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LE «RASOIR D'OCKHAM»

par Belkacem Ahcène Djaballah

Ce ne sont pas les exemples qui ont manqué ces derniers temps.On a eu d'abord un consultant sportif allemand qui, en analysant le jeu d'un international algérien, a évoqué le caractère rebelle de notre compatriote en mettant les «défauts» sur son origine et les conditions de vie de son enfance. Du racisme, évidemment ! Surtout lorsque ça vient d'un Allemand. Bien sûr, il s'est vite excusé assurant ne pas avoir eu de mauvaise pensée derrière la tête mais seulement une analyse précipitée. N'empêche ! Belmadi, puis la Faf, puis les réseaux sociaux, puis nos consultants, puis... ont tous bruyamment dénoncé le dérapage le transformant en véritable incident presque diplomatique. Et pourtant, on sait bien que bien de nos joueurs internationaux et autres, binationaux ou non, en dehors de leur valeur sportive indéniable, n'arrivent, en cas de chocs ou de carton, que rarement à se dominer durant le jeu face aux autres joueurs ou même face aux arbitres et à leurs entraîneurs et dirigeants. Des râleurs. Ennif ouelkhssara ! Mais, ce n'est pas grave, sauf en cas de cartons rouges.

On a eu, ensuite, une résolution du Parlement européen (la deuxième du genre : le 27/11 2019 et le 26/11/2020) qui appelait à un plus grand respect des droits humains en Algérie. Pas tout à fait tort bien que l'on voit pire ailleurs et chez eux. Le ministère des Affaires étrangères a vite répondu, remettant de bonne manière les «pendules l'heure». Une résolution, pff ! Un texte non contraignant, un «pet» de chat qui n'a de valeur que symbolique. Et encore ! Cela n'a pas suffi et - comme au «bon vieux temps», quand l'Apc d'une commune jusqu'ici inconnue menaçait le Conseil de sécurité de l'Onu ou l'Otan de représailles s'il maintenait une position politique inadmissible - cette résolution s'est retrouvée décortiquée sur tous les plateaux de nos 50 télés, dans tous les studios de nos 54 ou 55 radios (les 48 locales comprises) et dans toutes les pages internationales de nos 150 quotidiens.

On a, enfin, l'histoire du drapeau algérien (en tout petit, petit format) se retrouvant, presque invisible, lors d'un reportage de Tf1, sur les marchandises d'un conteneur inspecté par des douaniers marseillais qui assuraient, semble-t-il, que le gros du trafic des animaux sauvages passait par le sud de la Méditerranée, sans aucunement citer l'Algérie. Aussitôt, on en a fait tout un plat, dénonçant, sans l'écrire explicitement, le «complot ourdi».

On a eu, récemment, la fake news de France 24 sur la position de l'Afrique du sud sur le Sahara Occidental, on a, on a eu... En aura-t-on ?

Ce ne sont pas les «complots» et la mauvaise foi de l'étranger (découlant de «volontés de puissance» toujours inavouées bien sûr) qui manquent et qui vont manquer pour faire barrage à la «volonté d'existence» du pays - un Etat pivot continental indéniable - et de ses citoyens et, aussi, à leurs manières d'être (peut-être trop avouées faisant des envieux). Des attaques menées, bien souvent, sur des détails. Pour la plupart cherchant à nous «fatiguer», en nous entraînant sur le terrain de débats souvent inutiles, parfois ridicules et surtout usants, cherchant à nous démobiliser et à nous détourner de l'essentiel. Et cela dure depuis 62. Il est vrai que le trop-plein de dogme et d'idéologie dans notre système éducatif, politique, économique et sécuritaire, durant des décennies, depuis l'indépendance, a déformé nos esprits. Par ailleurs, la surmultiplication des «analystes» et des «experts» (et même de personnalités officielles, ministres, députés...) a causé plus de brouillard que d'éclaircies dans la compréhension des choses de notre politique étrangère.

Donc, faisons appel à la raison (qu'il faut promouvoir et garder jalousement) plus qu'à la passion. Sans être naïfs, avoir toujours en tête (pour ne pas la perdre) la règle dite du «rasoir d'Ockham» (ou règle de raisonnement) qui pose un principe de simplicité, tant au niveau métaphysique, en recommandant de ne pas multiplier les conjectures sur les entités, qu'au niveau méthodologique, en recommandant de ne pas multiplier les hypothèses. Elle revient donc à considérer soit qu'il est plus simple et donc plus plausible de supposer la bêtise plutôt que la malveillance, la première étant plus vraisemblable en général, soit qu'il est inutile d'ajouter la conjecture d'une intention maligne à celle d'un manque de compétence. Sans toujours «attribuer à la malveillance ce que la bêtise suffit à expliquer». Tout en n'oubliant pas que la bêtise - trop répétée - peut être parfois bien plus dangereuse que la malveillance déclarée. Pour conclure, je reviens à cette «nuisance» émise par l'ancien entraîneur des Verts, Vahid H., l'entraîneur actuel du Maroc («Les lions de l'Atlas», un animal qui a disparu depuis longtemps de l'Afrique du Nord), certainement encouragé par ??!!!! (suivez mon regard !) qui déclarait que le Maroc est en mesure de battre les «Fennecs» (un animal toujours en vie, ayant traversé le temps et les espaces les plus hostiles au monde). Réponse de Belmadi : nous, nous voulons gagner les titres, pas battre tel ou untel ! Point barre !