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RN 108 reliant Oran et Aïn Témouchent via El-Hamoul: La route dans un état catastrophique après l'abandon du chantier

par Houari Saaïdia

Classée route nationale (RN), la voie reliant Oran à Aïn Témouchent via l'échangeur d'El-Hamoul à partir de l'autoroute Est-Ouest est un laboratoire grandeur nature des effets de dégradation. C'est aussi un bien triste cas d'école du non-entretien routier. Tous les péjoratifs ne suffisent pas pour décrire la RN 108.

Tout y est: déformation de chaussée, orniérage à grand rayon, faïençage, fissuration, tassement, affaissement de rive, usure de la bande de roulement, traverses, ondulations, absence de drainage, formation de bourbier sur l'accotement, fluage de remblai, nids-de-poule... Sur plusieurs dizaines de kilomètres, depuis la bretelle d'autoroute jusqu'aux limites de la wilaya d'Oran au fin fond de la localité mi-rurale mi-zone d'activité d'El-Hamoul. Et dire que c'est une voie de communication classée par décret parmi la liste des routes nationales parce que censée remplir un certain nombre de critères. Il n'en est rien sur le terrain. Le contraste est choquant. A tous égards. Le supplice commence dès le petit panneau d'entrée au patelin d'El-Hamoul. A partir de ce point de commencement, la route enlève son charmant voile de RN 108 pour exposer au grand public son repoussant vrai visage de piste de tous les maux. Au bout d'à peine 300 mètres de chaussée en état pathologique complexe, dans la poussière et le vacarme des poids lourds, apparait la première micro-zone d'ombre : le petit bourg d'El-Hamoul. Une bourgade qui vit en marge du temps, bien loin de ce que l'on appelle la civilisation et la vie décente. On ne peut pourtant même pas parler de banlieue, la ville d'Oran étant à portée de vue. Relevant administrativement de la commune de Tafraoui, l'une des plus pauvres contrées d'Oran, la modeste agglomération d'El-Hamoul est sortie de l'anonymat peu à peu à la faveur de certains grands projets qui ont élu domicile dans sa zone d'activité déstructurée et désarticulée, à l'image de la grande raffinerie oranaise du sucre du groupe Berrahal et le complexe de trituration de graines oléagineuses, raffinage et conditionnement des huiles végétales du groupe SIM.

UNE ROUTE NATIONALE AUX RELENTS D'UN CHEMIN RURAL

Mais c'est sans nul doute surtout grâce au fameux projet de l'usine de montage automobile Peugeot (sous son intitulé officiel : Peugeot Citroën Production Algérie), pour lequel une assiette foncière de 120 hectares avait été réservée alors, que ce petit territoire a gagné en notoriété. Mais les grosses annonces, pas plus que les grands sigles, ne suffisent pas pour changer la face d'une région. A fortiori lorsque les actes ne suivent pas. Entretemps, il y a eu en revanche pas mal de petites/moyennes entités industrielles et autres structures de stockage et de conditionnement qui ont émergé dans cette ZA, sans que cela s'accompagne d'un projet d'aménagement spatial et économique permettant de revaloriser l'image économique du site, de conforter les entreprises présentes et d'attirer de nouvelles implantations. Pas de programme non plus, mais plutôt des petites actions de bricolage et des initiatives privées çà et là, en matière d'aménagement et de VRD, ceci alors que le secteur tertiaire de l'économie (dit aussi secteur des services), aussi bien marchand que non marchand, quant à lui, est toujours inexistant. En parallèle, aussi, il n'y a eu aucun effet d'entrainement sur l'environnement immédiat, aucun développement socio-économique de la localité d'El-Hamoul. C'est la route, la RN 108, qui incarne le mieux ce paradoxal, cette dichotomie entre le vœu d'une Zone d'activité économique (ZAE) en périphérie de la ville et la réalité d'un vide sidéral tout autour. Entre l'aspiration vers un parc d'activités moderne en milieu suburbain bénéficiant de la proximité des réseaux et infrastructures de transport qui accroit l'attractivité de la commune et attire les différents acteurs économiques et le calvaire bien réel d'un immobilisme et d'un sous-développement de tout l'environnement. La route, au lieu qu'elle soit réhabilitée, requalifiée et modernisée pour accompagner la nouvelle vocation de la région, elle s'est dégradée encore davantage au point de plus pouvoir desservir le trafic des véhicules légers, c'est-à-dire en dehors des transports en commun et le flux de poids lourds et d'engins induit par la zone d'activité, dominé notamment par le transport routier de marchandises.

LA RN 108 OU ROUTE DE TOUS LES CONTRASTES

L'on s'attendait à ce que la RN 108 se dédouble, s'élargisse, se transforme en profil autoroutier ne serait-ce que sur la section entre El-Hamoul et la ZA sur 2 ou 3 km tout au plus... Au lieu et à la place de quoi, elle s'est « déclassée » en un sentier rural en état de dégradation très avancé, condamnant les usagers à une circulation au compte-gouttes dans l'insécurité et l'inconfort le plus total. Peut-on retenir à la décharge de la direction des travaux publics (DTP) la baisse drastique des crédits consacrés à l'entretien des routes, lequel serait le facteur principal de la dégradation générale du réseau ? En tout état de cause, l'abandon, il y a quelques années et pour des raisons non connues, du projet de revêtement en béton bitumineux de la RN 108 a considérablement altéré encore davantage l'état de chaussée de cette voie qui était déjà à la limite du praticable. En effet, après quelques jours du début de l'intervention, l'entreprise de réalisation a dû mettre à l'arrêt les travaux, prenant ses cliques et claques en laissant un bon tronçon de la route dans un piteux état : bande de roulement partiellement défrisée, présence d'un dénivellement de chaussée de près de 20 cm sur un segment longitudinal de près de 250 m, entre les deux voies de circulation (les deux bandes de chaussée affectées aux deux files de véhicules de cette route à double sens présentent une forte différence de niveaux du fait que l'on a posé une double couche de BB sur l'une d'elles seulement). L'absence d'accotement, de drainage, de bandes d'arrêt, de poteaux d'éclairage, de signalisation, la présence de dos-de-chameau, de tranchées et de crevasses... La liste des tares de la RN 108 est trop longue.