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L'ATTENTE ET LES EXIGENCES DE SOI AUSSI

par Abdou BENABBOU

Il est indéniable que les marches populaires des vendredis préfigurent l'énoncé d'une leçon de vie. Mieux vivre dans la sérénité et évoluer dans un minimum de bonheur est à la base des réclamations des millions de marcheurs. L'insurrection non violente de la majorité des Algériens à travers tout le pays est d'abord une exigence pour un retour à des normes morales économiques et sociales justes et équitables pour tous. La mise hors des champs politiques des personnalités de l'ancien système réclamée par la rue est aussi une quête populaire pour une définitive table rase du passé.

Cette volonté soutenue et réaffirmée tous les vendredis est à l'évidence à applaudir et il serait heureux que les citoyens y adhèrent en toute conscience. Elle leur recommande cependant de s'inscrire eux-mêmes dans cette logique et d'exiger d'eux-mêmes ce qu'ils réclament à cors et à cris à des dirigeants qu'ils accusent d'avoir mené le pays à la ruine. Ne pas se corriger soi-même équivaudrait à rendre siennes les tares avérées de ceux qu'on incrimine et rendre caduc ce pourquoi on s'est soulevé. On ne peut pas demander aux autres de se redresser si l'on ne fait pas l'effort de se redresser soi-même. Or la flagrance de l'incivilité presque générale n'est en équation harmonieuse ni avec les lourds griefs scandés tous les vendredis ni avec les attentes de la population.

Il est vrai que les pénibles excroissances sociales vécues jusqu'ici ont des origines profondes dues à une gestion catastrophique du pays et une mise en marche trop perturbée de toute une société. Cette gestion hémiplégique de faux prophètes a perverti les consciences et a enduit le comportement social d'épaisses couches de tartre aujourd'hui ardues à effacer.

Pour être en conformité avec soi-même, le peuple est astreint à sa propre mue. La tâche aussi lourde et compliquée soit-elle pourrait s'avérer aisée si l'on commençait d'abord par aimer et respecter son prochain.