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3.000 à 4.000 personnes traversent quotidiennement la frontière: La Tunisie ne veut plus des touristes algériens

par A. Ouélaa Et A. Zerzouri

Il n'y a pas à redire, la destination Tunisie n'est plus «la Star» des choix des touristes algériens. Un nombre important de touristes algériens, un taux qui tourne entre 30 et 40%, parmi les habitués de cette destination, ont changé d'avis cette année, par contrainte financière puisque les prix des vacances chez le voisin de l'Est se sont envolés sans crier gare, comme l'a résumé un voyagiste, spécialiste de la destination Tunisie, Raouf Bourbia, gérant de l'agence ?Rocher voyages'. Les séjours en Tunisie, qui ont connu une hausse atteignant jusqu'à 50% des prix pratiqués durant la saison estivale 2017, sont devenus hors de portée des familles algériennes, dont le pouvoir d'achat se trouve laminé par une hausse quasi générale des prix, exceptés quelques produits qui bénéficient encore du soutien financier étatique, a considéré notre interlocuteur. Sans parler des dépenses quotidiennes engagées lors du séjour en Tunisie, car la vie est devenue plus chère. Hormis le citron et le poisson dont les prix sont abordables, l'augmentation des prix n'a rien épargné en Tunisie, selon plusieurs témoignages.

Cela va de la restauration, en passant par les prix des fruits et légumes, les cosmétiques dans les grandes surfaces, ainsi que les nuitées dans un hôtel ordinaire (à Bab Djedid, la nuitée qui coûtait 10 D.T est passée à 15 DT, les prix de l'essence et du gasoil ont aussi augmenté, soit environ l'équivalent de 100 Da pour le sans plomb?). Des déclarations qui se vérifient sur le terrain, au niveau du poste frontalier d'Oum Teboul, où il est enregistré une moyenne de 3 000 à 4 000 personnes/jour qui traversent la frontière. Loin, très loin de la cadence enregistrée à la même période, durant la saison estivale 2017, où plus de 12 000 personnes traversaient quotidiennement la frontière pour se rendre en Tunisie, soit un nombre trois fois plus important, selon des informations recueillies au niveau de ce Poste, de loin, le plus important de tous les postes frontaliers terrestres, avec une moyenne de plus 52% du chiffre global des personnes qui rejoignent les terres tunisiennes. Ainsi, ce n'est plus la grande bousculade aux frontières «Est», comme celles vécues durant les dernières saisons.

Un net recul, malgré le battage médiatique et les opérations de charme menés par les Tunisiens afin d'attirer une clientèle sûre, habituée de cette destination. On croyait que la tendance des départs en vacances allait s'améliorer après la proclamation des résultats du bac, mais le constat reste presque le même. Une cause loin d'influer, donc, sur le déplacement des gens.

Encore moins le dernier attentat de Aïn Soltane, dans le Gouvernorat de Djendouba, survenu au mois de juin et qui a coûté la vie à six membres de la Garde républicaine, car les Algériens ont bravé le risque terroriste dans les pires périodes traversées sur ce plan par les Tunisiens. Les touristes algériens ont même sauvé la saison touristique de la Tunisie, en 2016 et 2017, dans des moments où tous les Européens s'en sont détournés. Aujourd'hui, avec le retour d'un calme relatif sur le front sécuritaire, les Algériens sont devenus ?persona non grata'. Les Européens qui reviennent en force passer leurs vacances en Tunisie ont poussé les Algériens vers la sortie, regrettent des voyagistes algériens, qui considèrent qu'il s'agit d'une ingratitude de la part de nos frères tunisiens. Ceci dit, nous avons quand même approché des familles de retour de leurs séjours en Tunisie. Le sentiment, après un séjour d'une semaine ou dix jours, est entre satisfaction et déception. Pour ces cadres de l'administration, habitant à Constantine, le séjour de dix jours passés à Gamart dans un hôtel 4 étoiles, dans le grand Tunis, avec leurs trois enfants, a été agréable. L'accueil était chaleureux et le service impeccable.

Une chambre d'hôtel sans climatisation

Ce n'est pas le cas de ce couple de Béjaia, un huissier de Justice et sa femme médecin qui rentraient de Sousse où «leur séjour a été presque un cauchemar». D'abord, leur séjour d'une semaine, avec leurs deux enfants, payé pour 21 millions de cts, dans un hôtel 5 étoiles avec toboggan pour les enfants, a très mal commencé quand le préposé à la réception leur a donné une chambre dont la climatisation ne fonctionne pas. Il a fallu batailler pour changer la chambre. L'accueil dans cet hôtel n'est pas ce qu'il doit être. Peut-être que c'est l'arrivée des étrangers, dira notre interlocuteur, qui aurait relégué au second plan l'attention accordée d'habitude aux Algériens. Oui, les Algériens sont au même rang que les Tunisiens, disent nos frères de l'Est, pour démentir tout ce qui se raconte au sujet du mauvais accueil réservé aux Algériens en terres tunisiennes, notamment ces histoires de touristes algériens expulsés de leur hôtel en pleine nuit. Le même rang que les Tunisiens, oui, c'est-à-dire pas plus important que les étrangers, puisqu'en Tunisie l'étranger, européen s'entend, est mieux choyé que le Tunisien. En tout cas, nos témoins affirment que même pour le buffet, il a fallu aussi batailler quand ils ont été empêchés d'aller dans le restaurant réservé aux Européens. Une sorte de deuxième collège pour des clients qui sont restés fidèles à cette destination même aux pires moments de son histoire qui a suivi le renversement du régime Benali. Pis, les deux enfants du couple sont rentrés avec des aphtes à cause de l'eau de la piscine mal traitée. Il était également impossible pour ce couple de se plaindre auprès de l'agence qui leur a vendu ce séjour. L'agence en question leur a fait savoir qu'elle a acheté le séjour auprès du «fournisseur», un représentant d'une agence se trouvant en Tunisie, ayant un pied à terre en Algérie.

Ce «fournisseur» achète des chambres dans certains hôtels situés dans des villes et des destinations prisées par les Algériens comme El Marsa, Gamart, la Goulette à Tunis, Nabeul Hamamet et Sousse puis les revend à des agences de voyage établies en Algérie. «L'aventure tunisienne est à éviter», selon les conseils des voyagistes eux-mêmes.