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La corruption, la triche et la lèche

par Ahcene-Djaballah Belkacem

Il y a, certes, une certaine violence au niveau de notre société, tout particulièrement dans les villes et les quartiers populaires (totalement perturbés, il est vrai, par les « déplacements » des populations vers de nouvelles cités en banlieues, lesquelles, mal « habitées », ont dupliqué les conflits, tout particulièrement, chez les jeunes à la recherche de nouveaux repères). Mais là, n'est pas le mal le plus important et le plus dommageable car visible, donc pouvant être rapidement maîtrisé par les services de sécurité concernés. Il y a aussi. D'autres déviances sociales existent, mais trois maux « soft », donc insidieux et difficilement détectables rapidement, existent et sont en train de prendre (ont déjà pris, hélas) de l'ampleur :

1/ La corruption qui, selon un « bon » mot d'un vieil avocat, s'est « démocratisée », touchant non plus seulement le « haut » mais a gangrené affectant, en surface et/ou en profondeur, presque toutes les couches et ce, à tous les niveaux. Depuis la chute du clan « Boutef » (qui l'avait « labellisé »), sous la pression du Hirak, la Justice ne chôme pas, « ressuscitant » certainement tous les anciens dossiers alors « mis sous le coude », les arrestations et les sanctions pleuvent, visant souvent très juste, surtout le gros gibier, souvent inattendu (avec quelquefois pas mal de dégâts collatéraux). Mais, il semble bien que le mal est désormais trop profond pour qu'il puisse être éradiqué au moyen des voies classiques qui, prenant toujours du temps, facilitent les esquives, les fuites et les défenses, en utilisant parfois les outils de la corruption. Mais, pour l'instant, la lutte doit continuer sans répit et sans pitié et, surtout, pour rétablir la confiance citoyens-pouvoir, fortement bien mise à mal jusqu'ici, toucher tous les coupables, quel que soit leur fonction, leur grade ou leur notoriété.

2/ La triche généralisée sur les produits, sur les prix, sur les diplômes, les fonctions, les grades, tout ce qui peut apporter un « bénéfice » et rapporter plus que ce qui est mérité. Les derniers cas les plus révoltants sont ceux relevés, tout récemment, au niveau des épreuves du BEM et du Bac. Malgré les avertissements de sanctions sévères, tout en sachant que la surveillance électronique et téléphonique est désormais bien plus serrée que par le passé, on a noté plusieurs cas de fraude, comme si le sentiment d'impunité est désormais, lui aussi, bien ancré dans les comportements sociétaux. « I'dezzou mEahoum »! D'ailleurs, on trouve dans le lot des « pris la main dans le sac » de tout un peu, un peu de tout et un peu partout: un élu national du peuple (un député!) un représentant de l'Autorité (un gendarme chef de brigade par intérim!), une simple citoyenne, des candidats, un étudiant, des enseignants, des usagers adultes des réseaux sociaux, Djelfa, Skikda, Adrar, Tlemcen , Chlef , Khenchela, Tiaret, El Meghaier. Presque partout. Toutes les techniques de l'anti-sèche écrite sur la paume de la main à la puce satellitaire (!)...

3/La lèche: comme si la désolante (et ridicule, tant sur le plan national qu'international) expérience vécue durant l'ère Bouteflika n'a pas suffi à immuniser nos cadres économiques et politiques contre la flatterie et le brossage de pompes. Comme si les « ordres » du Chef de l'Etat -lors de son installation en tant que nouveau président de la République- demandant à ce que les termes caressant dans le sens de ses poils (comme « Fakhamatouhou ») soient proscrits du vocabulaire et que les responsables s'attachent bien plus à réaliser (avec succès cela va de soi) les programmes qu'à « louer » les qualités de la hiérarchie n'ont pas suffi à « vacciner » les gens! Peut-être une deuxième dose ou même une troisième « de rappel à l'ordre » encore plus forte?