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Le temps du pouvoir et le pouvoir du temps en Algérie

par Mohamed El Bachir Louhibi

36ème partie



Ces procédés les plus divers fussent ils inacceptables, aident a mieux saisir le type d'homme génèré par le système colonial et son Eglise.

Alors de grâce il fallait ramener les choses et certains hommes à leurs justes mesures et surtout les situer en dehors de toute dimension sacrale.

Comment ne pas ressentir tout cela comme une insulte à la personnalité du Peuple Algérien et à son intelligence quand on bafoue de cette manière les rapports, les fonctions, essentiels à l'équilibre moral.

Quelle audace et quelle impertinence de jouer à ce jeu dans le pays qui vit naître

Saint Augustin qui a œuvré pour la conciliation de l'intelligence et de la foi de fin du 4ème au début du 5ème siècle, comme il sut accueillir à bras ouverts le père de la Sociologie moderne Ibn Khaldoune qui a laissé une immense chronique générale.

Les Prolégomènes ou il a exposé sa philosophie de l'histoire déjà au point à la fin du 14ème siècle.

C'est en Algérie même qu'il a rédigé ses œuvres essentielles, ensemble de notions prémonitoires à la sociologie, une nouvelle science avant Auguste Comte qui se manifesta au début du 19ème siècle seulement.

Seul le colonialisme, incarné par ses colons, ses soldats, ses administrateurs, son système libérait des énergies et l'histoire, croyait il ?

Notre histoire, notre passé, notre avenir dans tout cela que comptaient ils exactement ?

Nous n'étions donc nullement concernés par les changements sociaux et politiques qui allaient dans leur élan dépasser le phénomène colonial à son corps défendant.

Nous avions été catalogués selon une typologie simpliste : inaptes à tout progrès à toute évolution ou émancipation.

Toujours le même syndrome, l'illusion de la supériorité du système colonial alors que nous étions des collectivités avec certes des branches diverses, mais égales en dignité donc égales en droit.

Notre refus de l'injustice se faisait de plus en plus fort.Il se fondait non sur des hypothèses mais sur des constats, sur une volonté clairement affirmée.

Nous voulions le changement et l'innovation et ils imposaient l'expansion, le mépris la domination, l'arbitraire.

Nos objectifs respectifs étaient antinomiques, opposés. L'habillage de la volonté coloniale a varie plusieurs fois depuis la conquête.

Que de lois, que de règlements. Mais leur contenu restait constant, identique.

Ils avaient tous les mêmes finalités : fortifier la colonisation.

En France même les priorités changeaient, elles évoluaient aussi pour les Européens d'Algérie, français ou non il en était de même, mais pour nous algériens c'est comme si, la pendule de l'histoire était restée bloquée, la terre ne tournait plus.

A leurs yeux nous devions demeurer éternellement parqués dans l'antiquité.

Eh bien comme disait mon père : «nous sommes las d'être parqués dans l'Antiquité Nous voulons les mêmes droits puisque nous avons les mêmes devoirs» du reste il commettait une erreur car nous avions de loin plus de charges à supporter.

«L'esprit du temps» était leur monopole selon eux.

Ils n'interrogeaient ni les alternances ni les changements, les évolutions, les progrès d'idées technologiques, scientifiques, ni les débats philosophiques avec leurs constantes universelles, leurs progrès par contre leurs régressions trouvaient audience puisque la passivité et la complicité de beaucoup d'intellectuels Européens de la période comprise entre les 2 guerres mondiales ont fait l'apologie du nazisme, du fachisme trouvaient plus que des oreilles attentives, mais des adeptes parmi les colons d'Algérie.

Lorsque la guerre civile espagnole a éclaté, L'abbé Lambert, maire d'Oran a fait l'apologie du franquisme sur les ondes d'une radio, cela relevait d'un soutien plus engagé encore,il n'était que le porte parole de beaucoup de colons, dont certains, avaient envoyé du blé d'Algérie au général Franco pour aider le franquisme alors que, au même moment la famine régnait en Algérie.

Tel était le fruit de l'enseignement républicain et des qualités de citoyens qui se manifestaient chez les colons. Même si chacun est libre de ses choix idéologiques.

Ils incarnaient la réaction et la régression dans tout ce qu'elles ont de plus haïssables.

Voilà que par ce comportement ils ajoutaient beaucoup à cette époque détestable de l'histoire contemporaine.

La boucherie de la première guerre mondiale qui avait engendré 9 millions de morts et le génocide dont a été victime le Peuple Algérien ne comptaient aux yeux de quiconque Qu'importe le sang sur la boue, seul compte le colonialisme triomphant.

Au lieu d ?étudier sérieusement les tournants qui s'annonçaient déjà au grand jour, de préparer le futur avec nous, de prévenir les crises, d'avoir le grand privilège de mesurer intelligemment les inflexions, les variations universelles et particulières, ils croyaient nous maintenir dans le ghetto intellectuel, politique, social et matériel dans le quel ils voulaient nous enfermer.

Ils étaient aveugles au point d'ignorer qu'ils se trouvaient face à un peuple, un espace, une période qui demandait à être considéré selon une vision juste, humaine et libérale des choses.La justice la plus élémentaire, la logique, le bon sens et l'histoire l'exigeaient fortement.

A cela ils opposaient une vue unilatérale, réductrice, dictatoriale, oppressive.

Le refus d'élever, l'exploité, l'exclu au rang de la dignité humaine relevait du projet politique colonial.

A quoi ont servi tous les vrais combats menés par des hommes lucides et courageux pour le compte de l'humanité et une éthique universelle.

Les combats avaient donné naissance a des classes bien différentes en raison de leurs brassages intervenus depuis celui la même qui a pourtant modifié beaucoup de choses.

A suivre