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Lutte contre le terrorisme : Alger appelle à une nouvelle approche

par Ghania Oukazi

L'Union africaine a réuni hier à New York en marge de la 78ème session de l'Assemblée générale des Nations Unies les ministres des Affaires étrangères de ses Etats membres pour «débattre des menaces terroristes sur le continent» et contre lesquelles l'Algérie a appelé à «l'adoption d'une nouvelle approche de lutte contre le terrorisme reposant sur deux principes fondamentaux, à savoir le développement et la sécurité».

C'est le ministère des Affaires étrangères et de la Communauté nationale à l'étranger (MAECNE) qui en a fait état hier, vendredi, en annonçant que l'Algérie par la voie de son chef de la diplomatie, Ahmed Attaf, a débattu aux côtés de ses homologues africains «des menaces terroristes accrues auxquelles sont confrontés les pays et les peuples». Ce conclave a été programmé en prévision «d'un sommet africain exceptionnel qui se tiendra autour de cette question», annoncé «pour le début de l'année prochaine au Nigeria». Le rôle de l'Algérie sur la scène africaine a été mis en avant par le ministre qui a rappelé que «le président de la République assume la haute mission de coordinateur des efforts continentaux dans la lutte contre le terrorisme, l'extrémisme violent, et la prévention de ces fléaux». Le communiqué du MAECNE rapporte que Attaf a affirmé que «le terrorisme est devenu la principale menace pour la paix et la sécurité en Afrique, en particulier dans la région du Sahel qui a enregistré le plus grand nombre de victimes l'année dernière et est devenue un foyer mondial du terrorisme». Une région considérée comme l'une des plus pauvres dans le monde et celle où les groupes terroristes sont devenus de véritables armées qui s'approvisionnent en armes de dernière génération depuis la Libye. Attaf en a d'ailleurs fait part à ses homologues africains présents à la réunion onusienne de New York en évoquant «des développements dans cette région marquée par l'expansion d'armées terroristes équipées d'armes développées et contrôlant de vastes territoires géographiques». Les putschs militaires répétés ces dernières années (plus de 8 dont 2 au Mali) ont ouvert les portes au terrorisme le plus violent dans le monde.

L'appel de l'Algérie

Ce qui a poussé l'Algérie à entre autres regretter et condamner le départ de la Minusma (Mission de maintien de la paix onusienne pour le Mali) en avril dernier de toutes les localités maliennes où ses équipes étaient en service pour protéger les civils en leur assurant des aides humanitaires et aussi veiller au respect du cessez-le-feu. Un départ qui, faut-il le rappeler, a été fait sur décision «ferme et sans appel» des généraux putschistes qui se sont autoproclamés «dépositaires de la transition» en attendant «le retour à l'ordre constitutionnel». Jugée «exceptionnelle», la situation au Sahel a poussé le ministre algérien à mettre en exergue «la nécessité d'accorder la priorité des priorités au traitement de la situation précaire dans la région, qui compte parmi les plus pauvres du monde et qui abrite également le plus grand nombre de foyers de crises, de tensions et de conflits outre la résurgence de la menace des changements inconstitutionnels des gouvernements aggravant ainsi les défis auxquels sont confrontés les pays et les peuples de la région». Tous ces fléaux en mouvement depuis de longues années ont laissé Attaf mettre notamment en avant «l'importance de l'adoption d'une nouvelle approche de lutte contre le terrorisme reposant sur deux principes fondamentaux, à savoir le développement et la sécurité». Il a noté dans ce sens que «l'Algérie a déjà appelé à la tenue d'une conférence internationale sur le développement dans la région du Sahel tout en insistant sur la conception d'un nouveau modèle d'opération de maintien de la paix plus apte à relever les défis imposés par le phénomène du terrorisme».

Autre activité du chef de la diplomatie algérienne rapportée par le dernier communiqué du MAECNE, sa rencontre avec une délégation diplomatique américaine de haut niveau conduite par la sous-secrétaire d'Etat, Victoria Nuland. Attaf a reçu la délégation américaine en marge de sa participation aux travaux de la réunion ministérielle de la 78ème session de l'Assemblée générale des Nations Unies. Outre la sous-secrétaire d'Etat, Victoria Nuland, ont fait partie de la délégation américaine la sous-secrétaire d'Etat chargée des Affaires du Proche-Orient, Barbara Leaf, la secrétaire d'Etat adjointe aux organisations internationales, Michele Sison, et la secrétaire d'Etat adjointe aux affaires africaines, Catherine Phee.

Des absences qui en disent long?

Le communiqué du ministère a fait savoir que «les discussions entre les deux parties ont porté sur plusieurs questions inscrites à l'ordre du jour de l'Assemblée générale de la session actuelle, notamment les développements de la crise au Niger et les perspectives de renforcement des efforts diplomatiques à la lumière de l'initiative de règlement pacifique proposée par le président de la République». Autre point discuté entre Attaf et les diplomates américaines, «les derniers développements de la crise au Mali et les moyens d'intensifier les démarches pour apaiser la situation et permettre aux parties maliennes de revenir à l'application de l'accord de paix et de réconciliation issu du processus d'Alger». Accord «boudé» depuis de longs mois par les décideurs militaires au Mali qui refusent depuis d'en parler avec les autorités algériennes y compris avec l'ambassadeur algérien à Bamako.

La crise en Libye a elle aussi été abordée mais dans une rencontre bilatérale entre le ministre et la sous-secrétaire d'Etat aux affaires du Proche-Orient, Barbara Leaf, qui, tous deux ont, selon le communiqué, réaffirmé chacun pour sa part «le soutien de l'Algérie et celui des Etats-Unis aux efforts de l'envoyé onusien, Abdoulay Bathili».

L'on rappelle que la réunion «africaine» des MAE de ses Etats membres s'est tenue en marge de la 78ème session de l'Assemblé générale des Nations Unies dont les travaux se tiennent du 19 au 26 à New York et examinent la problématique : «rétablir la confiance, raviver la solidarité mondiale et accélérer l'action menée pour réaliser le programme 2023 et ses objectifs de développement durable en faveur de la paix, de la prospérité, du progrès et de la durabilité pour tout le monde». L'on note surtout que cette session se tient en l'absence des dirigeants de quatre membres permanents du Conseil de sécurité à savoir les présidents russe, chinois et français ainsi que le chef du gouvernement du Royaume-Uni. Des absences qui en disent long sur l'incapacité du système des Nations Unies à pouvoir trouver des consensus pour régler des crises multidimensionnelles qui détruisent les Etats et les peuples.