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Stocks de médicaments et coronavirus: Entre pénuries, tensions et assurances

par M. Aziza

Le ministre délégué à l'Industrie pharmaceutique, Lotfi Benbahmed, a tenu à rassurer l'opinion publique sur la disponibilité des médicaments locaux et importés. Et ce, au moment où des professionnels de l'industrie pharmaceutique ont exprimé «leurs appréhensions» quant aux risques de pénuries de médicaments si la pandémie perdure dans le temps.

Les professionnels du secteur, notamment le Syndicat national algérien des pharmaciens d'officine (SNAPO) présidé par Messaoud Belambri et l'Union nationale des opérateurs de la pharmacie (UNOP) du Dr Abdelouahed Kerrar, avaient déjà exprimé des craintes quant à l'impact de la propagation du coronavirus à travers le monde sur le marché national du médicament. Il était attendu, suite à la libération des programmes d'importation, d'approvisionner le marché national en médicaments habituels, sauf que la suspension du transport aérien en raison de la propagation du Covid-19 a perturbé cette opération et a, du coup, aggravé la situation, ce qui a favorisé, par conséquent, des ruptures touchant plusieurs types de médicaments, a expliqué M. Belambri

De son côté, le ministre a indiqué dans ses déclarations que son secteur a été sur la défensive dès le départ. Il a affirmé «nous avons pris des mesures préventives, dès la propagation du coronavirus en Algérie et à travers le monde». Et de préciser «nous avons appelé les importateurs et les fabricants locaux à former un stock de matières premières produites localement pour garantir un approvisionnement du marché national en médicaments». Et de souligner en outre que ses services ont demandé aux importateurs de médicaments et producteurs locaux de les informer, de manière hebdomadaire, des stocks pour suivre les développements sur le terrain.

Le Dr Abdelouahed Kerrar de l'UNOP a précisé «que dès l'apparition de l'épidémie de Covid-19, les partenaires ont été contactés pour assurer un stock de matières premières et de produits finis à même de permettre de couvrir le marché national de 6 à 9 mois».

Tout en se montrant rassurant, le ministre délégué, le Dr Benbahmed, a affirmé que l'approvisionnement du marché du médicament ne sera pas perturbé pour l'année 2020. Arborant le fait que le ministère de la Santé avait déjà mis en place de nouveaux mécanismes de gestion du secteur. Notamment ceux relatifs à l'installation de l'Agence nationale de produits pharmaceutiques (ANPP) dotée de moyens nécessaires au lancement de son activité, et la nomination d'un nouveau directeur des produits pharmaceutiques et équipements de santé au sein de l'administration centrale.

Il est à souligner que depuis l'apparition du coronavirus en Chine, l'industrie pharmaceutique mondiale a exprimé des craintes qualifiées par les professionnels de «légitimes». Des soucis liés aux répercussions de la pandémie du Covid-19 sur la chaîne d'approvisionnement en produits médicaux, y compris de potentielles interruptions d'approvisionnement en matières premières. Sachant que la Chine et l'Inde se sont imposées au cours de ces dernières décennies comme les plus grands fournisseurs en matières premières à usage pharmaceutique au monde.

A propos de cette préoccupation majeure, le ministre a précisé, dans une déclaration à l'APS, que des changements ont été opérés à travers le monde au regard de la conjoncture actuelle, en soulignant que «les producteurs locaux seront autorisés à changer la qualité de ces matières, tout en préservant la qualité des médicaments fabriqués localement, suivant les conditions, pour ne pas être soumis au chantage de ces fournisseurs, qu'il s'agisse de l'achat de ces matières ou de l'augmentation des prix».

Enfin, les deux plus importantes organisations représentant les opérateurs du secteur pharmaceutique et les pharmaciens d'officine, à savoir l'UNOP et le SNAPO ont appelé le ministère de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière à suivre rigoureusement la mise en œuvre des programmes d'importation afin que le marché national ne soit pas en proie aux ruptures.

Selon le SNAPO, il y a environ 120 produits en rupture et 100 produits sous tension. Des produits non disponibles de manière régulière ni en quantité suffisante. La gamme des produits en rupture et sous tension est variée, il y a ceux fabriqués localement et ceux qui sont importés, des pommades, des corticoïdes, des injectables et des antibiotiques. Et selon les déclarations du président du SNAPO, Messaoud Belambri, au Quotidien d'Oran, «la question de la rupture de certains médicaments est la même que celle qu'on a connue avant cette crise sanitaire».

De nouveaux décrets pour une meilleure gestion du secteur

Le Dr Benbahmed a annoncé la promulgation prochaine de plusieurs décrets relatifs à l'importation et à l'enregistrement des produits fabriqués localement et l'accélération de l'enregistrement des médicaments biosimilaires. Répondant ainsi aux préoccupations des professionnels du secteur, notamment à la demande formulée par le Syndicat national des pharmaciens d'officine (SNAPO) exigeant l'amélioration de la gestion du dossier des médicaments et sa nécessaire numérisation.

Le ministre délégué chargé de l'Industrie pharmaceutique a souligné que les nouvelles mesures prises par son département permettront progressivement d'assurer la disponibilité des médicaments qu'il a qualifiés de «produits stratégiques», d'améliorer la gestion du secteur et de l'adapter aux changements en cours dans le monde.

Mais, il n'a pas hésité à évoquer les entraves, notamment administratives, auxquelles s'est heurté le secteur en 2019. En déplorant que «celles-ci avaient empêché l'ouverture de nouvelles unités et retardé l'introduction de nouvelles lois en adéquation avec les progrès enregistrés dans ce domaine».