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Des changements et des postures

par Mahdi Boukhalfa

La fin de fonction des généraux Hamel et Nouba, respectivement de la Sûreté et de la Gendarmerie nationales, a mis en branle un étrange processus de changements à la tête de plusieurs services névralgiques notamment de la police nationale, dont le patron des renseignements généraux et plusieurs chefs de sûreté de wilaya. A la Gendarmerie nationale, le mouvement est moins important et, surtout, moins médiatisé. Si le mot «purge» n'est pas approprié, beaucoup s'interrogent cependant sur les raisons de ces changements dans le sillage du départ de deux responsables qui étaient pourtant crédités de «bonnes notes» de leurs supérieurs.

Alors, pourquoi ces changements rapides au sein de la police nationale d'hommes qui seraient, selon des «gorges profondes», proches de Hamel ? De quels hommes de son entourage aurait peur le nouveau patron de la DGSN ou aurait-il des soupçons, auquel cas il doit les porter à celui qui l'a nommé, c'est-à-dire le chef de l'Etat, sur des dysfonctionnements à la tête de la DGSN ? Car changer plusieurs patrons de sûreté de wilaya en un court laps de temps, sans que le nouveau DGSN n'ait pris le temps de connaître ses collaborateurs, serait-il lié à une opération de reprise en main au sein de la police nationale ? Sinon dégommer les hommes de Hamel ? Et, si le changement au sein du corps de la magistrature opéré par le président Bouteflika est classique, car il s'effectue chaque année, son «timing» avec le changement à la tête des chefs de sûreté prête à beaucoup d'interprétations en l'absence de communiqué officiel expliquant à l'opinion publique les raisons de ces changements.

En toute transparence, si du moins ce principe qui est l'ADN de la démocratie est respecté, pour en expliquer les raisons aux citoyens, aux Algériens que l'on mobilise lors des opérations électorales. Car ces changements au plus haut niveau sécuritaire, en particulier pour le poste des RG à la DGSN, sont directement liés, d'une manière ou d'une autre, aux retombées politiques de cette troublante affaire de la cocaïne. Il est clair que les centres de décision au sein de la police nationale seront remaniés en profondeur, avec comme priorité de mettre de côté les «proches» de Hamel ou ceux ayant bénéficié d'une ascension rapide. Mais, la discrétion dans laquelle la police nationale est en train de faire sa mue, pas encore remise de l'affaire de l'assassinat de son ex-directeur Ali Tounsi, ne peut occulter un principe cardinal de son nouveau patron : la communication.

Il est tout à fait étrange de constater que Mustapha Lehbiri, très courtois et proche de la presse nationale, qui a sorti la Protection civile du ghetto grâce à une excellente politique de communication, est soudain devenu, à la tête de la DGSN, très réservé, muet. Le nouveau patron de la DGSN est dans une position délicate. Et, surtout, sait parfaitement qu'il n'a que peu de temps et de marge de manœuvre pour stabiliser de nouveau un corps de sécurité qui peine encore à se relever après l'assassinat de Tounsi. Le départ de Hamel, s'il n'a pas encore livré tous ses secrets, n'en est pas moins un triste épisode de ces luttes intestines au sein du sérail, étonnamment mises en branle à quelques mois de la présidentielle d'avril prochain. Et que l'affaire de la cocaïne n'a fait qu'exacerber, avec des «pions» que l'on sacrifie pour la bonne cause. Les Algériens, eux, ne sauront que ce que l'on veut leur communiquer sur cette affaire et que la lutte contre la corruption ne peut faire de bavures. C'est un peu la mission du nouveau patron de la DGSN qui s'apprête à célébrer les 56 années de la police nationale.