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Les décideurs, une institution supraconstitutionnelle

par A. Belarbi

Suite à la réapparition de Sid Ahmeb Ghozali sur la scène publique grâce à l'interview accordée au Quotidien d'Oran, le concept de «décideurs «resurgit subitement dans l'esprit de tous les Algériennes et Algériens préoccupés par la vie politique, économique, culturelle, cultuelle et sociale de leur pays.

Bien que n'apparaissant concrètement que dans les enquêtes d'habilitation pour ceux qui aspirent à occuper des hautes fonctions de l'Etat, les services, structures institutionnelles de «l'Etat de droit», présentent différentes strates, jusqu'à l'installation d'un parmi nous sur le siège de président de la république. Ici, il n'est nul besoin de rappeler que «le président de la république est l'institution clef dans toutes les constitutions que nous avons du adopter depuis l'indépendance. Pourvu de cet formidable pouvoir les décideurs deviennent d'immenses seigneurs et nous de minuscules serfs accablés d'impuissance.

Ce sujet a souvent fait l'objet d'écrits laborieux et très intéressants dans la presse, mais mollement effleuré dans le fond, avec des mots compliqués qui diluent la teneur du propos. Ce qu'il est vital de rappeler, brièvement avec insistance, est la jeunesse de notre république et notre impatience, propre à l'adolescent, d'aspirer à devenir très vite adulte. Notre république n'a même pas cinquante ans et elle s'est érigée sur le néant institutionnelle, après le départ précipité des colons, bons gestionnaires à leur manière, de l'Algérie colonisée de l'époque. Au lendemain de l'indépendance seule l'institution militaire jouissait d'une expérience relative pour encadrer ses décisions et fonctionner à peu près normalement. A cela s'ajoute bien évidement l'esprit suspicieux de ses dirigeants fraichement sortis de la clandestinité.

Alors comment pouvions-nous ériger un état de droit, assis sur des institutions fonctionnant harmonieusement dans l'intérêt du peuple ?Le déséquilibre entre les différentes institutions constitutionnelles était et est encore à ce jour tel qu'il ne peut qu'engendrer des perturbations chroniques dans le fonctionnement de l'état. Et c'est ainsi que nous vivons encore dans le «faire semblant» . Faire semblant d'organiser des élections présidentielles, faire semblant d'organiser des élections législatives, des élections communales etc. Tout cela parce que les décideurs ne pouvaient pas permettre à des civils dont les souliers ne sont pas correctement cirés, et dont les boutons de vêtements ne sont pas convenablement agrafés, de prendre les rênes du pays sans lui faire courir de gros risques.

Les décideurs organisent des castings parfois heureux de nos «gouvernants, mais il leur est arrivé malheureusement de rater complètement leur choix pour mener le pays droit vers le mur pendant que le conducteur klaxonne. Mais en fait les décideurs, une fois leur casting fait ils ne s'occupent plus de la gestion quotidienne du pays.

L'intérieur avec la pagaille biométrique, l'énergie avec sa loi assassine annulée in extremis, la santé avec nos hôpitaux mouroirs, la justice avec les «j'assume «et les «je n'ai pas été intelligent «dans la saga Khalifa, l'agriculture à tâtons, l'industrie moribonde, les infrastructures de base avec une autoroute comme un Pallas sans toilettes, l'éducation nationale pour cobayes, le logement en veux tu en voilà, l'hydraulique avec des inondations toujours «Allah ghaleb «et la culture à Alger, sont désormais des domaines qui ne les préoccupent plus, ce sont des secteurs sous traités. Mais ce qu'il leur importe après, ce sont des privilèges tels que l'accès aux prêts bancaires et aux lots de terrain et il leur arrive aussi de placer des gens de leur choix à des postes importants. Et c'est tout !

Le pays peut être gérer par des gens très compétents tant mieux pour tous ou bien aller à la dérive et malheureusement il leur arrive parfois d'ignorer l'urgence de redresser la situation, comme c'est le cas maintenant. Cette caricature illustre le fait admis, c'est presque un fait coutumier et son acceptation par la majorité est un état d'esprit, une sorte d'envoutement de masse.

Heureusement grâce au développement vertigineux des techniques d'information notre pays adolescent peut prétendre à une rapide croissance pour devenir une république au vrai sens du terme et les algériens devront avoir le droit d'exiger le bon sens dans la conduite des affaires du pays. Aussi les décideurs sont nos compatriotes et malgré tous les privilèges qu'ils peuvent s'octroyer et l'argent qui en découle ne peuvent envoyer leurs enfants jouer dans un paisible square suédois à chaque fois qu'il le désirent. Leurs enfants ne peuvent pas tous être scolarisés ou étudier à l'étranger , non pas faute de moyens, mais parce que l'envie de trouver ses enfants à la maison en rentrant du travail est irrésistible. Ceci pour dire que les décideurs vivent avec nous et subissent les mêmes problèmes que nous tous.

Au cours des dix dernières années les problèmes se sont multipliés et aggravés à tel point que notre jeunesse, en désespoir de cause, préfère se jeter à la mer que de subir la mal vie dans notre magnifique pays Personne n'échappe à cette sensation mêmes les décideurs respirent mal chez nous. La présidente de la fédération internationale des droits de l'homme Mme Souhyar Belhassen a dit justement et pertinemment que «L'Algérie a une économie prospère, mai la population vit mal.»

Une sentence extrêmement juste qui démontre bien que le piège de cette forme de conduite d'un Etat a épuisé toutes ses expérimentations. Tous les algériens souffrent de ce mal insidieux que la manne pétrolière, désormais, ne peut plus guérir. Les décideurs sont des nationalistes qui aiment tellement l'Algérie que leur étreinte fait suffoquer le pays et eux mêmes ont en maintenant mal aux bras. Le Système s'est laconiquement épuisé, et les pétrodollars n'arrivent plus à calmer les gémissements de la population, gémissements qui peuvent rapidement et dangereusement se transformer en vociférations destructives.