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Le Président Tebboune : des actes derrière les mots

par Salah Lakoues

  Voici seulement six mois que le Pré-sident Abdelmadjid Tebboune a accédé aux commandes de ce pays quasi exsangue et en butte à de nombreuses pressions.

Cependant, joignant le dire au faire, il donne des gages significatifs quant à sa vision et à sa démarche de reconquête démocratique d'un paysage politique vidé de sa substantifique moelle durant les vingt dernières années. Ses détracteurs s'accrochent à un seul argument : il a été «mal élu».

Soit. Cependant, l'ampleur relative de sa popularité, telle qu'elle s'est exprimée durant un scrutin présidentiel assez perturbé, c'est le moins qu'on puisse dire, ne peut faire de doute. D'autant plus que mieux qu'un des meilleurs sondages portant sur une population bien plus réduite, les résultats du vote donnent une indication assez proche de la réalité du paysage politique actuel. Les Algériens qui ont favorisé son bulletin avaient, obligatoirement, fait le meilleur choix. Son contrat moral avec toute la société est pourtant clair : créer les conditions d'un réel changement mais en tenant compte du contexte déstabilisateur qui nous guette. Les faits qui s'accumulent lui ont donné raison et ce n'est pas l'actualité qui nous contredira. Au fil des jours, son programme, annoncé lors de sa campagne électorale, se dessine de plus en plus concrètement et clairement. Il veille intensément aux équilibres. Il a commencé par se soucier des plus démunis et s'est engagé sur plusieurs actions visant leur émancipation. Mais en même temps, il rassure le potentiel créateur de valeur en indiquant de nouveaux critères basés sur la transparence et la numérisation progressive des services publics.

Le style du Président est direct et évite -tant que faire se peut- la langue de bois. D'ailleurs, c'est en darija que ses propos sont les plus pertinents. En effet, c'est la langue du cœur et de connivence implicite, durant sa campagne, cela a dû être l'élément clé de son osmose avec son électorat. Cette conscience du lien social fort que la langue maternelle de la majorité des Algériens crée sera certainement le levier -inespéré jusque là- d'une dynamique enthousiaste autour de son projet de rénovation de ce pays. Face aux remous identitaires qui ont pris une tournure dangereuse pour l'unité de la nation, le Président Tebboune a fait preuve de sang-froid et de lucidité en cela qu'il a bien distingué ce qui relève de revendications fondées et ce qui relève de la provocation bien élaborée, y compris avec les soutiens d'officines étrangères. Ces chimères de retour à un âge historique à la fois impossible et sans lendemains visent seulement à retarder le développement d'une nation bien jeune, mais dont les artères sociohistoriques s'irriguent d'une sève multilingue, multiculturelle et même multicultuelle. Ainsi s'est imposée au monde la personnalité algérienne.

Certes, la dépendance du « tout hydrocarbures » est pointée comme un risque pour l'Algérie et le Président s'engage haut et fort à libérer l'économie sur la base de critères plus transparents et méritoires. Sa connaissance de la vie de tous les jours avec toutes les embûches de la bureaucratie, de la corruption, des usages de faux, des abus de pouvoir, des détournements divers de biens sociaux l'aide à s'orienter. Il en parle avec aisance tout en suggérant leur dépassement serein. Car le système qui doit « déguerpir », c'est bien celui-là; tant ses tentacules traversent l'administration et couvrent une bonne partie des rapports sociaux actuels. Lorsqu'il mise sur la numérisation progressive des services publics et un renfort juridique, le Président semble rappeler à l'ordre ceux qui ont pris le mauvais pli ces deux dernières décennies. Imposer un contrôle, sous peine de sanctions affectant directement la poche des corrompus, sur les procédures et leur temps limite de réalisation est possible, pourrait être un moyen radical, en effet. Il est clair que l'année 2021 sera une année charnière pour ce pays. Les plans de développement mis en place sur ces derniers six mois par le gouvernement laissent présager le meilleur. Enfin de l'optimisme au bout d'un long tunnel. Une vision à la fois sociale et démocrate -collée aux réalités du monde contemporain- se dessine. Sommes-nous à l'orée d'une nouvelle ère avec l'étoffe d'un véritable leader en train d'émerger ?