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Enseignement supérieur: L'université ne peut régler, seule, tous les problèmes

par Yazid Alilat

L'université algérienne n'assure plus une formation conforme aux besoins de l'économie nationale. C'est le constat amer d'une mission d'experts du FMI, qui avait pourtant recommandé à l'Algérie de mettre en place des programmes de formation en fonction des besoins de l'économie.

Pour Noureddine Ghouali, DG de l'enseignement et de la formation supérieure au ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique (MESRS), il s'agit en fait «d'une question de fond qui se pose depuis un certain nombre d'années». En clair, l'université algérienne ne forme plus selon les besoins de ses entreprises, de son économie. Selon M. Ghouali, un bilan a été fait sur les réformes de 2004 avec l'introduction du système LMD. «Ce bilan a été fait en janvier 2016 avec la conférence nationale élargie au secteur économique», a-t-il indiqué hier mardi à la radio nationale. «On a constaté une pléthore de formations en déphasage avec la réalité et les besoins des secteurs économiques», a souligné M. Ghouali. «Nous avons constaté qu'il y a eu beaucoup de formations, plus de 7000 en licence et master ; et il fallait clarifier cette situation, car il n'y avait plus de lisibilité ni de visibilité». «Nous avons donc réduit le nombre des licences de 3000 à 200 et les masters (LMD) de plus de 4000 à 600», et que «Ce n'était pas suffisant, car il y a un déphasage énorme entre les besoins et la formation». D'autre part, M. Ghouali a ajouté que «nous avons constaté que l'université doit avoir un rôle plus important que par le passé, avec une responsabilité sociale et économique. Or, les équipes universitaires en place n'étaient pas prêtes en réalité». Selon le directeur général de l'Enseignement et la Formation au MESRS, «nous recevons chaque année plus de 330.000 bacheliers dont 45% en sciences et techniques, et 55% pour les sciences sociales et humaines. On tente alors d'orienter de manière appropriée ces étudiants». «Il y a environ 45% des bacheliers en sciences et techniques qu'on a orienté vers les sciences naturelles et de la vie, en agronomie et sciences alimentaires, et une bonne partie vers les sciences humaines, qui ont un rôle à jouer dans la société», a-t-il souligné. «Globalement on a 50.000 étudiants en moyenne en sciences et techniques, et le reste est réparti entre sciences sociales, sciences économiques et droit», explique M. Ghouali selon lequel «sur 130.000 diplômés en master, il y a 50.000 en sciences et technique, et le reste en sciences sociales et humaines».

«Les défis qui nous attendent sont de les prendre en charge sur le plan professionnel». En fait, estime-t-il quant à la prise en charge professionnelle des diplômés universitaires, «le rôle de l'université et celui des autres secteurs doit être pris en considération, car l'employabilité concerne tous les secteurs». Il a souligné que selon une étude du ministère, «sur 19 secteurs économiques, on a constaté que plus de 47% n'ont pas de nomenclature des métiers, et un pourcentage très élevé n'ont pas de plan de recrutement». Ces secteurs sont l'industrie, l'agriculture, l'économie numérique, «donc il fallait également revoir notre carte de formation, qui existe depuis un certain temps». M. Ghouali a ainsi estimé qu'«il y a des plans de formation en déphasage, et on est en train de revoir la carte de la formation à l'horizon 2025 pour prendre les mesures adéquates». Sur le taux important de déperdition universitaire, il a expliqué que «nous avons également entamé une étude pour examiner les raisons de l'échec à l'université. Cette étude est en train d'être menée par le CREAD, elle va être finalisée au mois de juin, donner les résultats définitifs et apporter les correctifs adéquats». Il a ainsi indiqué que le taux d'échec va jusqu'à 70% pour les langues. «Nous sommes en train d'examiner les raisons, et il y aura des solutions. Cela va nous permettre d'apporter les correctifs nécessaires, car la durée des études coûte de l'argent et on ne peut accepter cette situation d'étudiants mal orientés, mal informés sur tel ou tel profil». Selon M. Ghouali, un étudiant «coûte à l'université en moyenne 120.000 DA par an, et cela varie d'une spécialité à une autre. Il faut que ce coût soit réduit et équitable à l'ensemble des filières». Pour corriger les mauvaises orientations de bacheliers, le directeur général de l'Enseignement et la Formation au MESRS a ajouté que «nous faisons le nécessaire pour les nouveaux bacheliers pour une bonne orientation sur les profils, selon les pré-requis. On a fait le nécessaire pour que l'étudiant soit bien orienté», a-t-il dit en annonçant l'organisation le 11 avril prochain de portes ouvertes pour les futurs bacheliers pour une bonne orientation pédagogique. Car, selon lui, «le gros du problème, ce sont les effectifs des sciences humaines, lettres, sciences sociales... Ils sont très nombreux». «Des réflexions de fond doivent être menées pour trouver des solutions adéquates, et l'ensemble des secteurs sont concernés». «Ce problème est pris en charge, et les résultats seront donnés sous peu». Sur l'échec du système LMD, M. Ghouali, sans botter en touche, estime qu'un bilan a été déjà fait en 2016. «C'est un constat serein. Il y a eu des insuffisances, des dysfonctionnements. On est en train d'apporter les correctifs, et l'université ne peut régler tous les problèmes toute seule».