ».

Du grand art - du cabaret budgétaire où l'illusionniste tient tous les rôles.Moralité : la dette s'accumule, mais l'amnésie collective fait rage.

Jamais la France n'a remboursé le trésor d'Alger ni ses intérêts - le seul remboursement étant celui des dettes nouvelles, accumulées à la vitesse grand V.

En 2025, on agite la menace d'annuler des accords, de rationaliser sans brutaliser.

Mais un jour, espérons-le, un économiste sortira du bois et assènera :»La vraie dette française n'est pas celle de Bruxelles, mais celle d'Alger.»En attendant, l'Etat continue de creuser, Alger continue de se souvenir, et la dette, elle, se marre et trinque au champagne - bien payé par vos impôts.Encadré - Le saviez-vous ? En 1830, la dette de la France atteignait déjà 200% du PIB actuel (en monnaie constante). Une performance digne d'un champion olympique du passif.Le trésor d'Alger, plus de 10% des réserves d'or de la Banque de France, a été transféré sans facture ni note explicative officielle.Les accords de 1968, aujourd'hui remontés, étaient censés faciliter la mobilité des personnes, pas financer le trou noir budgétaire français.